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10/05/2016 | FRANCE | N°14MA04043

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 10 mai 2016, 14MA04043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler les décisions du 13 novembre 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a refusé d'inscrire les établissements " société mécanique générale (SMG) et " société auxiliaire mécanique " (SAM) sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amia

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler les décisions du 13 novembre 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a refusé d'inscrire les établissements " société mécanique générale (SMG) et " société auxiliaire mécanique " (SAM) sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et, d'autre part, de lui enjoindre d'inscrire ces établissements sur cette liste.

Par un jugement n° 1300150-1300152 du 23 juillet 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 septembre 2014, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 23 juillet 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du 13 novembre 2012 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

3°) d'enjoindre au ministre du travail d'inscrire les établissements SMG et SAM sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a intérêt à agir contre les décisions critiquées ;

- il n'a pas été mis à même de présenter ses observations écrites avant que n'interviennent ces décisions, en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- en estimant que les deux sociétés SMG et SAM ne constituaient pas un établissement unique avec la société STS, le ministre du travail a commis une erreur de fait et une erreur de droit ;

- les sociétés SMG et SAM étant membres d'un groupe dont la société holding a été admise sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, elles doivent nécessairement être inscrites à ce titre sur cette même liste ;

- les deux sociétés SMG et SAM satisfont aux conditions de fond pour être inscrites sur cette liste au regard notamment de l'activité qu'il y a exercée lorsqu'il y était employé, ainsi que de la situation environnementale ;

- c'est au prix d'une erreur de qualification que l'administration a regardé ces sociétés comme des sous-traitantes de la société STS ;

- les décisions litigieuses méconnaissent le principe d'égalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2014, le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. C... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public.

1. Considérant que M. C... a demandé l'inscription des établissements " société mécanique générale (SMG) et " société auxiliaire mécanique " (SAM) sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, prévu par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 ; que le ministre chargé du travail a refusé de faire droit à ces demandes par deux décisions du 13 novembre 2012 ; que M. C... relève appel du jugement du 23 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, dans sa rédaction applicable à la date des décisions litigieuses : " Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ; (...) / 3° S'agissant des salariés de la construction et de la réparation navales, avoir exercé un métier figurant sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget. (...) " ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 que peuvent seuls être légalement inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements ; qu'il en va ainsi alors même que ces opérations ne constitueraient pas l'activité principale des établissements en question ;

3. Considérant, en premier lieu, que les décisions par lesquelles le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire les établissements SMG et SAM sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, visée à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée, n'ont pas le caractère de décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi du 11 juillet 1979 au sens des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. C... n'aurait pas été mis à même de présenter ses observations écrites avant que n'interviennent ces décisions, ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que les sociétés SMG et SAM exerçaient, avant leur liquidation judiciaire, une activité de travaux mécaniques, de transformation de métaux, de fabrication et d'installation de machines et d'équipement ; que, toutefois, l'enquête à laquelle a fait procéder l'administration n'a permis d'établir, ni qu'elles auraient exercé leur activité dans le secteur de la construction ou de la réparation navale, ni que l'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage ou de calorifugeage à l'amiante aurait représenté une part significative de leur activité ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ces deux sociétés auraient réalisé des travaux de sous-traitance pour le compte d'établissements de construction ou de réparation navale et que leurs salariés auraient effectué, à cette occasion, des travaux entraînant une manipulation de matériaux de calorifugeage ou produits à base d'amiante qui auraient représenté, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y étaient affectés, une part significative de leur activité ; que, par suite, le ministre chargé du travail a fait une exacte application des dispositions précitées en refusant de procéder, pour ces motifs, à leur inscription sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 introduisent une distinction fondée sur une différence de situation entre les salariés, selon qu'ils sont ou non susceptibles d'avoir été exposés à la poussière d'amiante dans l'établissement dans lequel ils travaillent, et entre les entreprises selon qu'elles emploient ou non ces salariés ; qu'il s'ensuit que la condition tenant à la " part significative " de l'activité de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, ou de flocage et de calorifugeage à l'amiante, doit être appréciée distinctement par établissement et par entreprise ;

6. Considérant que les sociétés SMG et SAM étaient dotées d'une personnalité juridique distincte de celle de la société " Thermodynamique service " (STS), qui a été inscrite par arrêté ministériel du 12 août 2002 sur la liste susmentionnée des établissements éligibles ; qu'à supposer que ces deux sociétés aient eu le même gérant que la société STS, elles jouissaient néanmoins d'une autonomie tant en ce qui concerne leur gestion que l'organisation de leur activité, laquelle était d'ailleurs différente de celle exercée par la société STS qui avait pour objet social la réalisation d'études dans les domaines de la thermodynamique et de la résistance des matériaux ; qu'elles constituaient ainsi des entreprises distinctes de la société STS pour l'application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ; qu'il appartenait, dès lors, à l'administration d'apprécier pour chacune de ces entreprises, en fonction des critères rappelés au point 2, si elles employaient ou non des salariés travaillant dans un établissement éligible au dispositif dont M. C... revendique l'application ; que si les sociétés SMG et SAM avaient leur siège à la même adresse que la société STS, utilisaient le même numéro de téléphone que cette société et appartenaient à la même unité économique et sociale, ces circonstances sont, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation portée par l'administration sur la réalité de leur activité au regard des critères susmentionnés ; que s'il est soutenu que les sociétés SMG et SAM ont exercé leur activité dans les mêmes locaux que la société STS, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à établir que ces deux sociétés auraient exercé leur activité dans le secteur de la construction ou de la réparation navale ou que l'activité de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, ou de flocage et de calorifugeage à l'amiante, aurait représenté une " part significative " de leur activité ; que, dès lors, le ministre chargé du travail a pu estimer, sans commettre d'erreur de fait ni d'erreur de droit, que la circonstance invoquée tenant à l'inscription de la société STS sur la liste des établissements éligibles ne suffisait pas à établir que les sociétés SMG et SAM réunissaient les conditions pour elles-mêmes y être inscrites ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il n'est nullement établi que l'activité d'usinage de joints contenant de l'amiante, qui aurait été celle exercée par le requérant, aurait constitué une part significative de l'activité des établissements dans lesquels il a travaillé ; que, par suite, cette circonstance n'était, en tout état de cause, pas au nombre de celles justifiant leur inscription sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; que si la couverture des locaux professionnels où travaillait M. C... était constituée de tôles de fibro-ciment contenant de l'amiante, l'exposition environnementale dont se prévaut l'intéressé n'entre pas dans davantage dans le champ du dispositif dont il revendique l'application ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que si le ministre chargé du travail a relevé, à tort, dans les décisions litigieuses que les sociétés SMG et SAM intervenaient comme sous-traitantes de la société STS, alors qu'en réalité elles appartenaient seulement au même groupe, cette circonstance est sans incidence sur leur légalité, dès lors qu'elle ne constitue pas le motif du refus de l'inscription litigieuse ;

9. Considérant, en dernier lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité administrative règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la société STS, d'une part, et les sociétés SMG et SAM, d'autre part, ne sont pas placées dans la même situation, dès lors que dans le cas de ces deux sociétés il n'est pas établi, ni que l'activité de construction ou de réparation navale représenterait une part significative de leur activité, ni que la fabrication de matériaux contenant de l'amiante, ou de flocage et de calorifugeage à l'amiante, présenterait elle-même un caractère significatif ; que la différence de traitement qui en résulte pour leurs salariés est en rapport avec l'objet de loi qui est de faciliter financièrement, par l'octroi d'une allocation spécifique, le choix d'un départ anticipé de la part de salariés travaillant ou ayant travaillé dans de tels établissements ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions contestées méconnaîtraient le principe d'égalité doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions présentées par M. C... aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 mai 2016.

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N° 14MA04043

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA04043
Date de la décision : 10/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Santé publique - Lutte contre les fléaux sociaux.

Travail et emploi - Conditions de travail.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : FALCUCCI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-10;14ma04043 ?
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