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06/06/2017 | FRANCE | N°15MA03794

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 06 juin 2017, 15MA03794


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler le titre de perception émis le 23 décembre 2013 par lequel le ministre de l'agriculture a mis à sa charge la somme de 11 159,11 euros au titre d'un trop perçu de rémunération et la décharge de l'obligation de payer la somme demandée, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à réparer le préjudice d'un même montant subi du fait du retard fautif de l'administration à lui réclamer cette répétition d'indu.r>
Par un jugement n° 1400767 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Montp...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler le titre de perception émis le 23 décembre 2013 par lequel le ministre de l'agriculture a mis à sa charge la somme de 11 159,11 euros au titre d'un trop perçu de rémunération et la décharge de l'obligation de payer la somme demandée, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à réparer le préjudice d'un même montant subi du fait du retard fautif de l'administration à lui réclamer cette répétition d'indu.

Par un jugement n° 1400767 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 septembre 2015 et par un mémoire, enregistré le 27 avril 2017, Mme B..., représentée par la SCP d'avocats Armandet-Le Targat-Geler, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2015 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de la décharger de l'obligation de rembourser cet indu ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la créance de l'Etat est prescrite en application de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

- le titre de perception en litige n'est pas signé en méconnaissance de l'article 4 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- les bases de la liquidation de la créance ne sont pas indiquées ;

- le bien fondé de la créance pour le mois de septembre 2011 est discutable ;

- la faute de l'administration consistant à lui avoir indument versé pendant un semestre sa rémunération d'activité a entraîné un préjudice lié au versement d'un impôt sur le revenu plus important.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier 2017et 9 mai 2017, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificatives pour 2010 ;

- la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

1. Considérant que Mme B..., adjointe administrative principale à la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt du Languedoc-Roussillon, a été admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité imputable au service à compter du 17 mars 2011 ; qu'elle a toutefois continué à bénéficier du versement de son traitement jusqu'au 31 août 2011 ; que le ministre chargé de l'agriculture a émis, le 23 décembre 2013, un titre de perception d'un montant de 11 159,11 euros, pour le reversement de ce trop perçu ; que la requérante a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, l'annulation de ce titre de perception et la décharge de l'obligation de payer la somme demandée et, à titre subsidiaire, la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice d'un même montant subi du fait du retard fautif de l'administration à lui réclamer cette répétition d'indu ; qu'elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande ;

Sur la fin de non recevoir opposée par le ministre à la demande de première instance :

2. Considérant que l'article 118 du décret susvisé du 7 novembre 2012 prévoit que : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité:1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 127-1 du code des assurances : " Est une opération d'assurance de protection juridique toute opération consistant, moyennant le paiement d'une prime ou d'une cotisation préalablement convenue, à prendre en charge des frais de procédure ou à fournir des services découlant de la couverture d'assurance, en cas de différend ou de litige opposant l'assuré à un tiers, en vue notamment de défendre ou représenter en demande l'assuré dans une procédure civile, pénale ou administrative ou autre ou contre une réclamation dont il est l'objet ou d'obtenir réparation à l'amiable du préjudice subi " ; qu'eu égard aux termes de cet article, il résulte clairement, d'une part, des stipulations d'un contrat d'assurance comportant une garantie "protection juridique" et, d'autre part, de la réclamation adressée par l'assureur, la GMF, de Mme B... mentionnant agir en " qualité d'assureur protection juridique " que Mme B... a donné à son assureur mandat pour former, en son nom, auprès du comptable chargé du recouvrement de la créance cette réclamation, qui a pu être régulièrement signée par " la juriste " nommément désignée salariée de la GMF; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la réclamation du 20 janvier 2014 de la GMF adressée à la Direction régionale des finances publiques (DRFIP) Languedoc-Roussillon ne peut être regardée comme la réclamation préalable exigée par l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 ; que cette réclamation a été adressée dans le délai de deux mois suivant la notification du titre de perception et a donné lieu à une décision expresse de rejet le 24 janvier 2014 ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par le ministre doit être écartée ;

Sur l'exception de prescription opposée par la requérante :

3. Considérant qu'à la date à laquelle les salaires réclamés à Mme B... lui ont été versés, la prescription quinquennale prévue à l'article 2277 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, était applicable aux actions en répétition de l'indu exercées par l'Etat contre les agents publics à raison de rémunérations versées en l'absence de service fait ; qu'aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 dans sa rédaction issue de l'article 94 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 et entré en vigueur le 30 décembre 2011 : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 2222 du code civil : " En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. " ; qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, le point de départ de ce délai courait à compter du 30 décembre 2011, date d'entrée en vigueur de la loi et expirait le 30 décembre 2013, alors même que le trop perçu de rémunération concerne la période comprise entre le 17 mars 2011 et le 31 août 2011 ; que le ministre n'établit pas ni même n'allègue avoir adressé une lettre informant Mme B... de son intention de répéter la somme versée indûment ou un ordre de reversement de nature à interrompre ce délai de prescription à la date de leur notification ; que si le titre de perception en litige a été émis le 23 décembre 2013, il est constant qu'il a été expédié le 10 janvier 2014, et qu'il a donc été nécessairement notifié après le 10 janvier 2014 ; qu'à cette date, le délai de répétition de l'indu était expiré et le ministre de l'agriculture n'a pu également émettre à l'encontre de Mme B... le titre exécutoire contesté ; que, dès lors, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté l'exception de prescription qu'elle avait opposée à la créance en litige ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande ; qu'elle est, dès lors, fondée à demander tant l'annulation de ce jugement que de celle du titre de perception émis le 23 décembre 2013 et la décharge de l'obligation de payer la somme de 11 159,11 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 16 juillet 2015 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Le titre de perception émis le 23 décembre 2013 est annulé.

Article 3 : Mme B... est déchargée de l'obligation de payer la somme de 11 159,11 euros.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2017, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 juin 2017.

2

N° 15MA03794


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03794
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

01-03-01-02-01 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Forme et procédure. Questions générales. Motivation. Motivation obligatoire.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP ARMANDET - LE TARGAT - GELER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-06;15ma03794 ?
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