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15/03/2016 | FRANCE | N°14MA03311

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 mars 2016, 14MA03311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Le Lys Rouge a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du préfet du Var du 14 décembre 2011 portant autorisation d'occupation du domaine public, en tant qu'elle est assortie d'une obligation de démolition, ainsi que la décision portant rejet implicite de son recours administratif.

Par un jugement n° 1201624 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés l

e 24 juillet 2014 et le 4 septembre 2015, la SCI Le Lys Rouge, représentée par la SELAS de Ga...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Le Lys Rouge a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du préfet du Var du 14 décembre 2011 portant autorisation d'occupation du domaine public, en tant qu'elle est assortie d'une obligation de démolition, ainsi que la décision portant rejet implicite de son recours administratif.

Par un jugement n° 1201624 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2014 et le 4 septembre 2015, la SCI Le Lys Rouge, représentée par la SELAS de Gaulle Fleurance et Associés demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 mai 2014 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Var du 14 décembre 2011 portant autorisation d'occupation du domaine public, en tant qu'elle est assortie d'une obligation de démolition, ainsi que la décision portant rejet implicite de son recours administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision l'autorisant à occuper le domaine public et la décision lui enjoignant de démolir l'ouvrage à la date d'expiration de l'autorisation sont deux décisions distinctes, et elle est recevable à n'attaquer que la seconde ;

- en qualité de propriétaire, elle bénéficie de l'autorisation domaniale et justifie de son intérêt pour agir, la demande ayant été présentée par Mme B... en sa qualité de représentante légale de la société ;

- la motivation de la décision est insuffisante ;

- n'étant pas propriétaire de l'ouvrage, dont elle n'a pas l'usage exclusif, elle ne peut se voir imposer sa démolition ;

- la décision est entachée d'un défaut de base légale, dès lors que le document d'objectif afférent à l'inscription au réseau Natura 2000 n'avait pas été adopté au moment où elle a été prise ;

- l'ouvrage fait partie du domaine public artificiel et il ne peut lui être enjoint d'y porter atteinte ;

- la démolition du ponton n'incombe pas au dernier occupant des lieux ;

- le code général de la propriété des personnes publiques prévoit explicitement le maintien en l'état des constructions antérieures au 3 janvier 1986 ;

- l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, sur lequel le préfet du Var doit être supposé s'être fondé, ne permet pas davantage de fonder la démolition prescrite ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation car l'ouvrage est lié à l'utilisation de la mer et a été construit et est entretenu avec des matériaux aux aspects naturels et dans les tons proches de la couleur des roches environnantes ;

- il y a une disproportion manifeste entre les intérêts à protéger, qui ne sont pas appréciés de façon détaillée, et la mesure prise.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2014, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car la SCI, qui n'est pas la bénéficiaire de l'autorisation d'occupation temporaire, n'a pas d'intérêt à contester cette mesure ;

- la SCI n'est pas non plus recevable à demander l'annulation partielle d'une décision indivisible ;

- les autres moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 2 novembre 2015 à 12 heures.

Un mémoire présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a été enregistré le 2 novembre 2015 à 15 heures 42, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., première conseillère,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SCI Le Lys Rouge.

1. Considérant que la SCI Le Lys Rouge, dont Mme B... est la gérante, a acquis, le 21 décembre 2006, une propriété située quartier du Trayas à Saint-Raphaël, en contrebas de laquelle sont édifiés une plate-forme et un quai d'une surface de cinquante-sept mètres carrés, permettant l'accès à la mer ainsi que l'amarrage d'un bateau de plaisance, selon autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime du 9 juin 1980, régulièrement renouvelée ; que M. et Mme B..., seuls associés de la SCI, qui occupent désormais la propriété, ont obtenu le transfert de cette autorisation d'occupation du domaine public par arrêté du 11 avril 2007, pour la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2011 ; que, le 11 août 2011, Mme B... a présenté une demande de renouvellement de cette autorisation ; que par arrêté du 14 décembre 2011, le préfet du Var lui a accordé une nouvelle autorisation d'une durée de deux ans, prenant fin le 31 décembre 2013, assortie d'une obligation de démolition de l'ouvrage en cause avant cette échéance ; que la SCI Le Lys Rouge a exercé, le 14 février 2012, un recours gracieux contre cet arrêté en tant qu'il prescrivait la démolition de l'ouvrage ; que cette société relève appel du jugement du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il prescrivait cette démolition et de la décision portant rejet implicite de son recours gracieux ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Considérant que la SCI Le Lys Rouge avait la qualité de partie en première instance ; que, dès lors, elle est recevable à relever appel du jugement du 28 mai 2014 ;

Sur la recevabilité de la demande :

3. Considérant, d'une part, que le tribunal a jugé que les conclusions de la requête visant à l'annulation des seules dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 14 décembre 2011 afférentes à l'obligation de démolition de l'ouvrage étaient irrecevables car elles formaient un tout indivisible avec l'autorisation d'occupation du domaine public dont elles constituaient l'un des supports ; que, cependant, le titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public est recevable à demander l'annulation d'une ou de plusieurs prescriptions dont celle-ci est assortie ; qu'il peut utilement soulever à l'appui de telles conclusions tout moyen relatif au bien-fondé des prescriptions qu'il critique ou au respect des exigences procédurales propres à leur édiction ; qu'ainsi, la société appelante est fondée à soutenir que le tribunal ne pouvait se fonder sur la circonstance que les dispositions ordonnant la démolition de l'ouvrage n'étaient pas séparables de l'autorisation accordée pour juger que les conclusions qui lui étaient soumises étaient irrecevables ;

4. Considérant, d'autre part, que la SCI est la propriétaire de la villa Le Lys Rouge et que Mme B... en est la gérante ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est en sa qualité de gérante que Mme B... a sollicité l'autorisation d'occupation du domaine public en cause et que c'est en cette même qualité que cette autorisation lui a été accordée ; qu'ainsi la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir opposée par la ministre à la SCI appelante doit être écartée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Le Lys Rouge est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que sa demande était irrecevable ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SCI Le Lys Rouge devant le tribunal administratif de Toulon ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Considérant que si, comme il a été dit, le titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public est recevable à demander l'annulation d'une ou de plusieurs des prescriptions dont elle est assortie, le juge ne peut annuler ces prescriptions, lorsqu'elles sont illégales, que s'il résulte de l'instruction que ces dernières ne forment pas avec l'autorisation d'occupation un ensemble indivisible ;

7. Considérant que la lettre de notification de l'arrêté du 14 décembre 2011 indique sans ambiguïté que, compte tenu de la politique de l'Etat en matière de gestion du domaine public naturel, consistant à redonner au littoral son caractère naturel, il n'est plus possible aux yeux de son auteur de délivrer, sur cette partie du littoral varois particulièrement protégé, des occupations artificielles ; que cette lettre précise que, dans ces conditions, le nouveau titre délivré est volontairement limité à deux années, délai considéré comme suffisant pour mener à bien la démolition des ouvrages ; que l'article 15 de l'arrêté du 14 décembre 2011 précise notamment : " cette AOT est délivrée pour une durée de deux ans. Le pétitionnaire devra mettre ces deux années à profit pour procéder à la démolition de la totalité des ouvrages (plate-forme + quai) situés sur le domaine public maritime. " ; qu'il ressort ainsi des pièces du dossier que le préfet du Var a entendu délivrer l'autorisation sollicitée dans le but de permettre aux permissionnaires de procéder à la démolition de l'ouvrage ; qu'en édictant ces prescriptions particulières, qui n'étaient pas étrangères à la législation régissant les autorisations d'occupation du domaine public, le préfet du Var a assorti l'autorisation accordée de conditions qui doivent être considérées comme constituant un des supports de l'autorisation et comme formant un tout indivisible avec elle ; qu'il en résulte que, à supposer même fondés les moyens soulevés par la SCI le Lys Rouge, le juge de l'excès de pouvoir ne peut annuler ces prescriptions ni le rejet implicite du recours gracieux dirigé contre elles ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la SCI Le Lys Rouge doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 mai 2014 est annulé.

Article 2 : La demande de la SCI Le Lys Rouge et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Le Lys Rouge et à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.

Délibéré après l'audience du 26 février 2016, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 mars 2016.

La rapporteure,

Signé

A. C...Le président,

Signé

M. LASCAR

Le greffier,

Signé

V. DUPOUY

La République mande et ordonne à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 14MA03311

acr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03311
Date de la décision : 15/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Diverses sortes de recours - Recours pour excès de pouvoir - Conditions de recevabilité.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Conclusions - Conclusions irrecevables - Actes indivisibles.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET DE GAULLE FLEURANCE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-03-15;14ma03311 ?
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