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19/04/2016 | FRANCE | N°15MA00142

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 19 avril 2016, 15MA00142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... H...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté en date du 14 juin 2013 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité sud a décidé de supprimer son traitement à compter du 5 juin 2013, ensemble la décision de rejet implicite de son recours gracieux et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1303373 en date du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Nice a r

ejeté la requête de M. H....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, des mém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... H...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté en date du 14 juin 2013 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité sud a décidé de supprimer son traitement à compter du 5 juin 2013, ensemble la décision de rejet implicite de son recours gracieux et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1303373 en date du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de M. H....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, des mémoires et pièces enregistrés les 6 janvier 2015, 20 octobre 2015, 30 décembre 2015 et 11 février 2016, M. H..., représenté par Me G...C..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 13 novembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision précitée en date du 14 juin 2013, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux ;

3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 55 244 euros à parfaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- ses conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ne sont pas nouvelles en appel ;

- le signataire de l'acte attaqué était incompétent ;

- le comité médical devait obligatoirement être consulté ;

- il devait être invité à faire valoir ses observations et être informé de ses droits ;

- son état de santé était incompatible avec une reprise de ses fonctions.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2015, le ministre de l'intérieur demande à la Cour de rejeter la requête de M. H....

Il soutient que :

- les conclusions dirigées contre la décision implicite de rejet du recours gracieux sont irrecevables car nouvelles en appel ;

- les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

1. Considérant que M. H..., gardien de la paix affecté, en dernier lieu, à la circonscription de sécurité publique de Menton, a été victime d'accidents du travail les 18 août 1997 et 24 mai 2009 ; qu'il a, notamment, été placé, à ce titre, en congé de maladie à compter du 26 avril 2011 ; qu'à la suite d'un rapport établi par le Dr A...I...le 4 octobre 2012 concluant à l'aptitude de l'intéressé à la reprise sur un poste sédentaire, M. H... a été mis en demeure par lettres des 14 janvier 2013, 1er février 2013, 18 février 2013, 27 février 2013 et 3 juin 2013, de reprendre ses fonctions ; que M. H... n'ayant pas déféré à ces mises en demeure, le préfet de la zone de défense et de sécurité sud a décidé, par arrêté en date du 14 juin 2013, de supprimer son traitement à compter du 5 juin 2013 ; que M. H... interjette appel du jugement en date du 13 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 14 juin 2013 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions indemnitaires ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur :

2. Considérant que si le ministre de l'intérieur soutient que les conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite de rejet du recours gracieux exercé par M. H... le 16 août 2013 à l'encontre de la décision du 14 juin 2013 seraient nouvelles en appel, il ressort du dossier de première instance que lesdites conclusions avaient été présentées par mémoire enregistré au tribunal le 19 juin 2014, soit avant la clôture de l'instruction fixée au 24 juin 2014 ; que, dès lors, lesdites conclusions ne sont pas nouvelles en appel ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur doit être écartée ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire (...) " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) " ; qu'aux termes de l'article 35 de ladite loi : " Des décrets en Conseil d'Etat fixent les modalités des différents régimes de congé et déterminent leurs effets sur la situation administrative des fonctionnaires. Ils fixent également les modalités d'organisation et de fonctionnement des comités médicaux compétents en matière de congé de maladie, de longue maladie et de longue durée. Ils déterminent, en outre, les obligations auxquelles les fonctionnaires demandant le bénéfice ou bénéficiant des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 34 sont tenus de se soumettre en vue, d'une part, de l'octroi ou du maintien de ces congés et, d'autre part, du rétablissement de leur santé, sous peine de voir réduire ou supprimer le traitement qui leur avait été conservé " ; qu'enfin, aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime des congés de maladie des fonctionnaires : " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos de l'admission des candidats aux emplois publics, de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie et de la réintégration à l'issue de ces congés. / Ils sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : (...) 4. La réintégration après douze mois consécutifs de congé de maladie ou à l'issue d'un congé de longue maladie ou de longue durée ; 5. L'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après congé ou disponibilité (...) " ;

4. Considérant que s'il résulte des dispositions précitées de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 que l'administration est tenue de suspendre jusqu'à la reprise effective de son service par l'intéressé, le versement du traitement d'un fonctionnaire qui n'accomplit pas son service, tel n'est pas le cas lorsque l'absence de service n'est pas imputable à l'agent mais à son administration ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un rapport en date du 4 octobre 2012, le Dr A...I..., mandaté par l'administration, a estimé que M. H..., qui était en congé de maladie depuis le 26 avril 2011, était apte à reprendre le travail sur un poste sédentaire ; que, toutefois, M. H... avait clairement entendu contester ce rapport d'expertise, d'une part, par l'apposition, le 11 janvier 2013, de la mention " je conteste cette décision suite expertise transmis au Dr B...le 19 décembre 2012 " et, d'autre part, en adressant un courrier tant au médecin inspecteur régional, le DrB..., qu'au ministre de l'intérieur le 8 mars 2013 ; qu'il se prévalait, à l'appui de sa contestation, d'un rapport d'expertise très complet établi le 17 septembre 2012 par le DrD..., rhumatologue et de son additif du 5 décembre 2012 ainsi que de trois certificats médicaux établis les 27 février 2012, 8 juin 2012 et 29 octobre 2012 par le DrE..., médecin de la police nationale, qui concluaient à son inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions, sans possibilité d'aménagement de poste y compris sur un poste sédentaire dès lors qu'un tel aménagement avait déjà, sans succès, été tenté entre le 9 janvier 2011 et le 11 avril 2011 ; que, dès lors que l'administration envisageait de réintégrer M. H... après un congé de maladie ordinaire de plus de douze mois, elle était tenue, en application des dispositions précitées de l'article 7 du décret du 14 mars 1986, quand bien même l'intéressé ne le demandait pas expressément lui-même, de saisir le comité médical, d'autant que le requérant contestait les conclusions du Dr A... I...sur la base de pièces de nature à faire douter sérieusement des conclusions de ce rapport ; que l'administration ne pouvait, sans saisir le comité médical et ainsi priver M. H... d'une garantie, ni attendre l'avis dudit comité, mettre son agent en demeure de reprendre ses fonctions et, par suite, procéder à la suppression de son traitement à compter du 5 juin 2013 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. H... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité sud en date du 14 juin 2013 ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler ledit jugement ainsi que, par l'effet dévolutif de l'appel, tant l'arrêté du 14 juin 2013 que la décision implicite rejetant le recours gracieux exercé le 16 août 2013 par M. H... ;

Sur les conclusions indemnitaires :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accident dont a été victime M. H... le 24 mai 2009 a été reconnu comme étant imputable au service par décision du préfet de la zone de défense et de sécurité sud du 20 septembre 2010 ; qu'ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 34 2° de la loi du 11 janvier 1984, M. H..., dont le traitement ne pouvait, ainsi qu'il a été dit précédemment, être suspendu avant que le comité médical ait été saisi et ait émis un avis sur une éventuelle réintégration ou sur une incapacité définitive à l'exercice de ses fonctions ou de toutes fonctions au sein de la police nationale, avait droit à conserver, dans cette attente, l'intégralité de son traitement ;

8. Considérant toutefois que la Cour n'est pas en mesure de statuer sur les conclusions indemnitaires du requérant dès lors qu'elle ne dispose pas d'éléments d'information, d'une part, sur l'évolution de sa situation professionnelle à la suite de la décision attaquée et, notamment, sur le point de savoir s'il a, depuis, fait l'objet d'une décision d'éviction du service telle que, notamment, une radiation des cadres et, d'autre part, sur la perception éventuelle d'autres revenus en France ou au Canada, pays dans lequel M. H... semble, au vu des dernières pièces produites, s'être installé avec son épouse ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner avant dire droit aux parties de produire, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, tous éléments d'information quant à l'évolution de la situation administrative du requérant après le 14 juin 2013 et à M. H... de produire en outre ses avis d'imposition en France et/ou au Canada de 2013 au jour du présent arrêt ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1303373 rendu le 13 novembre 2014 par le tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité sud en date du 14 juin 2013, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux exercé le 16 août 2013 par M. H... sont annulés.

Article 3 : Avant de statuer sur les conclusions indemnitaires de la requête, il est ordonné aux parties de produire, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, tous éléments d'information quant à l'évolution de la situation administrative du requérant après le 14 juin 2013 et à M. H... de produire en outre ses avis d'imposition en France et/ou au Canada de 2013 au jour du présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont réservées pour y être statué en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... H...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2016, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- Mme Baux, premier conseiller,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 avril 2016.

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N° 15MA00142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00142
Date de la décision : 19/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-02-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Traitement. Retenues sur traitement. Retenues sur traitement pour absence du service fait.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : JEAN-CLAUDE BENSA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-19;15ma00142 ?
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