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15/12/2015 | FRANCE | N°14MA02962

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14MA02962


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2014 par le quel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 1400691 du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté, enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. B...un certificat de résidence por

tant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la no...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2014 par le quel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 1400691 du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté, enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. B...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement au profit de l'intéressé d'une somme de 700 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 juillet 2014 et le 10 octobre 2014, le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 10 juin 2014.

Il soutient que :

- son arrêté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco- algérien du 27 décembre 1968 ;

- M. B...ne démontre pas avoir constitué des liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables sur le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2014, M.B..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation des décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer le titre de séjour sollicité sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie de sa présence continue en France depuis plus de dix ans et peut bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien.

- le défaut de saisine de la commission du titre de séjour vicie la procédure d'instruction de sa demande ;

- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. Guidal, président, a été entendu en son rapport au cours de l'audience publique :

1. Considérant que, par arrêté du 16 janvier 2014, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé l'admission au séjour de M. A...B..., ressortissant algérien et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité ; que le préfet des Alpes-Maritimes relève appel du jugement du 10 juin 2014 du tribunal administratif de Nice en tant que, par ce jugement, celui-ci a prononcé l'annulation de cet arrêté, lui a enjoint de délivrer à M. B...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'État le versement à l'intéressé de la somme de 700 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il doit être regardé comme demandant l'annulation des articles 1er à 3 du jugement qui seuls lui sont défavorables ;

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré en France le 8 juillet 2001 sous couvert d'un visa de court séjour ; que s'il soutient y résider depuis lors, les pièces qu'il produit à l'appui de ses allégations ne suffisent pas, à elles seules, à établir l'existence d'une résidence habituelle sur le territoire national durant plus de dix ans au sens des stipulations précitées ; qu'en particulier, il ne produit que quatre ordonnances médicales pour l'année 2004, quelques courriers de la Société générale, un relevé de codevi du mois de mai 2005 retraçant une seule opération, la copie d'un chèque établi à son nom et une attestation de dépôt d'un pli postal daté du 16 février 2005 pour l'année 2005, qui, à eux seuls, ne sauraient établir le caractère habituel de la présence de l'intéressé en France au cours de la période en cause ; que, par ailleurs, il ne produit aucun justificatif pour la période courant de mai 2005 à mars 2006, ainsi que pour celle de plus d'un an d'octobre 2008 à novembre 2009 ;

4. Considérant que c'est dès lors à tort que les premiers juges ont, pour annuler l'arrêté du 16 janvier 2014, estimé que M. B...établissait de façon suffisante sa résidence continue en France depuis le mois de mars 2003 et que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaissait, pour ce motif, les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...tant en première instance qu'en appel ;

Sur les autres moyens invoqués contre l'arrêté du 16 janvier 2014 du préfet des Alpes-Maritimes :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;

7. Considérant que M.B..., qui soutient qu'il a établi en France le centre de ses intérêts privés et familiaux, se prévaut de la durée de son séjour en France et de sa bonne insertion économique et sociale ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que son épouse et ses enfants résident en Algérie et qu'il ne justifie pas de l'existence de liens familiaux en France ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, le requérant ne démontre pas résider de manière habituelle en France depuis 2001 ; que, dans ces conditions, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a ainsi méconnu, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 7 ci-dessus que M. B...n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par suite, le préfet des Alpes-Maritimes n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M.B... ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Nice a, d'une part, annulé son arrêté du 16 janvier 2014, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" et, enfin, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 700 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à demander, en conséquence, l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par M. B...devant ce tribunal ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M.B... :

11. Considérant que, par le présent arrêt, la Cour rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B...devant le tribunal administratif ainsi que devant elle ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à M. B...d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 1er à 3 du jugement n° 1400691 du 10 juin 2014 du tribunal administratif de Nice sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nice et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02962
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-15;14ma02962 ?
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