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23/05/2016 | FRANCE | N°15MA00515

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 23 mai 2016, 15MA00515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays renvoi.

Par un jugement n° 1404196 du 8 janvier 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés l

e 9 février 2015 et le 10 mars 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays renvoi.

Par un jugement n° 1404196 du 8 janvier 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 9 février 2015 et le 10 mars 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 8 janvier 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 24 septembre 2014 ;

3°) " de faire droit aux demandes " qu'il a présentées " en lui délivrant un titre de séjour " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement et l'arrêté attaqué ne tiennent pas compte de sa situation véritable ;

- ils sont entachés d'erreurs manifestes d'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur sa situation familiale et médicale ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tient notamment des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2016, le préfet des Alpes-Maritimes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gautron.

1. Considérant que M. C..., né le 13 juillet 1986 à Souk Ahras (Algérie) et de nationalité algérienne, est entré en dernier lieu dans l'espace Schengen par l'Espagne, à Alicante le 23 mai 2012 au bénéfice d'un visa de type C délivré par les autorités consulaires espagnoles à Alger, valide du 8 mai 2012 au 6 juin 2012 ; qu'il affirme avoir immédiatement rejoint la France, au cours de la même année ; qu'il a présenté, le 26 mars 2014, une demande de titre de séjour, rejetée par un arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 24 septembre 2014, par lequel celui-ci a également ordonné son éloignement ; qu'il a formé à l'encontre de cet arrêté, le 2 octobre 2014, un recours gracieux et un recours hiérarchique tous deux implicitement rejetés ; qu'il relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 8 janvier 2015, par lequel celui-ci a également rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation dudit arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé, pris pour l'application de l'article R. 313-22 : " Au vu des informations médicales qui lui sont communiquées par l'intéressé ou, à la demande de celui-ci, par tout autre médecin, et au vu de tout examen qu'il jugera utile de prescrire, le médecin agréé ou le médecin praticien hospitalier mentionné à l'article 1er établit un rapport précisant le diagnostic des pathologies en cours, le traitement suivi et sa durée prévisible ainsi que les perspectives d'évolution. Il transmet ce rapport médical, sous pli confidentiel, au médecin de l'agence régionale de santé dont relève la résidence de l'intéressé, désigné à cet effet par le directeur général de cette agence. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 du même arrêté : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant :- si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ;/ - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ;

3. Considérant, d'une part, que M. C... doit être regardé comme soutenant que l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé délivré à la demande du préfet des Alpes-Maritimes le 26 mars 2014 serait insuffisamment motivé, pour ne pas préciser quel traitement approprié à son état de santé serait effectivement disponible dans son pays d'origine ; que toutefois, cet avis mentionne que l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le médecin de l'Agence régionale de santé a ainsi régulièrement motivé son avis au regard des dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, alors que le secret médical interdisait de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine ; que le moyen doit être écarté ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant que M. C... soutient que le seul traitement approprié à son état de santé, s'il est disponible dans son pays d'origine, ne lui serait pas accessible dans ce pays en raison de son coût trop élevé ; que toutefois, il ne produit aucun justificatif de ce coût, ni du reste de l'impossibilité pour lui d'avoir recours à l'ensemble des médicaments alternatifs disponibles, alors qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis médical émis le 17 février 2014 produit par lui, que M. C... ne paraît présenter une intolérance qu'à l'un des médicaments prescrits pour le traitement de sa pathologie ; que dans ces conditions, le moyen doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ;

7. Considérant que M. C... soutient que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tient notamment de ces stipulations ; que toutefois, il n'établit pas la date de son arrivée en France, laquelle ne saurait être antérieure au 23 mai 2012, de sorte que M. C... aurait été présent, au mieux, depuis seulement deux ans et quatre mois sur le territoire national à la date de l'arrêté attaqué, tandis qu'il avait passé, selon ses dires, presque vingt-six ans dans son pays d'origine à la même date ; que s'il invoque la présence régulière en France de sa famille nucléaire, il ressort des pièces du dossier que seuls sa mère et quatre de ses frères et soeurs séjournent sur le territoire national, alors que la fratrie de l'intéressé comprend quatre autres membres ; qu'en outre, celui-ci n'établit pas, au vu des seules attestations produites, avoir rompu tout lien avec son père, à la suite du divorce de ses parents au cours de l'année 1991 ; que dans ces conditions, il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, ni l'ancienneté, ni même la réalité de sa relation conjugale ne sont démontrées à la date dudit arrêté, M. C... ne versant aux débats que des justificatifs postérieurs à ce dernier ; qu'enfin, ses qualifications et historique professionnels, dans son pays d'origine, ne sont pas de nature à établir la fixation du centre de sa vie privée et familiale sur le territoire national, laquelle ne l'est pas davantage au regard de ce qui précède ; que par suite, le moyen doit être écarté ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'au regard de ce qui a été dit au point précédent ainsi qu'au point 5 et en l'absence de tout élément supplémentaire dont ferait état M. C..., le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant entachant l'arrêté attaqué, doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées à cette fin doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la somme réclamée sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2016 où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- M. Gautron, conseiller,

Lu en audience publique, le 23 mai 2016.

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N° 15MA00515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00515
Date de la décision : 23/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : PIATEK

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-23;15ma00515 ?
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