Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une ordonnance n° 1600307 en date du 2 mars 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a, sur déféré du préfet du Var, ordonné la suspension de l'exécution de la délibération du 25 novembre 2015 par laquelle le conseil d'administration du centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens a autorisé la création d'un service public industriel et commercial de la résidence Jas de Callian et d'une régie dotée de la seule autonomie financière pour en assurer la gestion.
Procédure devant la cour administrative d'appel de Marseille :
Par une requête, enregistrée le 4 mars 2016, sous le n° 16MA00879, le centre communal d'action sociale de la commune de Roquebrune-sur-Argens, dont le siège est au Boulevard de la Liberté à Roquebrune-sur-Argens (83520), représenté par le cabinet MLD avocats, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 2 mars 2016 ;
2°) de rejeter le déféré du préfet du Var ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance est dépourvue de toute motivation méconnaissant ainsi les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ; qu'en particulier, le juge des référés n'a pas répondu sur le caractère inopérant du moyen unique du déféré ;
- l'ordonnance est entachée d'une erreur de droit dès lors que le moyen retenu considère à tort que la détermination de la nature d'un service public local dépend du régime comptable applicable à l'activité en cause et elle méconnaît, par suite, le principe de libre gestion des services publics locaux ;
- au fond, le rejet s'impose en raison du caractère inopérant du seul moyen du préfet ;
- en tout état de cause, l'article L.123-8 du code de l'action sociale et des familles a entendu réserver les règles de comptabilité spécifiques pour les établissements et services sociaux et médicaux sociaux en renvoyant à l'instruction M. 22 et ce indépendamment de la nature industrielle et commerciale ou administrative du service ; par ailleurs, l'application de la nomenclature M. 22 ne fait pas obstacle à l'application du principe de l'équilibre financier prévu aux articles L.2224-1 et L.2224-2 du code général des collectivités territoriales, ni à la règle de l'individualisation des opérations relatives aux services publics industriels et commerciaux dans un budget annexe, spécifique et autonome ;
- enfin le préfet ne peut valablement affirmer que le foyer logement, ne pouvant pas appliquer la nomenclature M4 obligatoire pour les services publics industriels et commerciaux, le centre communal ne pouvait légalement le soumettre audit régime.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2016, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le foyer logement relève de la catégorie des établissements et services sociaux et médico-sociaux et constitue un service public administratif ;
- la délibération litigieuse implique implicitement d'appliquer une nomenclature générale M. 4 réservée aux services publics industriels et commerciaux, ce qui n'est pas possible pour un service public administratif ;
Par un mémoire en réplique, enregistré le 8 avril 2016, le centre communal d'action sociale de la commune de Roquebrune-sur-Argens conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Vu :
- la délibération du 25 novembre 2015 par laquelle le conseil d'administration du centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens a autorisé la création d'un service public industriel et commercial de la résidence Jas de Callian et d'une régie dotée de la seule autonomie financière pour en assurer la gestion.
- les autres pièces du dossier.
Vu la décision du président de la cour administrative d'appel de Marseille donnant délégation à M. Bocquet, président de la 5ème chambre, pour juger les référés.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code l'action sociale et des familles ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- l'arrêté du 11 décembre 2014 relatif au plan comptable M. 22 applicable aux établissements et services publics sociaux et médico-sociaux ;
- l'instruction budgétaire et comptable M. 4 annexée à l'arrêté du 17 décembre 2007 relatif à l'instruction budgétaire et comptable M. 4 applicable aux services publics locaux industriels et commerciaux modifié notamment par l'arrêté du 17 décembre 2014.
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 4 mai 2016 :
- le rapport de M. Bocquet, juge des référés,
- les observations de MeA..., pour le centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens, qui maintient l'intégralité de ses conclusions et de ses moyens.
1. Considérant que le centre communal d'action sociale de la commune de Roquebrune-sur-Argens relève appel de l'ordonnance n° 1600307 en date du 2 mars 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a, sur déféré du préfet du Var, ordonné la suspension de l'exécution de la délibération du 25 novembre 2015 par laquelle le conseil d'administration du centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens a autorisé la création d'un service public industriel et commercial de la résidence Jas de Callian et d'une régie dotée de la seule autonomie financière pour en assurer la gestion ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : / "Art. L. 2131-6, alinéa 3. - Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois." (...) " ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
3. Considérant que, pour ordonner la suspension de l'exécution de la délibération litigieuse, le juge des référés, après avoir visé et analysé le moyen invoqué par le préfet du Var dans son déféré, s'est fondé sur ledit moyen tiré de ce que le régime juridique et comptable applicable aux établissements et services sociaux et médico-sociaux est incompatible avec une gestion sous forme de service public industriel et commercial ; que le premier juge a ainsi désigné avec précision le moyen qui lui paraissait implicitement mais nécessairement opérant et propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération litigieuse ; qu'il a, en conséquence, suffisamment motivé son ordonnance ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de l'ordonnance attaquée, en raison de l'insuffisance de sa motivation, manque en fait et ne peut qu'être écarté ;
Sur le bien-fondé de la suspension :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L.312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I. - Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale. " ; qu'aux termes de l'article L.315-18 du même code : " Le régime administratif, budgétaire, financier et comptable des établissements publics sociaux et médico-sociaux nationaux ainsi que les modalités du contrôle de l'Etat sur ces établissements sont déterminés par décret en Conseil d'Etat compte tenu de la nature particulière de leur mission. " ;
5. Considérant que l'article 1er du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique dispose : " Les dispositions du titre Ier du présent décret sont applicables aux administrations publiques au sens du règlement (CE) du 25 juin 1996 visé ci-dessus, mentionnées aux 1° à 5° suivants ainsi qu'aux personnes morales mentionnées au 6° : 1° L'Etat ; 2° Les collectivités territoriales, leurs établissements publics (...) " ; que l'article 54 du même décret précise : " Les règles comptables propres à chaque catégorie de personnes morales mentionnées à l'article 1er sont fixées par arrêté du ministre chargé du budget. " ;
6. Considérant que l'article 1 de l'arrêté du 11 décembre 2014 relatif au plan comptable M. 22 applicable aux établissements et services publics sociaux et médico-sociaux précise que : " Les comptes obligatoirement ouverts dans le budget et la comptabilité des établissements publics sociaux et médico-sociaux communaux, intercommunaux, départementaux et inter-départementaux sont ceux prévus dans le plan comptable joint en annexe. " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le foyer-logement " Jas de Caillan ", structure d'hébergement pour les personnes âgées, habilitée à l'aide sociale par un arrêté du préfet du Var du 1er juin 1978, appartient à la catégorie des établissements et services sociaux et médico-sociaux ; qu'ainsi et en application de la combinaison des dispositions précitées, l'établissement est tenu d'appliquer le plan comptable M. 22 ; qu'en l'espèce, en autorisant la création d'un service public industriel et commercial de la résidence " Jas de Callian " et d'une régie dotée de la seule autonomie financière pour en assurer la gestion, la délibération du 25 novembre 2015 implique nécessairement, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 1 de l'arrêté du 11 décembre 2014 relatif au plan comptable M. 22 applicable aux établissements et services publics sociaux et médico-sociaux, une application du plan comptable M. 4 prévu par l'arrêté modifié du 17 décembre 2007 et réservé aux seuls services publics industriels et commerciaux ; que par suite, en l'état de l'instruction, c'est à bon droit et sans atteinte à la libre gestion des services publics locaux que le premier juge a considéré qu'était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération déférée le moyen tiré de ce que le régime juridique et comptable applicable aux établissements et services sociaux et médico-sociaux est incompatible avec une gestion sous forme de service public industriel et commercial ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CCAS de Roquebrune-sur-Argens n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a suspendu la délibération en litige ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;
ORDONNE :
Article 1er : La requête du centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au centre communal d'action sociale de Roquebrune-sur-Argens et au ministre de l'intérieur.
Copie en adressée au préfet du Var.
Fait à Marseille, le 9 mai 2016.
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N° 16MA00879