Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C... épouse A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1602140 du 11 mai 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 novembre 2016, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 mai 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour renouvelable ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation de son conseil à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée en fait ;
- elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié en Arménie, état où elle a subi de graves traumatismes ;
- le préfet a fait une inexacte appréciation des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli.
1. Considérant que Mme A..., ressortissante arménienne née en 1954, relève appel du jugement du 11 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination ;
Sur la légalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...) " et qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé." ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision rejetant la demande de titre de séjour de Mme A... a été prise au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur le 27 mai 2015 indiquant que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié pour sa prise en charge médicale dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque ; que les affirmations d'ordre général de Mme A... relatives au système de soins, selon elle déficient pour soigner la pathologie dont elle est victime, existant en Arménie ne sont étayées par aucun document ; que ni la lettre du 27 février 2015 adressée par un médecin psychiatre à un autre médecin, antérieurement d'ailleurs à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, ni les ordonnances médicales établies entre novembre 2014 et novembre 2015 ni le certificat médical du 13 décembre 2016, présentés par la requérante à l'appui de sa demande, ne permettent d'infirmer les éléments sur lesquels s'est appuyé le préfet, qui n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 du même code en lui refusant le titre de séjour demandé ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
4. Considérant, en second lieu, que Mme A... n'établit pas être entrée en France le 31 août 2011 et y résider depuis cette date comme elle le soutient ; que son époux est décédé en 5 juin 2014 ; que si elle est hébergée en France par l'un de ses fils, en situation régulière, un autre de ses fils s'y trouve en situation irrégulière ; que Mme A... ne justifie pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu selon ses dires jusqu'à l'âge de cinquante-sept ans ; qu'elle ne justifie pas davantage une insertion socioprofessionnelle particulière ; que, dans ces conditions, le préfet, en refusant le titre de séjour sollicité et en prenant la décision d'éloignement, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation et, à supposer que la requérante ait entendu invoquer un tel moyen, n'a pas porté au droit de l'intéressée, entrée récemment en France, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive et disproportionnée par rapport au but en vue duquel cette mesure a été décidée et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
En ce qui concerne la légalité externe de la décision :
5. Considérant que la décision fixant le pays de destination, qui constitue une décision distincte de celles portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français devant être motivée en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, indique notamment que la requérante peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers l'Arménie ; que la même décision ajoute que l'intéressée n'établit pas être dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de son existence ; que, dans ces conditions, le moyen tiré d'un défaut de motivation en fait de la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne de la décision :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " et que cet article de la convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
7. Considérant que Mme A... n'établit ni l'existence des risques qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ni le lien entre son état de santé et les événements traumatisants qu'elle aurait subis en Arménie ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doit être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...épouseA..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2017, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique le 27 avril 2017.
N° 16MA04127 5