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14/01/2016 | FRANCE | N°15MA01193

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 janvier 2016, 15MA01193


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande tendant au premier renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algérie.

Par un jugement n° 1405610 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 ma

rs 2015, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande tendant au premier renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algérie.

Par un jugement n° 1405610 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2015, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 23 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire l'autorisant à travailler dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte, passé ce délai, d'une somme de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de sa situation dans le délai de quinze jours courant à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte, passé ce délai, de 100 euros par jour de retard et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me A..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

. sur la décision de refus de séjour :

- le préfet s'est fondé à tort sur les stipulations du 3) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; la décision est par suite entachée d'erreur de droit ;

- la décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; outre le foyer qu'il entendait fonder avec son épouse, il dispose de l'essentiel de sa fratrie en France ; depuis son entrée en France, il a exercé une activité professionnelle ; il est par ailleurs atteint d'une maladie de la cornée et a bénéficié de greffes ; il justifie de son intérêt de se maintenir en France dès lors qu'il y bénéficie de soins adaptés ;

. sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision encourt l'annulation du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet n'a pas pris en compte sa vie personnelle, familiale et professionnelle et n'a pas apprécié les conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ; les moyens soulevés à l'encontre de la décision portant refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français doivent être appréciés distinctement, ce que n'a pas fait le préfet ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet ne lui a pas accordé une prolongation du délai de départ volontaire ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet qui ne justifie pas avoir examiné sa situation au regard d'un délai éventuellement supérieur s'est cru lié par les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire, enregistré le 10 juin 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination est suffisamment motivé ;

- la communauté de vie n'existant plus avec son épouse, le requérant, qui a d'ailleurs introduit une demande en divorce, ne peut bénéficier du renouvellement de plein droit de son titre de séjour dont il était titulaire en qualité de conjoint d'une ressortissante française dans le cadre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que l'erreur commise dans la rédaction de cet arrêté est sans incidence ;

- le requérant ne peut se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une décision en date du 3 février 2015, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Sur sa proposition, le rapporteur public, désigné par le président de la cour en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du même code par le président de la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Markarian.

1. Considérant que M. B..., de nationalité algérienne et né le 14 mars 1976, est entré régulièrement en France le 25 avril 2012 et a bénéficié en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française d'un titre de séjour valable du 15 mai 2012 au 14 mai 2013 ; que sa demande tendant au premier renouvellement de ce titre, présentée le 26 juin 2013, a été rejetée par le préfet des Bouches-du-Rhône par une décision en date du 24 juillet 2014 assortie d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. B... relève appel du jugement du 23 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que le préfet des Bouches-du-Rhône vise dans la décision attaquée la première demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B... en qualité de conjoint de français ; que ce premier renouvellement étant conditionné par la persistance de la communauté de vie entre les époux, dont il est constant qu'elle a cessé en l'espèce entre le requérant et son épouse de nationalité française, le préfet a bien entendu refusé ce premier renouvellement sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien, se référant à la suite d'une erreur de plume sans incidence sur la légalité de la décision attaquée aux stipulations du 3) de cet article au lieu de celles du 2) et lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour de dix ans sur le fondement du a) de l'article 7 bis du même accord ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la présence de M. B... sur le territoire français, entré en France le 25 avril 2012 à l'âge de trente-six ans, était récente à la date du refus de séjour qui lui a été opposé ; qu'il ne justifie plus, par ailleurs, d'une communauté de vie avec son épouse de nationalité française et se trouve sans enfant ; qu'ainsi et nonobstant la circonstance selon laquelle il aurait en France deux soeurs dont l'une l'héberge, qu'il aurait régulièrement exercé une activité professionnelle depuis son arrivée sur le territoire français et qu'il aurait subi des greffes de cornée nécessitant des soins, ce qu'il ne justifie pas au demeurant, la décision litigieuse ne peut être regardée comme portant au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que cette décision ne méconnaît pas, par suite, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. / II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;

6. Considérant que M. B... soutient que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas apprécié les conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle ; qu'à la date de l'arrêté litigieux, il était dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; que, dès lors que le refus de titre de séjour opposé à M. B... comportait les éléments de droit et de fait sur lesquels il était fondé et était, par suite, suffisamment motivé et que le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est expressément visé dans l'arrêté litigieux, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'appelait pas d'autre mention spécifique pour respecter l'exigence de motivation posée par le I de l'article L. 511-1 ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence d'examen de la situation personnelle de M. B... au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

7. Considérant, en second lieu, que les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...). Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. " ;

9. Considérant que M. B... fait valoir que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait dû lui octroyer un délai de départ volontaire d'une durée supérieure à trente jours ; que, toutefois, la possibilité d'accorder un délai supérieur à trente jours relève d'un pouvoir discrétionnaire de l'autorité administrative ; que M. B... n'établit pas avoir présenté à l'autorité administrative une demande en faisant état de circonstances propres à sa situation personnelle de nature à justifier l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ; que le requérant ne peut dès lors prétendre que le préfet des Bouches-du-Rhône se serait cru lié en fixant à trente jours le délai de départ volontaire ; que l'intéressé ne justifie pas de l'ancienneté de sa résidence en France ; que, dans ces conditions, eu égard à sa situation personnelle telle que retracée au point 4, la décision fixant le délai de départ volontaire à une durée de trente jours n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré à l'issue de l'audience du 17 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- Mme Markarian, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2016.

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N° 15MA01193 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01193
Date de la décision : 14/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : QUINSON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-01-14;15ma01193 ?
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