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19/12/2016 | FRANCE | N°15MA00642

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2016, 15MA00642


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 111 391,07 euros à titre de réparation des préjudices résultant de l'intervention chirurgicale subie le 29 mars 2010 à l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille.

Par un jugement n° 1301373 du 15 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'ONIAM à verser

M. D... la somme de 57 554,39 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 111 391,07 euros à titre de réparation des préjudices résultant de l'intervention chirurgicale subie le 29 mars 2010 à l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille.

Par un jugement n° 1301373 du 15 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'ONIAM à verser à M. D... la somme de 57 554,39 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 février 2015, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1301373 du 15 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 57 554,39 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné l'ONIAM en réparation des préjudices qu'il a subis ;

2°) de porter à la somme de 111 391,07 euros le montant de l'indemnité due à titre de réparation ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les sommes allouées par le tribunal au titre de la perte de gains professionnels actuels, de l'incidence professionnelle, du déficit fonctionnel temporaire partiel, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique sont insuffisantes.

Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2016, l'ONIAM, représenté par Me C..., demande à la Cour de rejeter la requête de M. D....

Il soutient que l'évaluation des préjudices subis faite par le tribunal doit être confirmée.

Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2016, l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, représenté par Me F..., demande à la Cour de prononcer sa mise hors de cause.

Elle soutient qu'aucune conclusion n'est dirigée contre elle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laso ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me B... substituant le cabinet Burzio-E... représentant

M.D....

1. Considérant que M. D..., né le 3 mars 1986, a été opéré à l'hôpital Sainte-Marguerite qui dépend de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, le 29 mars 2010, à la suite d'une fracture du tibia du tiers moyen et du tiers inférieur, où une ostéosynthèse par clou centromédullaire a été réalisée ; qu'un électromyogramme réalisé le 16 avril 2010 a révélé l'existence d'un déficit des releveurs du pied avec une paralysie du nerf sciatique poplité externe au niveau de la tête péronière ; qu'estimant que les séquelles qu'il conserve sous la forme d'une perte complète de la force musculaire des releveurs du pied et de l'extenseur des orteils associée à un trouble de la sensibilité étaient imputables à cette intervention, M. D... a saisi le tribunal administratif de Marseille et recherché la condamnation de l'ONIAM à réparer ses préjudices ; qu'il relève appel du jugement du 15 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 57 554,39 euros l'indemnité mise à la charge de l'ONIAM ;

Sur l'obligation de l'ONIAM :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert médical désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille que la paralysie du nerf sciatique poplité externe, consécutive à l'intervention chirurgicale du 29 mars 2010, peut être expliquée, même si elle présente une faible probabilité, par une souffrance du nerf par la compression du garrot et du support de jambe, nécessaires pour la pose d'un clou centromédullaire ; que l'accident ainsi survenu résulte d'un geste médical non fautif qualifié par l'expert d'aléa thérapeutique ; que les séquelles dont est atteint le requérant sont directement imputables à cette opération ; que le taux du déficit fonctionnel permanent présenté par M. D... correspondant à une paralysie des releveurs du pied est fixé à 20 % ; que les conséquences de cette intervention sont notablement plus graves que celles auxquelles l'intéressé était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement ; que la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles et celle du déficit fonctionnel temporaire imputables à l'accident médical ont été supérieures à six mois ; que, dans ces conditions, et sans que cela soit d'ailleurs contesté par l'ONIAM, les dommages résultant de cet accident médical non fautif remplissent les conditions d'anormalité et de gravité prévues et ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale en application du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;

Sur l'évaluation des préjudices :

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert médical que M. D... a subi, en lien avec la complication de l'intervention, un arrêt de travail d'un an à compter du 29 juin 2010 ; que l'intéressé qui exerçait, parallèlement à ses études, les activités d'agent de nettoyage, d'agent de sécurité et de stadier a perçu, pour la période allant de juillet 2009 à mars 2010, ainsi qu'il résulte des bulletins de paie produits, des revenus d'un montant mensuel de 1 775,32 euros ; que la perte de revenus du 29 juin 2010 au 29 juin 2011 doit être fixée, compte tenu de ces revenus, à un montant de 21 303,84 euros ; que, durant cette période, le requérant indique avoir perçu des indemnités journalières d'un montant de

9 099,45 euros ; que, dès lors, la perte de gains professionnels actuels doit être fixée à la somme de 12 204,39 euros ; que, par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fixé le montant de la perte de revenus à la somme de 12 204,39 euros ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise que M. D..., âgé de vingt-quatre ans lors de l'intervention en cause, a subi, ainsi qu'il a été dit au point 1, une perte complète de la force musculaire des releveurs du pied et de l'extenseur des orteils associée à un trouble de la sensibilité ; que ces séquelles peuvent être regardées comme définitives ; que la gêne douloureuse dans les mouvements de flexion du pied et de la cheville est, par ailleurs, à l'origine d'une perte de chance pour l'accès à certaines professions ; que, dès lors, ces difficultés ont une incidence professionnelle pour M. D..., alors même qu'il était encore étudiant ; que, compte tenu de son âge au moment de l'intervention et de son handicap, il sera faite une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 10 000 euros ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que M. D... a subi, en lien avec l'accident médical, des périodes de déficit fonctionnel au taux de 50 % du 29 avril 2010 au 24 janvier 2011 soit pendant 271 jours, puis au taux de 25 % du 24 janvier 2011 au 28 mars 2012 soit pendant 429 jours ; que, compte tenu de la durée et de l'ampleur du déficit fonctionnel temporaire, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'en fixant à 3 250 euros le montant de l'indemnité due à ce titre, les premiers juges auraient fait une évaluation insuffisante de ce préjudice ; qu'en revanche, les premiers juges ont fait une appréciation insuffisante des souffrances endurées par M. D..., incluant la souffrance psychologique, évaluées à 3,5 sur une échelle de 7, en lui allouant à ce titre une indemnité de

4 200 euros ; qu'il sera fait une exacte évaluation du montant de cette indemnité en le fixant à la somme de 5 000 euros ;

6. Considérant que M. D... n'apporte aucun élément de nature à établir que les premiers juges auraient fait une appréciation insuffisante du préjudice esthétique évalué à 3 sur une échelle de 7, et du déficit fonctionnel permanent évalué au taux de 20 %, en lui allouant des indemnités de 3 500 euros et de 31 100 euros en réparation de ces préjudices ; qu'en revanche, compte tenu de la pratique régulière d'activités sportives, il y a lieu de fixer à la somme de 3 200 euros le préjudice d'agrément résultant pour l'intéressé de l'abandon de ces activités du fait de l'accident médical dont il a été victime ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... est seulement fondé à demander que l'indemnité, que le tribunal administratif a condamné l'ONIAM à lui verser, soit portée, compte tenu de l'indemnité non contestée de 800 euros qui lui avait été allouée au titre des frais d'assistance par un médecin-conseil, à la somme de 69 055 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 57 554,39 euros que l'ONIAM a été condamné à verser à M. D... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 décembre 2014 est portée à 69 055 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1301373 du tribunal administratif de Marseille du 15 décembre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 4 : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales versera à M. D... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille et à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Laso, président-assesseur,

- M. Lafay, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 décembre 2016.

2

15MA00642


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00642
Date de la décision : 19/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-005-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité sans faute. Actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Michel LASO
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : BURZIO - CONSOLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-19;15ma00642 ?
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