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13/10/2016 | FRANCE | N°15MA00769

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2016, 15MA00769


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1302482 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015 et un mémoire enregistré le 17 juillet 2015, M. C..., représent

é par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 décembre 2014 du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1302482 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015 et un mémoire enregistré le 17 juillet 2015, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge demandée.

Il soutient que :

- l'irrégularité entachant la vérification de comptabilité de l'EURL Patrick C...du fait des atteintes portées par l'administration fiscale au secret professionnel entraîne l'illégalité de son imposition personnelle ;

- le principe d'indépendance des procédures doit être écarté ;

- les dépenses de prothèse dentaire que la société a accepté de prendre pour partie en charges constituent un supplément de rémunération relevant de l'article 62 du code général des impôts déductible de l'impôt sur les sociétés en raison de leur lien étroit avec sa profession d'avocat et ont été engagées pour la conservation de son revenu au sens de l'article 13 du code général des impôts ;

- il peut se prévaloir de la documentation administrative BOI-BNC-Base 40-10, n° 50 ;

- les avances sans intérêt qui lui ont été consenties par la société trouvent leur contrepartie dans la possibilité pour celle-ci d'exercer son activité du fait de son inscription personnelle à l'ordre des avocats.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 juin 2015, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ;

- le code pénal ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. C..., qui exerce la profession d'avocat dans le cadre de l'EURL Cabinet PatrickC..., qui a opté pour son imposition à l'impôt sur les sociétés, relève appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 à la suite d'un examen contradictoire d'ensemble de sa situation fiscale personnelle ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, que l'administration a taxé entre les mains de M. C... les sommes réintégrées dans le bénéfice de l'EURL Cabinet PatrickC..., qu'elle a regardées comme des revenus distribués sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; que, dès lors, les irrégularités susceptibles d'avoir entaché la vérification de comptabilité de cette société sont sans incidence sur les impositions de M. C... ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 226-13 du code pénal : " La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende " ; qu'aux termes de l'article 226-14 du même code : " L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret " et qu'aux termes de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : " En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention " officielle ", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel (...) " ;

4. Considérant qu'en vertu du second alinéa de l'article 1649 quater G du code général des impôts, les documents comptables tenus par les adhérents des associations agrées des professions libérales comportent " quelle que soit la profession exercée par l'adhérent, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires " ; qu'aux termes de l'article 99 du même code : " Les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposés d'après ce régime sont tenus d'avoir un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles. / Le livre-journal tenu par les contribuables non-adhérents d'une association de gestion agréée comporte, quelle que soit la profession exercée, l'identité déclarée par le client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires " et qu'aux termes de l'article L. 13-0-A du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts peuvent demander toutes informations relatives au montant, à la date et à la forme des versements afférents aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. Ils ne peuvent demander de renseignements sur la nature des prestations fournies par ces personnes " ;

5. Considérant, d'une part, que les dispositions des articles 99 et 1649 quater G du code général des impôts imposent aux membres des professions dépositaires d'un secret professionnel en vertu de l'article 226-13 du code pénal d'indiquer sur leurs documents comptables, outre le montant, la date et la forme du versement des honoraires, et l'identité du client ; qu'il résulte, d'autre part, des dispositions de l'article L. 13-0 A du livre des procédures fiscales, éclairées par les débats parlementaires à l'issue desquels elles ont été adoptées, que le législateur a entendu délimiter strictement le champ des informations que l'administration fiscale est susceptible de demander à ces professionnels ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'administration prenne connaissance, pendant les opérations de contrôle, de factures établies par un avocat pour des prestations destinées à des clients nommément désignés, dès lors que ces documents ne comportent aucune indication, même sommaire, sur la nature des prestations fournies à ces clients ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 16 septembre 2011 et de la réponse aux observations du contribuable du 25 octobre 2011 que, pour imposer la somme de 60 132 euros au titre de l'année 2008 et la somme de 38 891 euros au titre de l'année 2009 entre les mains de M. C... sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, l'administration s'est bornée à relever, à partir d'un courrier du 22 juin 2011 adressé par le requérant au service des impôts comportant toutes les indications chiffrées permettant de déterminer le montant des rectifications, que ce dernier avait admis avoir encaissé sur son compte bancaire personnel des sommes qui constituaient des recettes professionnelles ; qu'il ne résulte pas de ces constatations que l'administration aurait consulté des factures couvertes par le secret professionnel pour établir ce chef de rectification ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ;

En ce qui concerne les frais de prothèse dentaire :

8. Considérant qu'aux termes du 1. de l'article 13 du code général des impôts : " Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu " et qu'aux termes de l'article 62 du code général des impôts : " Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211, même si les résultats de l'exercice social sont déficitaires, lorsqu'ils sont alloués : aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) " ;

9. Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré dans les bases imposables de l'impôt sur les sociétés de l'EURL Cabinet Patrick C...de l'année 2008, au motif qu'il s'agissait d'une dépense étrangère à l'exploitation de la société, une somme de 9 000 euros comptabilisée en compte 625 " frais de réception " correspondant en fait à la fraction d'une facture d'un montant de 29 330 euros relative à des frais de chirurgie dentaire que M. C... indique avoir été contraint d'exposer pour l'exercice de sa profession ; que cette somme, imposée entre les mains de M. C... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, n'a pas le caractère d'un traitement, d'un remboursement forfaitaire de frais ou d'une rémunération au sens de l'article 62 du code général des impôts ; que M. C..., qui admet au surplus que la somme de 9 000 euros n'a pas été ajoutée à sa rémunération, n'est fondé à soutenir ni que ces dépenses de prothèse dentaire constitueraient un élément de sa rémunération en raison de son lien étroit avec ses fonctions d'avocat, imposable sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts et simultanément déductible des résultats de la société ni qu'elles auraient été engagées pour la conservation de son revenu au sens de l'article 13 du code général des impôts ;

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente(...) " ;

11. Considérant que la documentation administrative référencée " BOI-BNC-Base 40-10 n° 50 " ne fait référence qu'aux dépenses d'appareillage et de prothèse exposées par les titulaires de traitements et salaires, de bénéfices non commerciaux, de bénéfices industriels et commerciaux ou de bénéfices agricoles ; qu'en l'espèce, M. C... n'est pas titulaire de revenus relevant de ces catégories et, par suite, n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de cette interprétation administrative ;

En ce qui concerne les avances sans intérêts :

12. Considérant que l'administration a relevé au cours de la vérification de comptabilité de l'EURL Cabinet Patrick C...que le compte courant d'associé de M. C... présentait un solde débiteur de 138 049 euros au 31 décembre 2008 et de 18 049 euros au 31 décembre 2009 et qu'aucun intérêt n'avait été réclamé par la société ; que l'administration a réintégré dans les résultats de la société les intérêts qu'elle avait renoncé à percevoir et les a imposés entre les mains de M. C... pour un montant de 5 838 euros en 2008 et de 3 122 euros en 2009 ;

13. Considérant que la circonstance que M. C..., en sa qualité d'avocat inscrit au barreau d'Aix-en-Provence, permet à l'EURL Cabinet Patrick C...d'exercer son activité ne constitue pas une contrepartie suffisante pour justifier les avances sans intérêts constatées par l'administration alors qu'il reçoit déjà une rémunération en tant que mandataire social ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du caractère anormal de ces avances sans intérêts consenties par l'EURL Cabinet Patrick C...à M. C..., dont le montant a été imposé à bon droit chez ce dernier sur le fondement du 1° du I de l'article 109 du code général des impôts ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur ;

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.

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N° 15MA00769


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00769
Date de la décision : 13/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Revenus à la disposition.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : FERRANDI-ACQUAVIVA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-13;15ma00769 ?
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