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21/03/2016 | FRANCE | N°15MA01267

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 21 mars 2016, 15MA01267


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...épouse D...a notamment demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 18 novembre 2014 par lequel le préfet du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français, d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de la décision à intervenir, ou subsidiairement, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un

jugement n° 1403893 du 26 février 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...épouse D...a notamment demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 18 novembre 2014 par lequel le préfet du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français, d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de la décision à intervenir, ou subsidiairement, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1403893 du 26 février 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les demandes de Mme D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2015, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 février 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 18 novembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) subsidiairement, de lui enjoindre de réexaminer sa demande d'un tel titre de séjour, en sa qualité de conjoint de français, dans un délai de deux mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser directement à Me C..., en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, dont le versement vaudra renonciation de sa part au bénéfice de la part contributive de l'Etat.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de délivrance à l'exposante d'un visa de long séjour valant titre de séjour en sa qualité de conjointe de français :

- cette décision est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du 19 mars 2007, en l'absence de saisine des autorités consulaires françaises en Serbie, seules compétentes pour délivrer ce visa ;

- la même décision est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L. 312-2 dudit code, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, alors que l'exposante avait droit à la délivrance d'un visa de long séjour valant titre de séjour au regard des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du même code et de celles de son article L. 313-14 ;

- pour les mêmes raisons, cette décision méconnait ces dernières dispositions ensemble celles du 5ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle, notamment conjugale, de l'exposante ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale que cette dernière tient notamment des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est entachée d'illégalité par voie de conséquence de celle de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la loi du 11 juillet 1979.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assorti des précisions et justifications de nature à permettre à la Cour d'en apprécier le bien fondé ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant, dès lors que la demande de la requérante n'était pas fondée sur ces dispositions ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par courrier du 9 novembre 2015, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, que l'affaire était susceptible d'être appelée au premier trimestre de l'année 2016 et qu'elle pourrait faire l'objet d'une clôture d'instruction à effet immédiat à partir du 1er décembre 2015

La clôture à effet immédiat de l'instruction a été prononcée avec l'émission de l'avis d'audience le 4 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gautron.

1. Considérant que Mme B...épouseD..., née le 16 novembre 1964 à Backo Gradiste (Serbie) et de nationalité serbe, s'est mariée, le 16 septembre 2013, avec M. D... né le 9 avril 1963 dans la même commune et de nationalité française ; qu'elle affirme être arrivée en France le 1er janvier 2014, après avoir transité par la Slovénie, munie d'un passeport biométrique délivré par les autorités serbes le 21 novembre 2013 ; qu'elle a déposé, le 10 juillet suivant, une demande de visa de long séjour valant titre de séjour en sa qualité de conjointe de français ; qu'elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 février 2015, par lequel celui-ci a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'arrêté du préfet du Gard n° 2014/484 du 18 novembre 2014 par lequel celui-ci a opposé un refus à sa demande et ordonné son éloignement ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. (...) " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que l'étranger qu'elles déterminent peut présenter à la préfecture de son domicile une demande de visa de long séjour et qu'il appartient au préfet d'examiner si le demandeur remplit les conditions fixées et, dans cette hypothèse, de transmettre la demande aux autorités consulaires françaises qui doivent l'examiner compte tenu, notamment, des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 211-2-1, relatif à la délivrance d'un visa à un conjoint de Français ;

3. Considérant que le mariage des époux D...n'a pas été célébré en France mais en Serbie, ainsi qu'il a été dit au point 1 ; que dès lors que la demande de visa de la requérante ne satisfaisait pas ainsi aux conditions posées par l'article L. 211-2-1, le préfet n'était pas tenu de la transmettre aux autorités compétentes en vertu de ces dispositions ; que par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance, à l'appui duquel l'intéressée n'invoque pas utilement les dispositions de la circulaire ministérielle n° INT/D/07/00031/C du 19 mars 2007 relative à leur application, dès lors que celles-ci sont dépourvue de portée normative, doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 dudit code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ;

5. Considérant que si Mme B...épouse D...soutient qu'elle était fondée à solliciter la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 qu'elle n'était pas titulaire du visa de long séjour mentionné à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est par suite pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse D...n'avait séjourné sur le territoire national que depuis moins d'un an à la date de l'arrêté attaqué ; qu'arrivée sur celui-ci à l'âge de 50 ans, elle a passé la majorité de son existence dans son pays d'origine où elle conserve des attaches familiales, deux enfants notamment ; que son mariage avec M. D..., lequel est originaire du même pays, est également très récent ; que Mme B...épouseD..., sans emploi et sans ressource en France, n'établit pas y avoir développé des liens d'une intensité particulière en dehors de son couple, depuis son arrivée ; que dans ces conditions, elle ne démontre pas avoir fixé le centre de sa vie privée et familiale dans ce pays ; que par suite, les moyens tirés de l'atteinte disproportionnée portée par l'arrêté attaqué à son droit au respect de cette dernière, telle qu'elle est protégée en particulier par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comme de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle par son auteur, doivent être écartés ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

9. Considérant que ces dispositions ne sauraient, en tout état de cause, fonder la délivrance de plein droit d'un titre de séjour à Mme B... épouseD..., qui ne les avaient d'ailleurs pas invoquées à l'appui de sa demande ; qu'au surplus, elle ne démontre pas, au regard de ce qui précède, l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des mêmes dispositions ; que par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 dudit code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ;

11. Considérant que comme il a été dit aux points 2, 5 et 9, Mme B... épouse D...n'est pas susceptible de se voir délivrer de plein droit un titre de séjour, sur le fondement en particulier des dispositions de l'article L. 313-11 du même code ; que dès lors, en s'abstenant de saisir la commission du titre de séjour préalablement à son édiction, l'auteur de l'arrêté attaqué n'a pas méconnu celles précitées de son article L. 312-1 ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'illégalité de cette décision par voie de conséquence de celle de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté au regard de ce qui précède ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme B... épouse D...soutient que la même décision méconnait les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen n'est pas assorti des précisions et justifications de nature à permettre à la Cour d'en apprécier le bien fondé ;

14. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) " ;

15. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la décision attaquée n'avait pas à faire l'objet d'une motivation propre, indépendamment de celle de la décision portant refus de titre de séjour, dont le caractère suffisant en l'espèce n'est pas contesté et résulte, au demeurant, de la lecture de l'arrêté attaqué ; que par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant de sa motivation doit être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... épouse D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'arrêté du préfet du Gard du 18 novembre 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentée par Mme B... épouseD..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées à cette fin doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la somme réclamée par Me C... sur leur fondement, au titre des frais exposés par Mme B... épouse D...et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... épouse D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...épouseD..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 29 février 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- M. Gautron, conseiller,

Lu en audience publique, le 21 mars 2016.

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N° 15MA01267


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01267
Date de la décision : 21/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : DEIXONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-03-21;15ma01267 ?
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