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21/04/2016 | FRANCE | N°14MA01558

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 21 avril 2016, 14MA01558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J... et autres ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le permis de construire tacitement accordé par le maire de Lambesc à la SCI Grenache.

Par un jugement n° 1205877 du 30 janvier 2014, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire tacite né le 12 décembre 2011 du silence gardé par le maire de la commune de Lambesc sur la demande de la société pétitionnaire.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 avril

2014, la SCI Grenache, représentée par son gérant en exercice, par Me H..., demande à la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J... et autres ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le permis de construire tacitement accordé par le maire de Lambesc à la SCI Grenache.

Par un jugement n° 1205877 du 30 janvier 2014, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire tacite né le 12 décembre 2011 du silence gardé par le maire de la commune de Lambesc sur la demande de la société pétitionnaire.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 avril 2014, la SCI Grenache, représentée par son gérant en exercice, par Me H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 30 janvier 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme J... et autres présentée devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lambesc une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il ne vise pas le moyen de légalité externe soulevé sous le titre " la date de cristallisation ", par les demandeurs dans la requête introductive d'instance ;

- la requête de première instance est tardive ;

- par l'effet de l'annulation par le Conseil d'Etat de l'ordonnance du 11 avril 2012 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille qui avait suspendu l'exécution de l'arrêté du maire de Lambesc du 20 janvier 2012 portant sursis à statuer sur la demande de permis de construire, le permis de construire tacite a disparu de l'ordonnancement juridique, de sorte que la requête de première instance était dépourvue d'objet ;

- en application de l'article R. 442-2 du code de l'urbanisme et en l'absence de toute vente ou location antérieure, le projet de construction querellé qui porte sur un ensemble de deux bâtiments, n'est pas constitutif d'un lotissement ; la demande de permis de construire n'avait donc pas à être précédée d'une autorisation à ce titre ;

- le projet en litige ne méconnaît pas les dispositions de l'article NB 4 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Lambesc dès lors que ces dispositions qui renvoient à une annexe n'ont qu'une valeur informative et imposent des formalités autres que celles prévues par le code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2015, M. et Mme J... et autres, représentés par la SCP Sebag-Avocats Associés, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la SCI Grenache à leur verser la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la SCI Grenache devra justifier que son dirigeant a statutairement qualité pour agir dans le cadre de l'appel ;

- les moyens soulevés par la SCI Grenache ne sont pas fondés ;

- les autres moyens invoqués en première instance non retenus par le tribunal doivent, le cas échéant, être également accueillis comme de nature à emporter l'annulation du permis de construire tacite en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Féménia, première conseillère,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me Q...représentant la SCI Grenache et de Me D..., représentant M. N...et Mme A...J..., M. F...et Mme M...K..., Mme R...L..., M. T...B..., M. E...C..., M. S...O..., Mme I... P...et M. G...U....

1. Considérant que la SCI Grenache a présenté le 12 octobre 2011 une demande de permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle de deux logements sur un terrain appartenant à la SCI Valmousse, cadastré CT 171, situé à Lambesc et classé en zone NB par le plan d'occupation des sols ; que, par un arrêté du 20 janvier 2012, le maire de la commune a décidé de surseoir à statuer sur cette demande de permis de construire ; que le jugement n° 1201179 du 10 octobre 2013 du tribunal administratif de Marseille annulant cet arrêté a été confirmé par un arrêt de la cour n° 13MA04778 en date du 5 janvier 2016 ; que cette annulation a fait revivre le permis de construire né tacitement en vertu de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme, le 12 décembre 2011, au terme du délai d'instruction de deux mois du silence gardé par la commune ; que la SCI Grenache relève appel du jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 30 janvier 2014 annulant, à la demande de M. et Mme J... et autres, ce permis de construire tacite ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en cinquième page de la requête présentée en première instance, M. et Mme J... et autres, font valoir dans un paragraphe intitulé " La date de cristallisation du permis tacite. ", qu'ils s'interrogent sur la raison qui a poussé la société pétitionnaire à se prévaloir de l'existence d'un permis tacite " à compter du 13 janvier 2012 " ; que ces observations ne peuvent être regardées comme constituant l'exposé d'un moyen sur lequel les requérants ont entendu se fonder pour obtenir l'annulation de la décision attaquée ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal n'a pas visé ces observations comme constitutives d'un moyen auquel il devait répondre ;

Sur la recevabilité de la demande présentée en première instance :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme J... et autres ont formé un recours gracieux le 8 juin 2012 contre le permis de construire n° 01305011M0037 délivré, selon les mentions d'affichage dudit permis, le 13 janvier 2012 ; que si ce permis est en réalité intervenu le 12 décembre 2011, cette mention du recours gracieux, qui tenait à la seule reprise de l'erreur matérielle figurant dans l'affichage du permis est sans incidence sur la validité du recours présenté contre une décision suffisamment identifiable ; que par ailleurs, les requérants ont présenté leur requête tendant à l'annulation de ce permis de construire dans le délai de deux mois suivant le rejet de leur recours gracieux ; qu'il suit de là, qu'alors même qu'ils n'auraient pas expressément demandé l'annulation de la décision de rejet du recours gracieux en même temps que celle du permis de construire, leur demande dirigée contre ledit permis n'était pas tardive et que c'est à bon droit que le tribunal en a admis la recevabilité ;

4. Considérant qu'ainsi que le rappelle le point 1 précédent, le tribunal administratif de Marseille a annulé par jugement du 10 octobre 2013 l'arrêté du maire de Lambesc du 20 janvier 2012 portant sursis à statuer sur la demande de permis de construire déposée par la SCI Grenache ; que cette annulation a eu pour effet de faire revivre le permis tacite né le 12 décembre 2011 ; que par suite, l'annulation par le Conseil d'Etat le 12 juin 2013 de l'ordonnance du juge du référé du tribunal administratif de Marseille ordonnant le 11 avril 2012 la suspension de l'exécution de l'arrêté du 20 janvier 2012 qui, contrairement à ce que soutient l'appelante, n'a pu avoir pour effet de faire disparaître de l'ordonnancement juridique le permis de construire en litige, est sans incidence sur l'objet de la requête en annulation présentée en première instance contre ledit permis de construire ;

Sur le bien fondé du jugement :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet la division, qu'elle soit en propriété ou en jouissance, qu'elle résulte de mutations à titre gratuit ou onéreux, de partage ou de locations, d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments. " ; qu'aux termes de l'article L. 442-2 du même code, dans sa rédaction applicable : " Un décret en Conseil d'Etat précise, en fonction du nombre de terrains issus de la division, de la création de voies et d'équipements communs et de la localisation de l'opération, les cas dans lesquels la réalisation d'un lotissement doit être précédée d'un permis d'aménager. " ; que l'article L. 442-3 du même code dispose : " Les lotissements qui ne sont pas soumis à la délivrance d'un permis d'aménager doivent faire l'objet d'une déclaration préalable. " ;

6. Considérant que la SCI Grenache ne conteste pas qu'ainsi que l'a retenu le jugement attaqué, par le jeu de divisions successives, sur une période de moins de dix ans, deux terrains à bâtir de 10 000 m² ont été détachés de la parcelle CT 163, l'un constitué de la parcelle cadastrée CT 170, terrain d'assiette d'une construction autorisée par un permis de construire délivré le 23 juillet 2010, l'autre constitué de la parcelle cadastrée CT 171, destinée à recevoir la construction en litige ; que, par suite, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la division de la propriété foncière d'origine, ainsi décrite, en vue de l'implantation de bâtiments, constitue un lotissement au sens des dispositions de l'article L. 442-1 précitées du code de l'urbanisme qui nécessitait la délivrance d'une autorisation d'urbanisme sur ce fondement ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 442-1 du même code dans sa version alors applicable : " Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager : a) Les divisions en propriété ou en jouissance effectuées par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d'aménager portant sur la création d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation " ; que constitue une maison individuelle, au sens des dispositions précitées, une construction qui, bien que susceptible d'accueillir plusieurs logements, par ses proportions, son architecture horizontale plutôt que verticale, et son aspect extérieur, ne peut être qualifié d'immeuble d'habitation collective ;

8. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier, que la demande de permis de construire en litige portait sur " la construction d'une maison de deux logements avec entrée commune et annexes ", que les documents graphiques du dossier de demande représentent au niveau du rez-de-chaussée, un hall d'entrée commun aux deux logements et que la notice explicative décrit quant à elle " un projet de maison de 2 logements avec 1 entrée commune " ; qu'il ressort par ailleurs des caractéristiques de la construction en litige, eu égard à sa faible superficie, son architecture horizontale et son aspect extérieur, qu'elle ne peut être regardée comme un immeuble d'habitation collective alors même qu'elle abrite deux logements ; que, dans ces conditions, la SCI Grenache ne peut soutenir que le projet en litige ne portait pas sur la construction d'une maison individuelle ; que, par suite, elle ne peut se prévaloir des dispositions de l'article R. 442-1 précitées du code de l'urbanisme qui, sous certaines conditions, ne soumettent ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager les seules opérations de construction qu'elles définissent et dont sont exclues les habitations individuelles ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'annexe " gestion des eaux pluviales " du plan d'occupation des sols de la commune de Lambesc : " L'imperméabilisation des surfaces devra être compensée par la création de bassin de rétention ou de bassin d'infiltration permettant d'assurer un degré de protection cinquantennale " ; que ces prescriptions auxquelles renvoie expressément l'article NB4 du règlement au titre de la gestion des eaux pluviales, ne peuvent être ni qualifiées de mentions ayant seulement un caractère informatif, alors que par ce renvoi, les auteurs du document d'urbanisme ont entendu leur donner une portée normative, ni d'exigences formelles opposées illégalement à une demande d'un permis de construire, s'agissant d'exigences de fond portant sur les conditions de réalisation des abords et des accès de la construction ; que, par ailleurs, la circonstance que le service public de l'assainissement non collectif (SPANC) ait donné un avis favorable le 22 décembre 2011, postérieurement à la décision en litige, sur le dispositif d'assainissement du projet de construction est sans incidence sur le respect par la construction des dispositions spécifiques du plan d'occupation des sols relatives à la gestion des eaux pluviales ; que, par suite, et alors que la SCI Grenache ne conteste pas que son projet ne prévoit aucun dispositif susceptible de répondre aux exigences ainsi fixées par le règlement du plan d'occupation des sols, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article NB 4 du plan d'occupation des sols ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par M. et Mme J... et autres, que la SCI Grenache n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire né le 12 décembre 2011 du silence gardé par le maire de Lambesc sur sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme J... et autres, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la SCI Grenache au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SCI Grenache la somme globale de 1 000 euros à verser à M. et Mme J... et autres sur le même fondement ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société civile immobilière Grenache est rejetée.

Article 2 : La société civile immobilière Grenache versera la somme globale de 1 000 (mille) euros à M. N...et Mme A...J..., M. F...et Mme M...K..., Mme R...L..., M. T... B..., M. E... C..., M. S... O..., Mme I... P...et M. G... U...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Grenache et à M. N...et Mme A...J..., M. F...et Mme M...K..., Mme R...L..., M. T... B..., M. E... C..., M. S... O..., Mme I... P...et M. G... U....

Délibéré après l'audience du 31 mars 2016 à laquelle siégeaient :

- M. d'Hervé, président de chambre,

- Mme Féménia, première conseillère,

- M. Gonneau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 avril 2016.

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N° 14MA01558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01558
Date de la décision : 21/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Jeanette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : IBANEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-21;14ma01558 ?
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