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10/07/2017 | FRANCE | N°17MA01364

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2017, 17MA01364


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a ordonné son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1609203 du 16 février 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 30 mars 2017 sous le n° 17MA01364, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du

tribunal administratif de Marseille du 16 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a ordonné son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1609203 du 16 février 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 30 mars 2017 sous le n° 17MA01364, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 10 octobre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre une somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il méconnaît les dispositions des articles L. 521-1 à L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur dans l'appréciation de la menace grave et actuelle qu'il représente ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur l'atteinte à sa vie privée et familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient, en se référant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

II. Par une requête, enregistrée le 30 mars 2017 sous le n° 17MA01365, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 16 février 2017 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour ;

3°) de mettre une somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens soulevés au soutien de sa demande d'annulation du jugement sont susceptibles d'entraîner son annulation ainsi que celle de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- et les observations de Me A..., représentant M. C....

1. Considérant que les requêtes n° 17MA01364 et 17MA01365, présentées par le même requérant, sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

2. Considérant que M. C..., de nationalité algérienne, est entré en France en dernier lieu le 17 février 2015 sous couvert d'un visa " famille de français " ; qu'il a sollicité le 5 mars 2015 auprès des services de la préfecture des Bouches-du-Rhône la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ; qu'il relève appel du jugement du 16 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire français ; qu'il demande par ailleurs, par requête séparée, qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;

Sur les conclusions de la requête n° 17MA01364 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'ensemble des moyens ;

3. Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. " ; que l'article L. 521-2 du même code dispose : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle :/ 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ;/ 2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; (...)/ 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ; (...)/ Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger visé aux 1° à 5° peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application de l'article L. 521-1 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans. " ;

5. Considérant que la décision en litige énonce les faits dont s'est rendu coupable M. C... et indique que l'ensemble de son comportement est constitutif d'une menace grave pour l'ordre public ; que, toutefois, en se bornant à viser les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à indiquer que le requérant n'allègue pas être exposé à des peines ou traitements contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet, qui ne mentionne pas la situation familiale de l'intéressé alors que la demande de titre de séjour présentée par ce dernier précise notamment qu'il est marié avec une ressortissante française et père de deux enfants français, n'établit pas avoir vérifié si la mesure d'expulsion envisagée ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, en ne procédant pas à un examen réel et complet de la situation de M. C..., le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la requête n° 17MA01365 :

7. Considérant que le présent arrêt statue sur la requête à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2017 ; que, dès lors, la requête de M. C... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement est devenue sans objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Bouches-du-Rhône procède à un nouvel examen de la situation de M. C..., dans un délai de deux mois à compter de sa notification ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu de mettre une somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2017 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 10 octobre 2016 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer la situation de M. C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 17MA01365 tendant au sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2017.

Article 5 : L'Etat versera une somme de 1 200 euros à M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2017, où siégeaient :

- Mme Steinmetz-Schies, président,

- Mme Héry, premier conseiller,

- M. Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juillet 2017.

4

N° 17MA01364 - 17MA01365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01364
Date de la décision : 10/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : Mme Steinmetz-Schies
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : LETURCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-07-10;17ma01364 ?
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