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24/11/2016 | FRANCE | N°15MA01930

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 24 novembre 2016, 15MA01930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de procéder au renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1500910 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme A... et a condamné l'intéressée au paiement d'une amende de 2 000 euros sur l

e fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de procéder au renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1500910 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme A... et a condamné l'intéressée au paiement d'une amende de 2 000 euros sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 mai 2015, le 20 mai 2016 et le 5 octobre 2016, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 avril 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté préfectoral du 6 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir et, en toute hypothèse, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la même date ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement de la somme de 1 500 euros à son conseil, qui s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement, la condamnant au paiement d'une amende pour recours abusif, sont recevables ;

- le tribunal n'a pas examiné sa situation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- dès lors, la condamnation pour recours abusif doit être annulée ;

- le refus de séjour porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

- il méconnaît l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle et familiale ;

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement condamnant Mme A... au paiement d'une amende de 2 000 euros pour recours abusif dès lors qu'elles ont été présentées après l'expiration du délai d'appel.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chanon, premier conseiller.

1. Considérant que, par jugement du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, rejeté la demande de Mme A..., de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de procéder au renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, condamné l'intéressée au paiement d'une amende pour recours abusif de 2 000 euros sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative ; que Mme A... relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la condamnation au paiement d'une amende pour recours abusif :

2. Considérant que ces conclusions ont été présentées pour la première fois par mémoire enregistré le 20 mai 2016, après l'expiration du délai d'appel ; que, par suite, elles doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, le jugement répond, au point 7, au moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité ;

Sur la légalité du refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que Mme A... a obtenu la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, valable du 1er septembre 2009 au 31 août 2010 ; que cet enfant, né en France le 1er juillet 2008, a été reconnu par anticipation par son père ; que, par jugement du 11 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Marseille a annulé l'acte de reconnaissance du père et ordonné la rectification de l'acte de naissance de l'enfant, Mme A... admettant au demeurant le caractère frauduleux de la reconnaissance paternelle ; que, dans son mémoire complémentaire, la requérante a expressément abandonné le moyen tiré de sa qualité de parent d'enfant français ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui déclare sans en justifier être entrée sur le territoire français dans le courant de l'année 2005, réside de façon habituelle en France depuis le début de l'année 2008 ; que, comme il a été dit précédemment, elle a donné naissance à un enfant le 1er juillet 2008 ; qu'elle a travaillé presque continuellement à partir de 2011 et jusqu'au 21 avril 2015, date de son licenciement à la suite du refus de renouvellement de titre de séjour, en qualité d'aide à domicile au sein de la Croix-Rouge Française, alors qu'elle bénéficiait de récépissés de demandes de titre de séjour dans l'attente d'une décision préfectorale sur sa demande de renouvellement ; que Mme A..., née le 16 février 1972, n'invoque aucun autre lien sur le territoire français ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de renouvellement de titre de séjour lui a été opposé ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, dans les circonstances qui viennent d'être exposées, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait apprécié de façon manifestement erronée les conséquences du refus de séjour sur la situation personnelle de Mme A... ;

8. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

9. Considérant que, dans l'ensemble des circonstances de l'espèce, compte tenu de tout ce qui a été dit précédemment et alors même que l'enfant de Mme A... se serait cru de nationalité française pendant une période, qu'il est scolarisé et qu'il n'a jamais vécu au Maroc, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant que, pour les mêmes motifs qu'en ce qui concerne le refus de séjour, et eu égard aux effets d'une mesure d'éloignement, doivent être écartés les moyens tenant à la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de Mme A... ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et l'a condamnée au paiement d'une amende pour recours abusif ; que, par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C....

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 novembre 2016.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01930
Date de la décision : 24/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : BLANC-DUNY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-11-24;15ma01930 ?
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