Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 11 février 2014 par laquelle le préfet du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination duquel elle pourrait être reconduite d'office, et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire " vie privée et familiale ".
Par un jugement n° 1401820 du 8 août 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 septembre 2014 et un mémoire récapitulatif enregistré le 7 septembre 2015, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Nîmes en ce qu'il a confirmé la décision de refus de séjour portant obligation de quitter le territoire prise à son encontre par le préfet du Gard ;
2°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour temporaire " vie privée et familiale ", sous astreinte fixée à cinquante euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens de la présente instance et de ses suites.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- qu'elle n'a pas contracté mariage avec M. C... dans l'unique but d'obtenir des papiers, contrairement à ce que soutient le préfet du Gard ;
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11, 6° et 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale dès lors que la décision de refus de séjour est elle-même illégale ;
- la décision méconnaît l'article de L. 313-11 6° et 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Mme B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 novembre 2014.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gonzales.
1. Considérant que Mme A...B..., de nationalité tunisienne, a sollicité le 28 août 2013 la délivrance d'un titre de séjour ; que, par un arrêté en date du 11 février 2014, le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ; que Mme B... demande l'annulation de cet arrêté en tant qu'il refuse la délivrance d'un titre de séjour et qu'il lui fait obligation de quitter le territoire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment d'un procès verbal d'audition en date du 28 novembre 2013, que Mme B... a reconnu avoir épousé en Tunisie, en juin 2011, M. C..., de nationalité française, dans le but d'obtenir un titre de séjour en France ; que, dès lors, le préfet du Gard n'a pas commis d'erreur de fait en indiquant que Mme B... a épousé M. C... dans un but migratoire ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délibérée de plein droit : (...)7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7
soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B... a épousé M. C... en Tunisie le 23 juin 2011 ; qu'elle est entrée en France, sous couvert d'un visa de long séjour le 10 septembre 2012 en qualité de conjointe de Français ; que, lors de son audition en date du 28 novembre 2013, elle a reconnu que sa communauté de vie avec son époux avait cessé ; que Mme B..., divorcée de M. C... depuis le 26 mars 2014, vivait, à la date de la décision attaquée, en union libre avec une autre personne ; qu'elle possède d'importes attaches familiales en Tunisie, où résident notamment ses parents ; que, dès lors, l'atteinte portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ne revêt pas, dans les circonstances de l'espèce, un caractère disproportionné aux buts poursuivis par le préfet dans la mise en oeuvre de ses pouvoirs en matière de police des étrangers ; que doivent donc être écartés les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celle des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délibérée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en été de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
6. Considérant que la circonstance établie par les pièces du dossier que des enfants ont été conçus postérieurement à la date de l'arrêté sont, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de l'arrêté préfectoral ; que, dès lors, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, l'appelante n'établit pas que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant, d'autre part, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent également être écartés ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-11 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction de délivrance d'un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexamen de la demande de titre de séjour présentée par la requérante, doivent être rejetées ;
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice de Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 23 février 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 mars 2016.
''
''
''
''
2
N° 14MA03903