La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2016 | FRANCE | N°15MA04236

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 05 juillet 2016, 15MA04236


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles son ex-époux et elle-même ont été assujettis, antérieurement à leur divorce, au titre des années 2000 à 2002.

Par un jugement n° 0700246 du 30 mars 2010, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10MA02093 du 14 juin 2013, la cour administrative d'appel de Marse

ille a rejeté la requête de Mme C... tendant à l'annulation de ce jugement.

Par une décisio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles son ex-époux et elle-même ont été assujettis, antérieurement à leur divorce, au titre des années 2000 à 2002.

Par un jugement n° 0700246 du 30 mars 2010, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10MA02093 du 14 juin 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête de Mme C... tendant à l'annulation de ce jugement.

Par une décision n° 371193 du 14 octobre 2015, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de Mme C..., annulé l'arrêt susmentionné et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2010 et des mémoires enregistrés les 18 février 2013, 3 mai 2013, 26 avril 2016 et 2 juin 2016, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement rendu par le tribunal administratif de Marseille le 30 mars 2010 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles son ex-époux et elle-même ont été assujettis au titre des années 2000 à 2002 ;

3°) de prononcer la décharge de son obligation solidaire pour le paiement de ces cotisations supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- la motivation des redressements et rectifications relatifs aux revenus distribués est incomplète, en méconnaissance des articles L. 57 et L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

- en refusant de lui communiquer la notification de redressement et la proposition de rectification adressées à la SARL Terracotta, l'administration a méconnu les droits de la défense et son devoir de loyauté ;

- elle n'a pas été mise en mesure de demander la teneur et l'origine des renseignements recueillis auprès des services des douanes, en méconnaissance des articles L. 76 B et L. 81 du livre des procédures fiscales ;

- son ex-époux et elle-même étaient résidents fiscaux indonésiens au cours des années considérées ;

- en application de l'article 22-1 de la convention fiscale franco-indonésienne, les revenus distribués par la SARL Terracotta ne sont pas imposables en France ;

- l'administration n'apporte ni la preuve de l'existence de revenus distribués, ni la preuve de leur appréhension par son ex-époux ;

- le service vérificateur n'a pas mis en oeuvre la procédure de désignation des bénéficiaires prévue par l'article 117 du code général des impôts ;

- l'administration ne démontre pas la mauvaise foi de son ex-époux ;

- elle doit être déchargée de son obligation solidaire de paiement des impositions et pénalités en litige sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts.

Par des mémoires enregistrés le 30 mars 2011, le 18 janvier 2016 et le 13 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la demande de décharge de responsabilité solidaire présentée directement devant la Cour est irrecevable ;

- le moyen tiré du non-respect des garanties attachées à l'exercice du droit de communication est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la convention fiscale franco-indonésienne du 14 septembre 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour MmeC....

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Terracotta, dont M. B... était gérant et associé, des redressements ont été notifiés, au titre des années 2000 à 2002, à M. B... et à son épouse à raison notamment de revenus distribués par la société ; que Mme C..., qui a divorcé de M. B... en 2005, a contesté les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de son foyer fiscal au titre de ces redressements ; qu'elle relève appel du jugement du 30 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la convention franco-indonésienne susvisée : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue, mais n'inclut pas les personnes qui ne sont imposables dans cet Etat que pour le revenu qu'elles tirent de sources situées dans ledit Etat ou pour la fortune située dans cet Etat. / 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, sa situation est réglée de la manière suivante : / a. Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté que Mme C... avait son domicile fiscal en France au cours des années considérées au regard de l'activité professionnelle exercée par son ex-époux, en qualité de gérant de la SARL Terracotta ; que, dans ces conditions, M. et Mme B...étaient en principe, pour les trois années en cause, passibles de l'impôt sur le revenu en France, à moins qu'ils n'établissent leur droit à se prévaloir de la qualité de résidents indonésiens au sens des stipulations précitées de la convention franco-indonésienne ;

5. Considérant, à cet égard, que si M. et Mme B...ont déposé en France des déclarations de revenus au titre des années 2000 à 2002 et n'ont pas fait état précédemment d'une possible domiciliation fiscale en Indonésie, ces circonstances ne font pas obstacle à ce qu'ils puissent également être regardés comme résidents d'Indonésie, où ils ont d'ailleurs payé l'impôt sur le revenu au titre des mêmes années ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la famille de Mme C...séjournait, au cours de la période en cause, une partie de l'année en Indonésie et une partie de l'année en France, et qu'elle disposait d'une résidence dans chacun de ces deux pays ; que la requérante disposait ainsi d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants ; qu'il convient dès lors de rechercher, en application du a) du 2 de l'article 4 de la convention franco-indonésienne, l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques étaient les plus étroits ; qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 2000 à 2002, les époux B...et leur fille ont été présents la majeure partie du temps en Indonésie, où cette dernière était scolarisée ; que si, au cours des années en litige, M. B... exerçait en France une activité de dirigeant social, il résulte de l'instruction, et notamment des déclarations d'enregistrement des époux B...auprès de l'administration fiscale indonésienne, que les intéressés étaient assujettis à l'impôt sur le revenu en Indonésie, payaient à ce titre des sommes conséquentes et y exerçaient une activité dans le secteur du textile ; qu'enfin, les époux B...ont créé au début de l'année 2002 une société de droit indonésien dont ils détenaient le capital à hauteur de 869 400 000 roupies, soit 90 000 dollars américains ; qu'ainsi, doivent être regardés comme prépondérants les liens personnels et économiques entretenus par les époux B...avec l'Indonésie, où se situait de 2000 à 2002 le centre de leurs intérêts vitaux au sens de la convention franco-indonésienne ; que, par suite, M. et Mme B...doivent être regardés comme ayant eu en Indonésie leur résidence fiscale au cours de ces années ; que, dès lors, sont seuls imposables en France les revenus de M. et Mme B...dont l'imposition n'est pas réservée au pays de la résidence fiscale par les stipulations de la convention franco-indonésienne ;

7. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 22 de la convention franco-indonésienne susvisée : " Les éléments du revenu d'un résident d'un Etat contractant, d'où qu'ils proviennent, dont il n'est pas traité dans les articles précédents de la présente convention, ne sont imposables que dans cet Etat " ; que si, selon le 2 du même article : " Les dispositions du paragraphe 1 ne s'appliquent pas lorsque le bénéficiaire du revenu, résident d'un Etat contractant, exerce dans l'autre Etat contractant (...) une activité industrielle ou commerciale par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé " et si la convention renvoie alors à son article 7, dont le 1 stipule que : " Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé ", ces stipulations ne sont pas applicables à des revenus ayant le caractère de distributions de bénéfices réputées opérées par une société étrangère, et dont les bénéficiaires présumés sont des associés non domiciliés en France ; que ni l'article 10, qui ne concerne que les dividendes, ni aucune autre clause de la convention ne traite des revenus réputés distribués, de la nature de ceux que vise l'article 109 du code général des impôts ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que les revenus que M. B... est réputé avoir perçus en vertu de ce dernier article devraient, en application de l'article 22 de la convention franco-indonésienne, être imposés en France ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles son ex-époux et elle-même ont été assujettis au titre des années 2000 à 2002 à raison de revenus distribués par la SARL Terracotta ;

Sur la demande de décharge de l'obligation solidaire de paiement :

9. Considérant que Mme C...n'a demandé à être déchargée de son obligation solidaire de paiement des impositions en litige ni dans sa réclamation préalable, ni dans sa requête de première instance ; que, dès lors, les conclusions susvisées, présentées pour la première fois en appel, sont irrecevables et ne peuvent par suite qu'être rejetées ;

Sur les conclusions relatives aux dépens :

10. Considérant que la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens ; que, par suite, les conclusions présentées par Mme C... sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Mme C...est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000 à 2002 à raison des revenus réputés distribués, ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 30 mars 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- M. Martin, président-assesseur,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.

''

''

''

''

3

N° 15MA04236


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04236
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Lieu d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : MAZINGUE ET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-07-05;15ma04236 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award