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15/03/2016 | FRANCE | N°14MA03293

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 15 mars 2016, 14MA03293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeB... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes en date du 17 juillet 2012 lui retirant son titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français à destination de la Tunisie dans le délai de 30 jours, d'enjoindre, à titre principal, au préfet des Alpes-Maritimes de la réenregistrer en tant que titulaire de sa carte de résident valide jusqu'au 14 septembre 2019 dans le délai de huit jours sous astreinte de 200 euros par jour

de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour dans l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeB... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes en date du 17 juillet 2012 lui retirant son titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français à destination de la Tunisie dans le délai de 30 jours, d'enjoindre, à titre principal, au préfet des Alpes-Maritimes de la réenregistrer en tant que titulaire de sa carte de résident valide jusqu'au 14 septembre 2019 dans le délai de huit jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, enfin, de mettre à la charge de l'État la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Par un jugement n° 1401194 du 20 juin 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2014 sous le n° 14MA03293, Mme C..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 17 juillet 2012 lui retirant son titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet des Alpes-Maritimes de la réenregistrer en tant que titulaire de sa carte de résident valide jusqu'au 14 septembre 2019 dans le délai de huit jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour et, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, dans le délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme C... soutient que :

- les juges du fond ont dénaturé les pièces versées au débat ;

- les juges du fond ont commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu le principe du contradictoire ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur de droit en lui retirant son titre de séjour pour rupture de la communauté de vie alors qu'elle a été contrainte de quitter le domicile conjugal à cause des violences qu'elle subissait de la part de son époux ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui retirant son titre de séjour alors qu'elle a une activité salariée et est pleinement intégrée dans la société ;

- la décision du préfet des Alpes-Maritimes méconnaît l'article L. 313-14 dudit code ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de retrait de titre de séjour qui en est le fondement.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renouf.

1. Considérant que Mme C..., de nationalité tunisienne, est entrée sur le territoire français le 14 septembre 2009 pour rejoindre son époux, également de nationalité tunisienne, selon la procédure de regroupement familial et a bénéficié d'un titre de séjour d'une durée de

dix ans ; que ce dernier ayant informé les services de la préfecture des Alpes-Maritimes qu'elle avait quitté le domicile conjugal et entrepris une procédure de divorce, le préfet des Alpes-Maritimes a, par une décision du 17 juillet 2012, retiré le titre de séjour de l'intéressée et fait obligation à celle-ci de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que Mme C... a alors exercé un recours en annulation de cette décision devant le tribunal administratif de Nice qui l'a rejeté par un jugement du 20 juin 2014 ; que Mme C... fait appel de ce jugement devant la Cour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que, Mme C... soutient que la décision du préfet des Alpes-Maritimes est entachée d'un vice de légalité externe, tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire, en ce que cette décision a été prise sans qu'elle ait été mise à même de présenter des observations écrites ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes a invité une première fois l'intéressée à fournir des observations écrites par une lettre recommandée du 21 novembre 2011 envoyée à sa seule adresse connue, à savoir celle du domicile conjugal, qui lui est revenue avec la mention " NPAI " ; que, par courriers des 23 et 31 mai 2012, envoyés cette fois à l'adresse figurant sur le jugement de divorce de Mme C..., le préfet des Alpes-Maritimes a de nouveau sollicité les observations de cette dernière mais en vain, lesdits courriers étant également revenus avec la mention " NPAI " ; qu'ainsi le préfet des Alpes-Maritimes a satisfait à son obligation de recueillir les observations écrites de Mme C..., quand bien-même celle-ci n'aurait pas reçu les courriers, dans la mesure où elle n'a pas transmis au service de la préfecture une adresse valide ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de rupture de la vie commune ne résultant pas du décès de l'un des conjoints, le titre de séjour qui a été remis au conjoint d'un étranger peut, pendant les trois années suivant l'autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement. (...) En outre, lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial et peut en accorder le renouvellement " ;

4. Considérant que Mme C... soutient que le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur de droit en lui retirant son titre de séjour alors qu'elle a été contrainte de quitter le domicile conjugal à cause des violences conjugales qu'elle subissait de la part de son époux ; que la requérante ne produit qu'une déclaration de main courante du 15 février 2011 faisant état du comportement agressif de son mari qui faisait pression sur elle pour l'empêcher de travailler et de trouver un équilibre social ; qu'elle produit également sa requête en divorce par consentement mutuel où elle précise que son mari refuse qu'elle travaille et que le maintien du lien du mariage est impossible en raison de l'extrême jalousie de celui-ci, de la pression psychologique exercée par son époux, et de la mésentente persistante ; qu'ainsi Mme C... n'établit pas suffisamment par des éléments objectifs et probants que la rupture de la communauté de vie des époux serait la conséquence de violences conjugales ; que, dans ces conditions, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme C... était séparée de son époux avec lequel elle n'a pas eu d'enfant ; qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans ; qu'alors même que Mme C... a une activité salariée et prétend donc ne pas être une charge pour la société et faire preuve d'intégration, elle n'établit pas avoir transféré le centre de sa vie privée et familiale en France ; que la décision en litige n'a, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée de son séjour en France, pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni de l'article L. 313-11 du code précité ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article

L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;

8. Considérant que Mme C... soutient que la décision attaquée méconnaît l'article L. 313-14 précité ; que, toutefois, la requérante n'apporte aucun élément permettant au juge d'apprécier en quoi son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait par des considérations humanitaires ; que, dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête ; que la demande de Mme C... devant la Cour doit être rejetée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant qu'en conséquence de ce qui précède, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions à fin d'injonction de Mme C... ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 23 février 2016, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mars 2016.

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N° 14MA032935


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03293
Date de la décision : 15/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe RENOUF
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : HMAD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-03-15;14ma03293 ?
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