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23/05/2017 | FRANCE | N°15MA02908

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 23 mai 2017, 15MA02908


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Vip Automobile a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, des pénalités y afférentes, et de l'amende prévue au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts.

Par l'article 1er du jugement

n° 1203838 du 25 mars 2015, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge des r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Vip Automobile a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, des pénalités y afférentes, et de l'amende prévue au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts.

Par l'article 1er du jugement n° 1203838 du 25 mars 2015, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige et des pénalités y afférentes, par l'article 2 a prononcé la décharge au titre des années 2008 et 2009 de l'amende prévue par le 4 de l'article 1788 A du code général des impôts à concurrence des sommes respectives de 32 324 euros et de 39 808 euros, par l'article 3 a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et par l'article 4 a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 10 juillet 2015 et le 29 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Nice du 25 mars 2015 ;

2°) de remettre à la charge de la SARL Vip Automobile les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, les pénalités correspondantes et l'amende prévue par le 4 de l'article 1788 A du code général des impôts, soit une somme globale de 2 246 563 euros.

Il soutient que :

- la SARL Vip Automobile, qui n'a pas agi en qualité d'intermédiaire transparent, est redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix total de la revente en France au cours de la période considérée de 271 véhicules d'occasion ;

- en l'absence de déclaration des acquisitions intracommunautaires des véhicules d'occasion, elle était fondée à faire application de l'amende prévue au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts ;

- à titre subsidiaire, les commissions perçues par la SARL Vip Automobile à l'occasion de l'entremise à l'achat de véhicules d'occasion doivent être assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée en France en application des articles 256 et 259 du code général des impôts ;

- le moyen nouveau soulevé en appel par la SARL Vip Automobile n'est pas fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2016, la SARL Vip Automobile, représentée par Mes Orbillot et Sarvary-Bene, conclut au rejet du recours et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés ;

- l'administration a entendu implicitement mettre en évidence un abus de droit, sans toutefois la faire bénéficier des garanties procédurales prévues par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Vip Automobile, qui a notamment déclaré exercer une activité d'intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui consistant à mettre des particuliers français, désireux d'acquérir des véhicules automobiles d'occasion, en relation avec des sociétés espagnoles proposant de tels véhicules à la vente, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a, d'une part, remis en cause le caractère transparent de l'activité d'intermédiaire déclarée par cette société, estimant que celle-ci avait agi en son nom propre et qu'elle devait ainsi être regardée comme un intermédiaire opaque, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur le montant total du prix auquel les véhicules fournis étaient vendus aux particuliers français, et, d'autre part, remis en cause la déduction des résultats imposables à l'impôt sur les sociétés de charges regardées comme non justifiées ; qu'elle a, en conséquence, mis à la charge de la SARL Vip Automobile des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008 et 2009, et fait application de l'amende de 5 % prévue au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel du jugement n° 1203838 en date du 25 mars 2015 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a, par son article 1er, déchargé la SARL Vip Automobile des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été ainsi réclamés, et des pénalités correspondantes, par son article 2, prononcé la décharge de l'amende de 5 % à concurrence des sommes respectives de 32 324 euros et de 39 808 euros au titre des années 2008 et 2009, et, par son article 3, mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions du ministre :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel / (...) / V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés " ; qu'aux termes du III de l'article 256 bis de ce code : " Un assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une acquisition intracommunautaire, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien " ; qu'aux termes de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : / (...) b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : / Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis (...) " ;

3. Considérant que si la SARL Vip Automobile n'a présenté au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet ni les mandats de vente la liant aux sociétés espagnoles, ni les offres commerciales de ces sociétés correspondant aux demandes des clients français, et si le vérificateur a relevé des incohérences concernant certains dossiers, les bons de réservation signés par la société requérante avec ses clients français comportaient une mention selon laquelle elle agissait en qualité de mandataire d'un négociant espagnol ainsi que l'identité de ce négociant, lequel établissait la facture au nom du client français ; que si la société Vip Automobile encaissait un acompte au moment de la réservation du véhicule puis, une fois la vente intervenue, le solde du prix de vente, il résulte de l'instruction que le prix était intégralement versé aux sociétés de droit espagnol, alors que la SARL Vip Automobile établissait par ailleurs une facture de commission de vente à destination du fournisseur espagnol ; que les circonstances que la société requérante effectuait elle-même des recherches de véhicules d'occasion par le biais de sites internet allemands puis proposait les véhicules sur son propre site ou sur des sites spécialisés français par le biais d'annonces reproduites à l'identique, que les sociétés espagnoles n'achetaient les biens en cause auprès des fournisseurs allemands qu'après avoir reçu le bon de commande et perçu le prix, et que la société appelante assurait à ses frais le transport des véhicules, le cas échéant par l'intermédiaire d'un tiers, ne sauraient suffire à faire regarder la SARL Vip Automobile comme ayant exercé elle-même une activité de négoce de véhicules ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont jugé que la SARL Vip Automobile avait agi en qualité d'intermédiaire transparent et qu'elle ne pouvait en conséquence être taxée sur le montant total des transactions réalisées au cours de la période considérée, ni se voir appliquer l'amende prévue à l'article 1788 A du code général des impôts à raison du défaut de déclaration des livraisons intracommunautaires correspondantes ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période en litige : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle " ; qu'aux termes de l'article 259 A du même code, dans sa rédaction applicable à la période en litige : " Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France : / (...) 6° Les prestations des intermédiaires qui agissent au nom et pour le compte d'autrui (...) : / a) Lorsque le lieu de ces opérations est situé en France, sauf si le preneur a fourni au prestataire son numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre (...) " ;

5. Considérant que le ministre des finances et des comptes publics demande à titre subsidiaire à la Cour de procéder à une substitution de base légale et d'assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée les commissions perçues par la SARL Vip Automobile à l'occasion de l'entremise à l'achat de véhicules d'occasion au cours de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 sur le fondement des articles 256 et 259 du code général des impôts ;

6. Considérant toutefois qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la SARL Vip Automobile a agi en qualité d'intermédiaire pour le compte de sociétés espagnoles, lesquelles doivent être regardées comme les bénéficiaires effectifs des prestations d'entremise, alors même que les commissions qui leur ont été facturées ont été déduites du prix versé par les acheteurs français des véhicules ; que, par suite, la SARL Vip Automobile ne peut être regardée comme ayant réalisé des opérations d'entremise à l'achat fournies aux acheteurs de véhicules français ; qu'ainsi, et alors qu'il est constant que les sociétés espagnoles ont fourni à la SARL Vip Automobile leur numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre, le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que les commissions perçues auraient dû être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée en France ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice, d'une part, a accordé à la SARL Vip Automobile la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, et de l'amende prévue par le 4 de l'article 1788 A du code général des impôts à concurrence des sommes respectives de 32 324 euros et de 39 808 euros, et, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à la SARL Vip Automobile la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SARL Vip Automobile de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SARL Vip Automobile la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à la SARL Vip Automobile.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2017, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Boyer, premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 mai 2017.

2

N° 15MA02908

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02908
Date de la décision : 23/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Base d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : SELARL MBA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-05-23;15ma02908 ?
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