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17/11/2016 | FRANCE | N°14MA04648

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 17 novembre 2016, 14MA04648


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1300756 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 25 novembre 2014, le 30 mars 2015, le 4 juillet 2016 et le 6 juillet 2016, M. A..., r

eprésenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1300756 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 25 novembre 2014, le 30 mars 2015, le 4 juillet 2016 et le 6 juillet 2016, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 2 octobre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'indemnité qui lui a été allouée par la SARL Raoux et Cie n'est pas imposable dès lors qu'elle fait suite à sa révocation de ses fonctions de gérant ;

- à titre subsidiaire, seule la somme de 13 628 euros est imposable en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts dès lors que le plafond d'exonération s'apprécie en tenant compte de l'ensemble des salaires versés par des sociétés du même groupe.

Par des mémoires en défense enregistrés le 17 mars 2015, le 6 avril 2016 et le 13 juillet 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, l'indemnité en litige peut être imposée sur le fondement du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts à hauteur d'un montant de 85 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ouillon,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. A... relève appel du jugement du 2 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2008 à la suite d'un contrôle sur pièces et des pénalités correspondantes ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 79 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu " ;

3. Considérant que M. A... a été révoqué de ses fonctions de gérant de la SARL Raoux et Cie à la suite d'une assemblée générale extraordinaire qui s'est tenue le 19 décembre 2008 ; qu'au cours de la vérification de comptabilité de la SARL Raoux et Cie, l'administration a constaté que cette société avait comptabilisé au 31 décembre 2008 une indemnité de révocation au profit de M. A... d'un montant de 170 000 euros ; que sans remettre en cause le caractère déductible de cette somme des résultats imposables de la société, l'administration a estimé que son allocation n'était pas liée à la révocation et a imposé M. A... à l'impôt sur le revenu sur la totalité de la somme, qui n'avait pas été déclarée, dans la catégorie des traitements et salaires ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de sa révocation, M. A... a adressé un courrier le 23 décembre 2008 au nouveau gérant de la SARL Raoux et Cie dans lequel il contestait le principe de sa révocation, évoquait sa volonté de saisir le tribunal de commerce de ce différend afin notamment d'obtenir une indemnisation et proposait une éventuelle transaction ; qu'en réponse, par courrier du 24 décembre 2008, le gérant de la SARL Raoux et Cie a indiqué qu'il envisageait la possibilité d'une transaction ; qu'un accord est ainsi intervenu entre les parties et la SARL Raoux et Cie pour allouer à M. A... une indemnité de révocation d'un montant de 170 000 euros, comme il ressort d'une attestation de l'expert-comptable de la société, produite par le requérant à l'instance ;

5. Considérant que si l'administration rappelle que M. A... est resté dans l'entreprise en qualité de directeur salarié de la régulation, elle n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il disposait encore d'un pouvoir général de représentation de cette société ni que la somme en litige lui a été attribuée au titre de ses fonctions salariées alors que le maintien de l'intéressé dans la SARL Raoux et Cie s'explique par le fait qu'il était le seul titulaire au sein de l'entreprise d'un certificat de capacité professionnelle relatif au transport de personnes ; que, de même, les circonstances que l'autre co-gérant révoqué de ses fonctions n'a pas bénéficié d'une indemnité, que l'accord intervenu entre la SARL Raoux et Cie et M. A... n'a pas été formalisé par écrit ou que M. A... est redevenu le gérant de cette société au cours de l'année 2009 après avoir fait l'acquisition des parts sociales composant le capital de la société ne suffisent pas à établir que l'indemnité n'aurait pas été allouée en conséquence de la révocation du requérant de ses fonctions de gérant ; que, dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir que la somme de 170 000 euros a été imposée à tort en tant que rémunération de son activité salariée sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts ;

6. Considérant, toutefois, que le ministre doit être regardé comme demandant que, par voie de substitution de base légale, l'imposition contestée soit maintenue sur le fondement des dispositions du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; que l'administration peut, à tout moment de la procédure contentieuse y compris pour la première fois en appel, invoquer tout moyen nouveau propre à donner un fondement légal à une imposition contestée devant le juge de l'impôt, à la condition qu'elle ne prive pas le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 80 duodecies dans sa rédaction alors applicable : " 1. Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable (...) / Ne constituent pas une rémunération imposable : (...) / 3° La fraction des indemnités de licenciement versées en dehors du cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi (...) qui n'excède pas : a) Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de six fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement des indemnités ; (...) / 2. Constitue également une rémunération imposable toute indemnité versée, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions, aux mandataires sociaux, dirigeants et personnes visés à l'article 80 ter. Toutefois, en cas de cessation forcée des fonctions, notamment de révocation, seule la fraction des indemnités qui excède les montants définis aux 3 et 4 du 1 est imposable " ;

8. Considérant qu'il n'est pas contesté que la cessation des fonctions de gérant de M. A..., décidée par l'assemblée générale extraordinaire dans un contexte de conflit entre l'intéressé et l'associé majoritaire, a présenté un caractère forcé au sens de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;

9. Considérant que, pour déterminer le plafond d'exonération prévu par l'article 80 duodecies précité du code général des impôts, il n'y a pas lieu de tenir compte des rémunérations que M. A... percevait de la SARL Acos au titre de ses fonctions salariées de directeur général, qu'il a quittées à l'occasion d'un licenciement intervenu peu de temps avant sa révocation, dès lors que, comme il a été indiqué aux points 3 à 5, l'indemnité en litige a été perçue à l'occasion de la cessation de ses fonctions de gérant de la SARL Raoux et Cie et que le requérant n'apporte aucun élément permettant d'établir que cette indemnité aurait également eu pour objet de réparer le préjudice né de la rupture du contrat de travail le liant à la SARL Acos ; que, par ailleurs, les éléments produits par M. A... ne suffisent pas à démontrer que les salaires que la SARL Acos, dont il était directeur général salarié, lui a versés au cours de l'année 2007, qui précède l'année de sa révocation, le rémunéraient également pour ses fonctions de gérant de la SARL Raoux et Cie, alors même que ces deux sociétés auraient été liées par une convention d'animation ;

10. Considérant qu'en application du a) du 3° du 1. de l'article 80 duodecies du code général des impôts, à défaut de rémunérations versées par la SARL Raoux et Cie à M. A... au cours de l'année 2008, la fraction imposable de l'indemnité en litige correspond à 50 % de son montant et ne s'élève ainsi qu'à la somme de 85 000 euros ; qu'à hauteur de ce montant, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale présentée par le ministre, qui ne prive M. A... d'aucune garantie ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes lui a refusé la réduction de sa base d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2008 à concurrence de la somme de 85 000 euros et à demander la décharge des droits et pénalités correspondant à cette réduction de ses bases imposables ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu de M. A... est réduite de la somme de 85 000 euros au titre de l'année 2008.

Article 2 : M. A... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2008 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er et des pénalités correspondantes.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 2 octobre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2016, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2016.

N° 14MA04648 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA04648
Date de la décision : 17/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-07 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Sylvain OUILLON
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SCP MARCE ANDRIEU MAQUENNE CARAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-11-17;14ma04648 ?
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