Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...F...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier de Béziers à lui verser la somme de 46 700 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des conditions de sa prise en charge au sein de cet établissement les 25 avril 1991, 4 mars 1993 et 19 décembre 1996.
Par un jugement n° 1404246 du 28 avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de MmeF....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2015, MmeF..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1404246 du 28 avril 2015 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Béziers à lui verser la somme de 46 700 euros à titre de réparation ;
3°) de mettre les dépens à la charge du centre hospitalier en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Béziers le versement de la somme de 2 000 euros à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Béziers le versement de la somme de 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son action indemnitaire n'est pas prescrite ;
- le centre hospitalier de Béziers a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité ;
- le préjudice subi s'élève à la somme globale de 46 700 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 juin 2016, le centre hospitalier de Béziers, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'action indemnitaire de Mme F...est prescrite ;
- à titre subsidiaire, il n'a pas commis de faute dans la prise en charge de l'intéressée ;
- à titre infiniment subsidiaire, les indemnités réclamées ne sont pas justifiées ou sont excessives.
Mme F...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-947 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laso,
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,
- et les observations de Me A...pour Mme E...épouseF....
1. Considérant que Mme F...relève appel du jugement du 28 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers à réparer les conséquences dommageables des conditions de sa prise en charge dans cet établissement à compter de 1991 ;
Sur l'exception de prescription quadriennale :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ; que, s'agissant d'une créance indemnitaire détenue sur une collectivité publique au titre d'un dommage corporel engageant sa responsabilité, le point de départ du délai de prescription prévu par ces dispositions est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les infirmités liées à ce dommage ont été consolidées ; que toutefois la prescription ne court qu'à compter de la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine du dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l'administration ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : " Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage " ; qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 101 de la même loi, ces dispositions sont immédiatement applicables, en tant qu'elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ; que, toutefois, le législateur n'a pas entendu rendre la prescription décennale applicable aux actions dirigées contre des établissement publics de santé au titre de créances indemnitaires qui, à la date de publication de la loi du 4 mars 2002, étaient déjà atteintes par la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise du 27 janvier 2014 ordonnée par la présidente du tribunal administratif de Montpellier, que l'état de santé de Mme F...a été considéré par l'expert comme consolidé au 16 mars 1997, trois mois après l'intervention chirurgicale du 16 décembre 1996 ; que la requérante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette date ni à établir qu'avant des examens et une proposition d'intervention consistant en une arthrodèse faits en 2000, elle ignorait l'existence de sa créance alors que, victime d'un traumatisme du pouce gauche le 17 mars 1991, elle a été prise en charge aux urgences du centre hospitalier de Béziers où, après une immobilisation par orthèse et devant des douleurs persistantes, elle a subi plusieurs interventions chirurgicales dont une suture du ligament le 25 avril 1991, une ligamento-plastie le 4 mars 1993 et une remise en tension de celle-ci le 16 décembre 1996 ; que Mme F... ne pouvait donc ignorer, dès 1997, l'origine des séquelles dont elle se trouvait atteinte et l'étendue du préjudice en résultant ; qu'en outre, elle ne soutient pas et il ne résulte pas de l'instruction que l'établissement de santé lui aurait donné des informations inexactes qui auraient eu pour effet de lui dissimuler les causes réelles du dommage dont elle demande réparation ; que la circonstance que Mme F...comprenait très mal le français n'est pas de nature à reporter le point de départ du délai de prescription ; qu'ainsi, celui-ci a commencé à courir à compter du 1er janvier 1998 et est venu à expiration, par application des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, le 31 décembre 2001 ; que, par suite, il ne peut être fait application de la prescription décennale instituée par la loi du 4 mars 2002 dès lors qu'à la date d'entrée en vigueur de celle-ci, la prescription des créances dont Mme F...invoque le bénéfice était déjà acquise et que, ainsi qu'il a été dit au point 3, ni les dispositions de l'article 101 de cette loi ni aucune autre disposition n'ont eu pour effet de relever de la prescription les créances d'ores et déjà prescrites ; que la circonstance que la requérante a déposé, en 2009, une demande d'aide juridictionnelle, soit après l'expiration du délai de prescription quadriennale, n'a pas pu avoir pour effet de rouvrir ce dernier ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme F...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'en l'absence de dépens dans la présente instance, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier de Béziers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que Mme F...et son conseil demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...F..., à MeD..., au centre hospitalier de Béziers et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2017, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Laso, président assesseur,
- M. Lafay, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juin 2017.
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N° 15MA02854