Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par un déféré, enregistré le 8 décembre 2015, le préfet de l'Hérault a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 mai 2015 par lequel le maire de la commune de Marseillan a accordé à la société à responsabilité limitée (SARL) Centrale Solaire du Lido un permis de construire en vue de la réalisation d'ombrières couvertes de panneaux photovoltaïques sur le parking existant sur les parcelles cadastrées section EB, 101, 102, 103, 114, 116, 138, 39, 40, 42, 45, 46, 48, 49 et 63 situées avenue de Sète sur le territoire de ladite collectivité.
Par une ordonnance n° 1506453 du 11 janvier 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné la suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 mai 2015 jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 16MA00185, le 19 janvier 2016, et un bordereau de pièces, enregistré le 27 janvier 2016, la commune de Marseillan, représentée par la SCP d'avocats Dillenschneider, demande au juge des référés de la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 11 janvier 2016 ;
2°) de rejeter le déféré suspension de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préfet n'a pas justifié, dans son recours au fond, avoir notifié son recours gracieux à la société bénéficiaire de sorte que son recours au fond était irrecevable comme tardif ; en conséquence sa demande de suspension était également irrecevable ; à défaut d'avoir relever l'absence de justification du respect de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, le juge des référés a entaché son ordonnance d'irrégularité ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article ND1 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) communal n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté contesté dès lors que les aménagements autorisés par l'arrêté contesté entrent dans le champ des deux exceptions à l'interdiction de construire prévues par cet article, en l'occurrence l'intérêt général et les équipements nécessaires pour assurer un service public ;
- le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux dès lors que le préfet n'a pas démontré que le parking devant être équipé des ombrières en litige était situé au sein d'un espace remarquable ;
- le recours au fond étant irrecevable comme tardif, la demande de suspension était elle-même irrecevable ;
- les aménagements en litige, qui sont des équipements d'intérêt général ou liées à l'exercice d'un service public, étaient autorisés par les dispositions de l'article ND1 du règlement du POS ;
- les ombrières autorisées sont des accessoires du parking existant et ne peuvent être assimilées à des champs de capteurs de sorte que ces aménagements sont conformes aux dispositions du règlement de la zone rouge du plan de prévention des risques inondations (PPRI) ;
- le moyen tiré de la violation du schéma de cohérence territoriale (SCoT) doit être écarté dès lors que ce document n'est pas opposable aux autorisations d'urbanisme ;
- le parking existant n'est pas situé au sein du site remarquable de la Pointe des Onglous, ne fait pas partie d'une coupure d'urbanisation ni n'est implanté dans un espace proche du rivage ; en outre, le projet autorisé n'emporte pas d'urbanisation ;
- le moyen tiré de la violation de la loi sur l'eau n'est pas recevable en application du principe de l'indépendance des législations et n'est, en outre, pas fondé.
II. Par une requête, enregistrée, sous le n° 16MA00261, le 22 janvier 2016, la société à responsabilité limitée (SARL) Centrale Solaire du Lido, représentée par Me A... de la SCP d'avocats CGR Legal, demande au juge des référés de la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance susvisée du 11 janvier 2016 ;
2°) de rejeter le déféré suspension de première instance ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le déféré de première instance était irrecevable dès lors que le préfet n'a pas justifié, devant le premier juge, lui avoir notifié, conformément aux prescriptions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, le recours gracieux qu'il a formé le 10 août 2015 auprès du maire de Marseillan ; que cette irrecevabilité est insusceptible de régularisation ;
- c'est à tort que le premier juge a estimé que le moyen tiré de la violation de l'article ND1 du règlement du POS communal était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du permis contesté dès lors que ces aménagements constituaient des équipements d'intérêt général ou des ouvrages nécessaires aux installations liées à l'exercice d'un service public autorisés par cet article ;
- les aménagements autorisés, qui se situent dans un espace fortement artificialisé, ne sont pas insérés dans un espace remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme.
Par un bordereau de pièces, enregistré le 9 février 2016, le préfet de l'Hérault a produit, dans le cadre des deux instances, les pièces réclamées par les services du greffe de la Cour.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la décision du 1er septembre 2015 du président de la cour administrative d'appel de Marseille désignant Mme Buccafurri, présidente de la 9ème chambre, pour juger les référés.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 10 février 2016 :
- le rapport de Mme Buccafurri, juge des référés, qui a, en outre, informé les parties, à l'audience, en application des dispositions combinées des articles R. 522-9 et R. 611-7 du code de justice administrative, que sa décision était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public relevé d'office, tiré de l'incompétence du maire pour délivrer le permis de construire contesté au regard des dispositions des articles L. 422-2 b), R. 422-2 et R. 422-2-1 du code de l'urbanisme ;
- les observations de Me C..., représentant la société Centrale Solaire du Lido dans l'instance n° 16MA00261, qui persiste dans ses conclusions et moyens exposés dans ses écritures ;
- M. B..., représentant le préfet de l'Hérault, qui conclut au rejet des requêtes en faisant valoir qu'il a versé auprès des services de la Cour les justificatifs de la notification à la société bénéficiaire de son recours gracieux formé auprès du maire le 10 août 2015, que c'est à bon droit que le premier juge a ordonné la suspension du permis en litige pour les deux motifs qu'il a retenus, qu'il maintient, en outre, les autres moyens invoqués en première instance et qu'il souscrit au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte susceptible de fonder la décision du juge des référés de la Cour ;
- la commune de Marseillan n'étant pas représentée.
La clôture de l'instruction a été prononcée au terme de l'audience.
1. Considérant que la société Centrale Solaire du Lido a déposé, le 4 février 2015, une demande de permis de construire en vue de l'édification, sur une superficie de 7 986 mètres carrés, d'ombrières couvertes par des panneaux photovoltaïques, sur le parking existant du lido de Marseillan-Plage, comportant 556 places de stationnement, sur des parcelles cadastrées section EB, 101, 102, 103, 114, 116, 138, 39, 40, 42, 45, 46, 48, 49 et 63, situées avenue de Sète sur le territoire de la commune de Marseillan ; que, par un arrêté du 29 mai 2015, le maire de la commune de Marseillan a délivré le permis ainsi sollicité ; que, par une ordonnance en date du 11 janvier 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné, sur déféré du préfet de l'Hérault, la suspension de l'exécution de cet arrêté ; que, par les requêtes susvisées, la société Centrale Solaire du Lido et la commune de Marseillan relèvent appel de cette ordonnance ;
Sur la jonction des requêtes :
2. Considérant que les requêtes susvisées, enregistrées sous les n° 16MA00185 et 16MA00261, sont dirigées contre une même ordonnance et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même ordonnance ;
Sur les fins de non recevoir opposées au déféré de première instance par la commune de Marseillan et la société Centrale Solaire du Lido :
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans le délai de deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ; qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, (...), le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. / Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire, (...). / L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif./ La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir bénéficier d'une prorogation du délai de recours contentieux, l'auteur d'un recours administratif dirigé contre une décision relative à l'occupation du sol est tenu de le notifier dans les conditions fixées par l'article R. 600-1, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait former ultérieurement ; qu'en outre, lorsque l'auteur d'un recours entrant dans le champ d'application de ces dispositions n'a pas justifié en première instance de l'accomplissement des formalités de notification requises alors qu'il a été mis à même de le faire, soit par une fin de non-recevoir opposée par le défendeur, soit par une invitation à régulariser adressée par le tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire ces justifications pour la première fois en appel, qu'il s'agisse de la notification de son recours contentieux ou de son recours administratif ;
5. Considérant, d'autre part, que le juge des référés ne peut ordonner la suspension de l'exécution d'une décision lorsqu'il apparaît, en l'état de l'instruction, que la requête au fond contre cette décision n'est pas recevable ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire contesté du 29 mai 2015 a été reçu dans les services du contrôle de légalité de la préfecture de l'Hérault le 15 juin 2015 ; que, le 10 août 2015, le préfet de l'Hérault a adressé au maire un recours gracieux, reçu en mairie le 12 août suivant, à l'encontre de ce permis de construire ; que ce recours a fait l'objet d'une décision implicite de rejet, née le 12 octobre 2015 ; que, le 8 décembre 2015, le préfet de l'Hérault a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'un déféré par lequel il sollicitait l'annulation du permis de construire du 29 mai 2015 assorti d'une demande à fin de suspension de cette décision ; qu'il ressort de l'examen du dossier de première instance afférent à l'instance au fond que, par un courrier en date du 8 décembre 2015, les services du greffe du tribunal administratif de Montpellier ont invité le préfet de l'Hérault à régulariser sa requête, dans un délai de quinze jours et à peine d'irrecevabilité de son recours, en produisant les justificatifs des notifications exigées par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que si le préfet de l'Hérault a justifié des notifications de son recours contentieux au maire de Marseillan et à la société Centrale solaire du Lido, il s'est, en revanche, abstenu, avant l'intervention de l'ordonnance contestée du 11 janvier 2016, de produire les justificatifs de la notification à la société Centrale Solaire du Lido du recours gracieux qu'il a formé à l'encontre du permis en litige, le 10 août 2015 : qu'il est, en outre, constant que l'affichage du permis contesté répondait aux conditions fixées par l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme ; qu'il suit de là, qu'en l'absence de justification de sa notification à la société bénéficiaire, le recours gracieux du 10 août 2015 ne pouvait être regardé, en l'état de l'instruction existant à la date d'intervention de l'ordonnance attaquée, comme ayant pu proroger le délai de recours contentieux ouvert au préfet pour demander l'annulation du permis litigieux ; que, par suite, à cette date, le recours au fond présenté devant le tribunal administratif était tardif ; que le préfet de l'Hérault ayant été mis à même de régulariser son recours au fond par la demande adressée à cette fin le 8 décembre 2015 par les services du greffe du tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire, pour la première en appel, devant le juge des référés de la Cour, les justificatifs de la notification à la société bénéficiaire de son recours gracieux ; que, par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait ordonner, le 11 janvier 2016, la suspension de l'exécution du permis de construire contesté dès lors, qu'en l'état de l'instruction, il ressortait des pièces du dossier que la requête au fond du préfet contre cette décision n'était pas recevable ; que, dès lors, la commune de Marseillan et la société Centrale Solaire du Lido sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le premier juge a ordonné la suspension de l'exécution du permis de construire du 29 mai 2015 et qu'elles sont fondées, pour ce motif, à demander l'annulation de ladite ordonnance et le rejet des conclusions à fin de suspension présentées par le préfet de l'Hérault devant le tribunal administratif ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Marseillan et la société Centrale Solaire du Lido et non compris dans les dépens ;
O R D O N N E :
Article 1er : L'ordonnance du 11 janvier 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est annulée.
Article 2 : Les conclusions à fin de suspension de l'exécution de l'arrêté du 29 mai 2015 du maire de la commune de Marseillan présentées par le préfet de l'Hérault devant le tribunal administratif de Montpellier sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Centrale Solaire du Lido et la commune de Marseillan sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Centrale Solaire du Lido, à la commune de Marseillan et à la ministre de l'égalité des territoires, du logement et de la ruralité.
Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault.
Fait à Marseille, le 11 février 2016.
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N° 16MA00185, 16MA00261