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29/09/2017 | FRANCE | N°17MA00453

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2017, 17MA00453


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Agostini G et Cie a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 13 mai 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail de la 1ère section d'inspection de l'unité territoriale de la Corse-du-Sud relative à l'inaptitude physique de M. A... et, d'autre part, déclaré l'intéressé inapte à tout poste dans l'entreprise.

Par un jugement n° 1500566 du

1er décembre 2016, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Agostini G et Cie a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 13 mai 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail de la 1ère section d'inspection de l'unité territoriale de la Corse-du-Sud relative à l'inaptitude physique de M. A... et, d'autre part, déclaré l'intéressé inapte à tout poste dans l'entreprise.

Par un jugement n° 1500566 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de la SAS Agostini G et Cie.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 janvier 2017 et le 29 mai 2017, la SAS Agostini G et Cie, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er décembre 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 13 mai 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'illégalité de la décision de l'inspecteur du travail, qui n'a pas respecté la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, entraîne par voie de conséquence l'illégalité de la décision ministérielle ;

- le médecin inspecteur du travail n'a pas consulté le dossier médical détenu par le médecin du travail ;

- M. A... s'est comporté de façon déloyale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 avril 2017, M. C... A..., représenté par Me Orsetti, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 3 000 euros à Me Orsetti soit mis à la charge de la SAS Agostini G et Cie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SAS Agostini G et Cie ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Coutier, rapporteur public.

1. Considérant que M. A..., salarié en qualité de conducteur d'engins par la SAS Agostini G et Cie, a été victime d'un accident du travail le 5 avril 2013 ; qu'à l'issue de deux visites de reprise du travail des 14 août et 3 septembre 2014, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude au poste de conducteur d'engins et préconisé le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise à condition d'éviter les travaux pénibles mobilisant les bras et épaule droits ainsi que le port de charges lourdes et en précisant qu'il pouvait effectuer de petits travaux de soudure ; qu'après le refus de deux offres de reclassement, M. A... a été licencié pour inaptitude le 20 novembre 2014 ; que, saisi qu'une contestation de l'avis du médecin du travail par le salarié, l'inspecteur du travail, par décision du 2 décembre 2014, a infirmé cet avis, déclaré l'intéressé inapte à son poste de conducteur d'engin et à tous travaux de soudure, et précisé que son état de santé ne permettait pas de faire des préconisations pour orienter son reclassement au sein de l'entreprise ; que, sur recours hiérarchique de l'employeur, le ministre chargé du travail, par décision du 13 mai 2015, a annulé, pour défaut de motivation, la décision de l'inspecteur du travail et déclaré M. A... inapte à tout poste dans l'entreprise ; que, par jugement du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de la SAS Agostini G et Cie tendant à l'annulation de cette dernière décision ; que la société relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la décision du 13 mai 2015 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail, dans a rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. / L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail " ; qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, aujourd'hui codifié à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que la décision ministérielle en litige a été prise à la demande de l'employeur et n'était ainsi pas soumise, à l'égard de ce dernier, à la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que la circonstance, à la supposer établie, que cette procédure n'aurait pas été respectée par l'inspecteur du travail est dépourvue d'incidence dans la présente instance ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis émis le 28 novembre 2014 sur saisine de l'inspecteur du travail, que le médecin inspecteur du travail s'est prononcé sur l'aptitude de M. A... au vu du dossier médical détenu par le service de la médecine du travail ; que la lettre du médecin du travail ayant rendu l'avis initial du 3 septembre 2014, qui n'exerce pas à temps complet sur le secteur de Porto-Vecchio dont relève le salarié, n'est pas de nature à rapporter la preuve contraire ;

5. Considérant, en troisième et dernier lieu, que les circonstances tenant à ce que, d'une part, M. A... a initialement indiqué à l'employeur, sur demande expresse de celui-ci, qu'il ne comptait pas contester l'avis du médecin du travail avant de changer d'avis et, d'autre part, le salarié poursuivrait en réalité une " logique indemnitaire ", sont dépourvues d'incidence dans le présent litige en excès de pouvoir ; qu'ainsi le moyen tiré du comportement déloyal du salarié doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Agostini G et Cie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par la SAS Agostini G et Cie et non compris dans les dépens ;

8. Considérant que M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Orsetti, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de la SAS Agostini G et Cie le versement à Me Orsetti de la somme de 2 000 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Agostini G et Cie est rejetée.

Article 2 : La SAS Agostini G et Cie versera à Me Orsetti la somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Orsetti renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Agostini G et Cie, à M. C... A..., au ministre du travail et à Me Orsetti.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2017.

3

N° 17MA00453

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00453
Date de la décision : 29/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03-04 Travail et emploi. Conditions de travail. Médecine du travail.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS YDES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-09-29;17ma00453 ?
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