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16/03/2017 | FRANCE | N°16MA03239

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 16 mars 2017, 16MA03239


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et Mme E... A...épouse B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 18 mars 2016 par lesquels le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office.

Par deux jugements n° 1602128 et 1602127 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demand

es.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 16MA03239,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et Mme E... A...épouse B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 18 mars 2016 par lesquels le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office.

Par deux jugements n° 1602128 et 1602127 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 16MA03239, le 8 août 2016, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté en litige ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de procéder à une nouvelle instruction de sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :

- compte tenu de son état de santé, la mesure d'éloignement méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant du pays de renvoi :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2016, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée sous le numéro 16MA03240, le 8 août 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté en litige ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de procéder à une nouvelle instruction de sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :

- eu égard à l'état de santé de son épouse, son éloignement méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant du pays de renvoi :

- cette décision l'exposerait à des risques, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2016, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 16MA03239.

M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 10 octobre 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné Mme Evelyne Paix, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bédier, président de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Haïli.

1. Considérant que les requêtes n° 16MA03239, présentée pour Mme B..., et n° 16MA03240, présentée pour M. B..., présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que les épouxB..., de nationalité ukrainienne, interjettent appel des jugements du 5 juillet 2016 par lesquels le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande d'annulation des arrêtés du 18 mars 2016 du préfet des Pyrénées-Orientales portant refus de leur délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les refus de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État " ;

4. Considérant que si les requérants invoquent l'état de santé de Mme B..., qui souffrirait d'un syndrome de stress post-traumatique sévère, ils ne produisent aucune pièce médicale au soutien de leurs affirmations ; que, d'autre part, le titre de séjour n'a pas été demandé à ce titre, et que le préfet des Pyrénées-Orientales ne s'est pas prononcé sur le fondement de ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré par eux de la violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

6. Considérant que M. et Mme B...indiquent être entrés en France le 10 avril 2014 ; qu'eu égard au caractère récent de la présence en France de la famille, aucun obstacle ne s'oppose à ce que les requérants, en situation irrégulière, repartent dans leur pays d'origine avec leurs trois enfants où ceux-ci pourront, pour les aînés, poursuivre leur scolarité et, pour le plus jeune né en 2014, la commencer ; qu'ainsi, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'intérêt supérieur des enfants n'aurait pas été suffisamment pris en compte ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que ces dispositions n'ont pas été méconnues ;

9. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes raisons que celles exposées au point 6, le moyen tiré par M. et Mme B... de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

11. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger a l'obligation de s'assurer, au vu du dossier dont elle dispose et sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est en droit de prendre en considération, à cet effet, les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile ayant statué sur la demande d'asile du requérant, sans pour autant être liée par ces éléments ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes d'asile des époux B... ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 juin 2015, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 3 février 2016 ; que les requérants n'apportent aucun élément nouveau par rapport aux risques allégués tels qu'examinés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, mais se bornent à faire état de manière générale de la situation politique, économique et sociale de l'Ukraine sans démontrer la réalité de risques personnels encourus ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...épouseB..., à M. D... B..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2017, où siégeaient :

- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2017.

2

N° 16MA03239, 16MA03240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03239
Date de la décision : 16/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SUMMERFIELD TARI ; SUMMERFIELD TARI ; SUMMERFIELD TARI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-03-16;16ma03239 ?
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