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15/12/2016 | FRANCE | N°15MA01469

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 15MA01469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la commune de Marseillan et la société MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 12 533,31 euros en réparation du préjudice matériel résultant des carences de la commune dans l'exercice de son pouvoir de police portuaire et de sa mission d'exploitation de l'outillage public portuaire.

Par un jugement n° 1303724 du 13 février 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. D

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Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2015...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la commune de Marseillan et la société MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 12 533,31 euros en réparation du préjudice matériel résultant des carences de la commune dans l'exercice de son pouvoir de police portuaire et de sa mission d'exploitation de l'outillage public portuaire.

Par un jugement n° 1303724 du 13 février 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2015, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 février 2015 ;

2°) de condamner solidairement la commune de Marseillan et la société MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 12 533,31 euros, assortie, d'une part, des intérêts moratoires à compter de la demande préalable ou de l'enregistrement de la requête au greffe de la juridiction et, d'autre part, sur le fondement de l'article L. 911-3 du code de justice administrative, d'une astreinte dont la Cour fixera le montant et la date d'effet ;

3°) d'enjoindre aux parties défenderesses de lui communiquer le rapport d'expertise amiable ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Marseillan et de la société MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 3 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a commis aucune faute à l'origine du sinistre, le jugement étant entaché d'erreurs de fait et de droit sur ce point ;

- en refusant à plusieurs reprises le grutage de son bateau en vue de sa sécurisation urgente par une mise hors d'eau, la commune de Marseillan a commis une faute dans l'exercice de son pouvoir de police portuaire et de sa mission de service public d'exploitation de l'outillage public portuaire ;

- cette faute est à l'origine des dommages subis par le moteur du bateau ;

- le remplacement du moteur s'élève à la somme de 12 533,31 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 11 mai 2015 et le 10 novembre 2016, la commune de Marseillan, représentée par Me F..., SCP MarijonF..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la juridiction administrative est seule compétente pour statuer sur le litige ;

- les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 juillet 2015 et le 18 novembre 2016, la société MMA Iard Assurances Mutuelles, représentée par Me B..., SELARL B...- Reina, conclut au rejet de la requête et à ce que soient mis à la charge de M. D... les dépens de l'instance ainsi que la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la juridiction administrative est compétente pour statuer sur le litige ;

- les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune de Marseillan en sa qualité d'exploitante de l'outillage public du port.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports ;

- le code des assurances ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant la société MMA Iard Assurances Mutuelles.

1. Considérant que le bateau " Hippocampe II ", appartenant à M. D..., a été atteint d'une voie d'eau le 8 novembre 2010 alors qu'il était amarré sur le canal du Midi ; qu'afin de faire procéder aux réparations nécessaires, M. D... a fait remorquer son bateau jusqu'au port de Marseillan ; que M. D... relève appel du jugement du 13 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Marseillan et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, assureur de cette dernière, à lui payer la somme de 12 533,31 euros, représentant le coût du remplacement du moteur ;

2. Considérant que la commune de Marseillan, prise dans son activité d'exploitation de l'outillage public du port de plaisance, assure la gestion d'un service public industriel et commercial ; que le préjudice dont M. D... demande réparation résulterait notamment du retard dans la mise hors d'eau du bateau au moyen d'une grue, qui appartient à l'outillage public du port ; qu'en tant que M. D... reproche à la commune d'avoir commis une faute dans l'exercice de " sa mission de service public lié à l'exploitation et à la mise à disposition de l'outillage public portuaire ", le litige a nécessairement pour objet les rapports du service avec ses usagers pris en cette qualité ; qu'il échappe ainsi à la compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, le jugement du 13 février 2015 est entaché d'irrégularité en tant qu'il statue sur les conclusions dirigées contre la commune de Marseillan sur ce fondement de responsabilité et doit, dans cette mesure, être annulé ;

3. Considérant, en revanche, qu'en vertu de l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, un contrat d'assurance passé par une des personnes morales de droit public soumises aux dispositions du code des marchés publics, notamment par une collectivité territoriale, présente le caractère d'un contrat administratif ; que l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre relève de la compétence de la juridiction administrative, dès lors que le contrat d'assurance présente le caractère d'un contrat administratif et que le litige n'a pas été porté devant une juridiction judiciaire avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001 ; que, par suite, les conclusions dirigées contre la société MMA Iard Assurances Mutuelles, assureur de la commune de Marseillan, fondée sur une faute de cette dernière qui aurait été commise dans le cadre du service public industriel et commercial d'exploitation de l'outillage public portuaire, relèvent de la compétence du juge administratif ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour de statuer sur les conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Marseillan présentées par M. D... en première instance, fondées sur une faute commise dans le cadre du service public industriel et commercial d'exploitation de l'outillage public portuaire, par la voie de l'évocation et sur les autres fondement de responsabilité invoqués par l'effet dévolutif de l'appel ;

Sur les conclusions dirigées contre la commune de Marseillan prise en sa qualité d'exploitante de l'outillage public portuaire :

5. Considérant que, pour les motifs mentionnés au point 2, les conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Marseillan, en tant qu'elles sont fondées sur une faute dans la gestion du service public industriel et commercial d'exploitation de l'outillage public du port de plaisance, doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les conclusions dirigées contre la commune de Marseillan à raison de l'exercice de son pouvoir de police portuaire et sur les conclusions dirigées contre la société MMA Iard Assurances Mutuelles :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 5331-7 du code des transports : " L'autorité portuaire exerce la police de l'exploitation du port, qui comprend notamment l'attribution des postes à quai et l'occupation des terre-pleins. / Elle exerce la police de la conservation du domaine public du port " ; qu'aux termes de l'article L. 5331-8 de ce code : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire exerce la police du plan d'eau qui comprend notamment l'organisation des entrées, sorties et mouvements des navires, bateaux ou autres engins flottants (...) " ; que l'article L. 5331-10 du même code dispose : " Dans chaque port, des règlements particuliers peuvent compléter les règlements généraux de police (...) " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 du règlement de police des ports de Marseillan : " (...) L'accès du port n'est autorisé qu'aux navires en état de naviguer (...) ainsi qu'à ceux courant un danger ou en état d'avarie (...). / L'autorité portuaire peut interdire l'accès du port aux bateaux dont l'entrée serait susceptible de compromettre la sécurité, la conservation ou la bonne exploitation des ouvrages portuaires " " ; que l'article 6 du même règlement dispose " Tout usager du port doit être assuré pour les risques suivants : / - Dommages causés aux ouvrages du port. / - Renflouement et enlèvement du bâtiment coulé quelle que soit l'origine du sinistre dans les limites des ports ou dans les chenaux d'accès. / Dommages causés aux tiers à l'intérieur des ports " ;

8. Considérant que le bateau de M. D... est entré dans le port de Marseillan le 11 novembre 2010, jour de fermeture de la capitainerie placée sous la responsabilité du maire de Marseillan, autorité investie du pouvoir de police portuaire en vertu de l'article L. 5331-6 du code des transports ; que si l'intéressé affirme qu'il avait préalablement obtenu l'autorisation de la capitainerie, il résulte de l'instruction que cette autorisation, sollicitée le 8 novembre, avait été refusée sur le fondement des dispositions combinées des articles 3 et 6 du règlement de police du port, en l'absence notamment de production d'une attestation d'assurance ; qu'avec l'aide de deux prestataires privés du port, les entreprises Bad'Oc et Artimon, dont il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la commune leur aurait délégué une mission de service public, M. D... a tenté de sortir le bateau du plan d'eau en utilisant une remorque ; que celle-ci s'est brisée sous le poids de l'embarcation remplie d'eau ; que le bateau a ensuite été échoué avec l'aide des mêmes entreprises, le 12 novembre, sur un plan incliné de la zone technique dite de Tabarka, appelé " plage " par le requérant ; que l'intéressé n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles il se serait adressé à ces entreprises sur la demande de la capitainerie et que celle-ci aurait ensuite décidé du lieu de l'échouage ; que le 13 novembre 2010, la capitainerie du port a refusé de procéder à l'enlèvement du bateau au moyen d'une grue pour le même motif légitime d'absence d'attestation d'assurance ; que M. D... soutient, au demeurant sans l'établir, que, dans la nuit du 14 au 15 novembre 2010, un " coup de mer " a submergé le bateau échoué et noyé le moteur ; qu'à la mise hors d'eau de ce dernier, finalement effectuée par grutage le 17 novembre 2010, il aurait été constaté que le moteur avait été endommagé ; que, dans ces conditions, en admettant même que le moteur, qui n'a jamais fonctionné depuis la voie d'eau du 8 novembre 2010, aurait été dégradé par le " coup de mer " subi dans la nuit du 14 au 15 novembre 2015, le préjudice matériel invoqué, résultant du coût du remplacement du moteur, n'est imputable qu'à la faute de M. D... qui n'a pas présenté son attestation d'assurance à l'autorité portuaire, et ne l'a d'ailleurs pas davantage produite dans l'instance, et a fait preuve d'imprudence en décidant de sa propre initiative de tenter de remorquer son bateau puis, après l'échec de cette manoeuvre, de l'échouer dans un lieu insuffisamment protégé du risque de montée des eaux ; que, par suite, M. D... n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de la commune de Marseillan à raison d'une carence dans l'exercice de ses pouvoirs de police portuaire et à demander, pour ce motif, la condamnation solidaire de la commune et de la société MMA Iard Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 12 533,31 euros en réparation du préjudice qu'il aurait subi ; que, pour les mêmes motifs, les conclusions indemnitaires dirigées contre l'assureur fondées sur une faute de la commune qui aurait été commise dans le cadre du service public industriel et commercial d'exploitation de l'outillage public portuaire doivent également être rejetées ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'enjoindre aux intimées de communiquer le rapport d'expertise amiable qui aurait été établi par l'assureur, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Marseillan, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. D... la somme de 1 000 euros chacune au titre des mêmes frais engagés par la commune et par la société MMA Iard Assurances Mutuelles ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 février 2015 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires de M. D... dirigées contre la commune de Marseillan fondées sur une faute commise dans le cadre du service public industriel et commercial d'exploitation de l'outillage public portuaire.

Article 2 : Les conclusions indemnitaires de première instance visées à l'article 1er sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : M. D... versera à la commune de Marseillan et à la société MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à la commune de Marseillan et à la société MMA Iard Assurances Mutuelles.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

N° 15MA01469 2

acr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01469
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel - Problèmes particuliers posés par certaines catégories de services publics - Service public industriel et commercial.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de police - Police des ports.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SCP JANBON

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-15;15ma01469 ?
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