La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2016 | FRANCE | N°15MA01680

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2016, 15MA01680


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... B..., M. K... D..., M. N... A..., M. O... M...et M. C... H...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Sète a recruté M. I... à compter du 1er septembre 2012, par contrat du 30 août 2012 ;

- d'annuler la décision en date du 7 mars 2013 par laquelle le maire de la commune de Sète a rejeté leur recours formé le 8 janvier 2013 contre cette décision et a refusé de reclasser M. I... sur un poste correspondant

à ses qualifications ou de le licencier ;

- d'enjoindre au maire de la commune de Sèt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... B..., M. K... D..., M. N... A..., M. O... M...et M. C... H...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Sète a recruté M. I... à compter du 1er septembre 2012, par contrat du 30 août 2012 ;

- d'annuler la décision en date du 7 mars 2013 par laquelle le maire de la commune de Sète a rejeté leur recours formé le 8 janvier 2013 contre cette décision et a refusé de reclasser M. I... sur un poste correspondant à ses qualifications ou de le licencier ;

- d'enjoindre au maire de la commune de Sète de reclasser M. I... ou à défaut de le licencier.

Par un jugement n° 1301821 du 20 février 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2015, M. B..., M. D..., M. A..., M. M... et M. H..., représentés par Me G..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 20 février 2015 ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Sète a recruté M. I... à compter du 1er septembre 2012, par contrat du 30 août 2012 ;

3°) d'annuler la décision en date du 7 mars 2013 par laquelle le maire de la commune de Sète a refusé de reclasser M. I... ou, à défaut, de le licencier ;

4°) d'enjoindre au maire de la commune de Sète de reclasser M. I... ou à défaut de le licencier ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Sète le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal n'a pas statué sur les conclusions tendant à l'annulation du contrat du 30 août 2012 ;

- leur demande de première instance n'est pas tardive dès lors que la décision de recruter M. I... n'a pas fait l'objet d'une publication ;

- MM. A...etM..., en leur qualité de conseillers municipaux, M. H..., en sa qualité de contribuable communal, et MM. B...etD..., en leur qualité d'enseignants au sein du centre de formation des apprentis (CFA), disposent d'un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de l'acte par lequel le maire de la commune de Sète a engagé M. I... ;

- le maire de la commune de Sète était tenu de régulariser la situation de M. I... ou, à défaut, de le licencier, au regard des irrégularités dont le contrat du 30 août 2012 est entaché ;

- le contrat de travail n'entre pas dans le cadre du dispositif du 1° de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la création de l'emploi de " directeur de projet " sur lequel M. I... a été recruté n'a pas donné lieu à une délibération du conseil municipal en violation de l'article 34 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- M. I... ne dispose pas du niveau exigé par le 1° de l'article R. 6233-23 du code du travail pour pouvoir prétendre à occuper les fonctions de directeur de CFA.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2015, la commune de Sète, représentée par la SCP d'avocats Scheuer Vernhet et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. H..., M. B... et M. D... ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de la décision implicite de rejet opposée à leur demande ;

- la décision de recruter M. I..., étant créatrice de droit, ne pouvait plus être retirée à la demande d'un tiers pour illégalité ;

- le recrutement de M. I... est intervenu pour faire face à un accroissement temporaire d'activité conformément au 1° de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la décision de recruter M. I... n'est pas privée de base légale dès lors que la délibération du conseil municipal en date du 16 mars 2000 a créé le poste de directeur du CFA ;

- M. I... dispose de toutes les qualités requises pour exercer, en qualité d'agent non titulaire et par intérim, les fonctions de directeur du CFA ;

- les éventuelles irrégularités dont le contrat de M. I... serait entaché n'auraient pas pour conséquence de contraindre la commune à le reclasser ou à le licencier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant M. B... et les autres requérants, et de Me J..., représentant la commune de Sète.

Une note en délibéré présentée pour M. B... et autres a été enregistrée le 30 septembre 2016.

1. Considérant que le maire de la commune de Sète a procédé au recrutement de M. I... en qualité de directeur de projet au centre de formation des apprentis, chargé de mission auprès du maire, pour une durée d'un an à compter du 1er septembre 2012, par contrat du 30 août 2012 ; que, par courrier du 8 janvier 2013, M. B..., M. D..., M. A..., M. M..., et M. H... ont demandé au maire de la commune de Sète, d'une part, de mettre fin au contrat de M. I... et, d'autre part, de pourvoir à sa cessation de fonctions en recrutant un autre agent ; que, par courrier du 7 mars 2013, le maire de cette collectivité a rejeté leur demande ; que, par jugement du 20 février 2015, dont les requérants relèvent appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation, d'une part, du contrat du 30 août 2012 par lequel le maire de la commune de Sète a recruté M. I... et, d'autre part, de la décision du 7 mars 2013 par laquelle le maire de la commune de Sète a refusé de reclasser M. I... ou à défaut de le licencier ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a statué, d'une part, sur la demande d'annulation de la décision du 7 mars 2013, par laquelle le maire de la commune de Sète a rejeté le recours du 8 janvier 2013 tendant à ce que cette autorité reclasse ou, à défaut, licencie M. I..., et, d'autre part, sur les conclusions tendant à l'annulation du contrat du 30 août 2012, en jugeant que les moyens soulevés à l'appui de ces demandes étaient inopérants dès lors que la décision de recrutement, signée le 30 août 2012, ne pouvait plus être retirée ou abrogée passé le délai de quatre mois après sa signature en vertu des règles générales applicables au retrait et à l'abrogation des actes administratifs ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait entaché son jugement d'une omission de statuer sur des conclusions doit être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

3. Considérant que sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'auteur d'une décision individuelle expresse créatrice de droits, tel l'acte d'engagement contractuel d'un agent non titulaire, ne peut légalement la rapporter, à la condition que cette décision soit elle-même illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la date à laquelle elle a été prise ; que ce principe ne fait toutefois pas obstacle à ce que, saisi dans le délai de recours contentieux, le juge prononce l'annulation du contrat de recrutement d'un agent non titulaire, alors même qu'il se serait écoulé un délai de plus de quatre mois depuis la date à laquelle la décision de recrutement a été prise, et à ce que l'administration tire les conséquences, le cas échéant, de l'annulation de cette décision ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement. La délibération précise le grade ou, le cas échéant, les grades correspondant à l'emploi créé. Elle indique, le cas échéant, si l'emploi peut également être pourvu par un agent contractuel sur le fondement de l'article 3-3. Dans ce cas, le motif invoqué, la nature des fonctions, les niveaux de recrutement et de rémunération de l'emploi créé sont précisés. Aucune création d'emploi ne peut intervenir si les crédits disponibles au chapitre budgétaire correspondant ne le permettent. " ; qu'aux termes de l'article 3-2 de la même loi : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et pour les besoins de continuité du service, les emplois permanents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la présente loi peuvent être occupés par des agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire " ; qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article 3 de cette loi, dans sa rédaction applicable à la date du16 mars 2000 : " Des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les mêmes cas et selon les mêmes conditions de durée que ceux applicables aux agents de l'Etat. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par délibération du 16 mars 2000, le conseil municipal de la commune de Sète a procédé, en application des dispositions du 3ème alinéa de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, à la création au centre de formation des apprentis, d'un emploi non titulaire permanent de directeur chargé de la direction administrative, pédagogique, éducative du centre et des animations pédagogiques ; qu'il résulte des termes du contrat de M. I... du 30 août 2012 que celui-ci a été recruté en qualité de directeur de projet au sein du centre de formation des apprentis, chargé de mission auprès du maire, pour assurer l'administration provisoire du centre dans l'attente de la nomination d'un directeur ; que ces fonctions d'administrateur provisoire impliquent les mêmes responsabilités, le même niveau hiérarchique et le même niveau de rémunération que l'emploi de directeur tel qu'il a été créé par la délibération du 16 mars 2000 ; que, dans ces conditions, M. I... doit être regardé comme ayant été recruté sur cet emploi permanent de directeur dans l'attente du recrutement d'un nouveau directeur, en application de l'article 3-2 précité de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; que si cette délibération fait mention de ce que l'engagement de contractuels sur cet emploi sera limité à une durée de trois ans à compter du 1er avril 2000, il ne résulte pas de l'examen de cet acte que les conseillers municipaux auraient entendu limiter à cette durée la création de l'emploi lui-même ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'emploi sur lequel a été recruté M. I... n'aurait pas fait l'objet d'une délibération du conseil municipal de Sète doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 1°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 est sans influence sur la légalité de la décision de recruter M. I..., puisque l'intéressé, ainsi qu'il a été dit au point 4, n'a pas été recruté sur le fondement de ces dispositions ;

7. Considérant, en troisième lieu, et, d'une part, que la circonstance que M. I... n'était pas titulaire d'un diplôme ou titre au moins équivalent à un diplôme de fin de premier cycle de l'enseignement supérieur général ou technologique, tel qu'exigé par les dispositions du 1° de l'article R. 6233-23 du code du travail, relatif à la qualification et aux diplômes requis pour exercer en tant que directeur de CFA, ne faisait pas, à elle seule, obstacle à son recrutement sur un poste d'agent contractuel chargé d'assurer l'administration provisoire du CFA dans l'attente de la nomination d'un directeur ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. I... dispose de compétences en matière de gestion d'un établissement " tourné vers le monde professionnel " et que le recteur de l'académie de Montpellier a certifié, dans un courrier adressé aux responsables syndicaux, que M. I... disposait de toutes les compétences pour exercer les fonctions d'administrateur provisoire et de directeur du centre ; que, dans ces conditions, les requérants n'établissent pas que le maire de Sète, en procédant à son recrutement, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des compétences de M. I... ;

8. Considérant que le contrat du 30 août 2012 n'est ainsi entaché d'aucune irrégularité de nature à entraîner son annulation ; que les conclusions à fin d'annulation de ce contrat ne peuvent, par suite, qu'être rejetées et, par voie de conséquence, celles tendant à l'annulation de la décision du 7 mars 2013 par laquelle le maire de la commune de Sète a refusé de reclasser M. I..., ou à défaut, de le licencier ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Sète à la demande de première instance, que les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... et autres, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions des requérants fondées sur les dispositions précitées du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Sète, qui n'est, dans la présente instance, ni partie perdante ni tenue aux dépens, la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Sète fondées sur ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Sète, présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... B..., M. K... D..., M. N... A..., M. O... M..., M. C... H..., à la commune de Sète et à M. F... I....

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2016, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Busidan, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2016.

''

''

''

''

2

N° 15MA01680


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01680
Date de la décision : 18/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP SCHEUER - VERNHET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-18;15ma01680 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award