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15/12/2015 | FRANCE | N°13MA03437

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 13MA03437


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du préfet du Gard en date du 9 novembre 2010 portant approbation du plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Alès en tant qu'il classait sa parcelle bâtie, 10 rue Jean- Baptiste Lulli, cadastrée BS 392, en zone inondable.

Par un jugement n° 1100169 du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Nîmes a fait droit à la demande de M. A...et a annulé l'arrêté du 9 novembre 2010 en tant qu'il procédait au

classement de cette parcelle en zone inondable.

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du préfet du Gard en date du 9 novembre 2010 portant approbation du plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Alès en tant qu'il classait sa parcelle bâtie, 10 rue Jean- Baptiste Lulli, cadastrée BS 392, en zone inondable.

Par un jugement n° 1100169 du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Nîmes a fait droit à la demande de M. A...et a annulé l'arrêté du 9 novembre 2010 en tant qu'il procédait au classement de cette parcelle en zone inondable.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et des mémoires, enregistrés le 14 août 2013, le 14 octobre 2013 et le 29 septembre 2014, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 juin 2013 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le même tribunal.

Il soutient que :

- que le classement de la parcelle litigieuse en zone inondable soumise à un aléa fort n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- que les critères de distinction retenus pour procéder au classement de cette parcelle ne méconnaissent pas le principe d'égalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2014, M.A..., représenté par Me C..., conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 5 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 septembre 2014, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2014.

Un mémoire présenté par Me C...pour M. A...a été enregistré le 9 octobre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant M.A....

1. Considérant que le préfet du Gard, par arrêté en date du 9 novembre 2010, a approuvé le plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) de la commune d'Alès, lequel a classé la parcelle bâtie cadastrée BS 392, appartenant à M.A..., en zone inondable soumise à un aléa fort ; que par un jugement du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté du 9 novembre 2010 en tant qu'il procédait au classement de cette parcelle, estimant que ce classement était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissait le principe d'égalité ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " L'État élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II.-Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) / V.-Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités. / VI.-Les plans de prévention des risques d'inondation sont compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions du plan de gestion des risques d'inondation défini à l'article L. 566-7. / VII.-Des décrets en Conseil d'Etat définissent en tant que de besoin les modalités de qualification des aléas et des risques, les règles générales d'interdiction, de limitation et d'encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité, ainsi que d'information des populations, dans les zones exposées aux risques définies par les plans de prévention des risques naturels prévisibles. (...). ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le PPRI litigieux a entendu distinguer les zones exposées aux risques, dites " zone de danger ", comprenant notamment les zones d'aléa fort (F), correspondant à des secteurs résidentiels ou d'activités où il convient de ne pas augmenter les enjeux (population, activités) tout en permettant l'évolution du bâti existant, notamment pour en réduire la vulnérabilité ; qu'à cette fin, ces catégories de terrain sont classées en " zone rouge " du PPRI, définie par ce document comme des zones de l'enveloppe hydro géomorphologique où la hauteur d'eau pour la crue de référence, qui est celle de 2002, est supérieure à 0, 50 mètre ; qu'en zone rouge, les constructions nouvelles à usage d'habitation sont interdites et les extensions des constructions existantes limitées ;

4. Considérant, en premier lieu, que la parcelle bâtie de M. A...est située dans le lotissement du Mas des pins, au droit de la rue Jean-Baptiste Lulli à proximité du cours d'eau Le Rieu, dont le lit traverse le site, par endroit en souterrain ; qu'il ressort de la carte des aléas établie à partir d'une étude hydraulique que la crue de référence a atteint la cote d'eau de 145, 60 mètres par rapport au nivellement général de la France (NGF) au droit de cette parcelle ; que les levés topographiques réalisés dans le cadre du PPRI donnent pour cette même parcelle des cotes de terrain naturel comprises entre 144, 61 mètres et 144, 62 mètres ; qu'il s'en déduit que la parcelle où est localisé l'intéressé est susceptible d'être submergée par environ 1 mètre d'eau par débordement du Rieu ; que, d'une part, si M. A...conteste que sa parcelle aurait été significativement inondée lors de la crue de 2002, l'expertise qu'il produit, établie à sa demande, ne prend pas en compte ces cotes et donc la topographie, repose essentiellement sur des constatations opérées lors d'évènements pluvieux postérieurs à celui de 2002 et est bien moins complète que la modélisation mise en oeuvre pour le PPRI ; qu'elle ne permet pas ainsi d'établir le bien fondé de ses allégations ; que, d'autre part, une marge d'incertitude s'attache nécessairement aux prévisions quant aux inondations qui résulteraient d'un événement de même ampleur, eu égard en particulier aux changements de circonstances intervenus depuis 2002 ; qu'enfin, la limitation stricte de l'urbanisation et de l'accroissement de la vulnérabilité des biens dans les zones inondables présente un caractère d'intérêt général et justifie que puissent être déclarées inconstructibles ou enserrées dans des règles de constructibilité limitée, des zones présentant un niveau d'aléa fort ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le classement en zone rouge de la parcelle bâtie appartenant à M. A...était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant, en second lieu, que le tribunal a estimé que le plan litigieux méconnaissait le principe d'égalité au motif qu'ont été classées en zone d'aléa modéré des parcelles mitoyennes de celle appartenant à M. A...qui, situées en contrebas de son terrain, en recevaient par écoulement les eaux de transit, alors que le préfet n'établissait pas la particularité de la topographie des lieux justifiant un tel traitement différencié ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la cote d'eau modélisée par le PPRI d'Alès varie dans le secteur concerné de l'amont vers l'aval de 146, 87 mètres NGF à 146, 62 mètres NGF, alors que la topographie du terrain naturel varie de 145, 95 mètres NGF à l'amont jusqu'à 146, 20 mètres à l'aval ; qu'il s'en déduit une hauteur d'eau de 0, 92 mètre à l'amont et de seulement de 0, 42 mètre à l'aval ; que le zonage opéré a, en l'espèce, tenu compte de manière cohérente de la modélisation de l'aléa ; que notamment, il ne ressort pas des pièces du dossier que les terrains situés à proximité de celui de M. A...et classés en zone bleu seraient soumis, comme celui de l'intéressé classé en zone rouge, à des hauteurs d'eau d'environ un mètre ; qu'ainsi, le critère de distinction retenu des zones bleu et rouge, qui est adapté à l'objectif de prévention des risques d'inondation poursuivi par le plan et qui n'est pas entaché de disproportion manifeste, ne méconnaît pas le principe d'égalité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du préfet du Gard en date du 9 novembre 2010 portant approbation du plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Alès, le tribunal administratif de Nîmes s'est fondé sur les deux motifs analysés aux points 4 et 5 ci-dessus ;

7. Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Nîmes et devant la Cour ;

8. Considérant, en premier lieu, que si M. A...soutient que des erreurs matérielles affectent les documents graphiques et que des imprécisions affectent le projet soumis à enquête, son moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes qui permettraient d'en apprécier le bien fondé ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A...soutient que les cotes des plus hautes eaux telles que retenues par le plan ne seraient pas basées sur des cotes altimétriques réelles, il ressort du rapport de présentation du plan de prévention des risques d'inondation du Gardon d'Alès, que pour déterminer l'intensité de l'aléa à prendre en compte pour le risque d'inondation en prévention duquel ont été arrêtées les dispositions du plan, la ligne de crue a été reconstituée, par la combinaison d'une approche historique et d'une approche hydro-géomorphologique, complétée par une modélisation hydraulique des crues établis sur la base de calculs de débits d'écoulement des eaux et de données topographiques ; que cette modélisation hydraulique a eu pour objet de simuler les écoulements pour la crue de référence et de caractériser ainsi les cotes d'inondation au droit de chaque profil ; qu'en fixant cette méthodologie et en qualifiant l'aléa de référence par rapport à une crue d'occurrence centennale dont il est établi, par les données collectées et les études menées, que la survenance n'est pas dénuée de probabilité, les autorités préfectorales n'ont pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 562-1 du code de l'environnement ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du préfet du Gard en date du 9 novembre 2010 portant approbation du plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Alès en tant qu'il classait la parcelle bâtie, cadastrée BS 392, appartenant à M. A..., en zone inondable soumise à un aléa fort ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. A...demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens, soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 juin 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à M.A....

Copie en sera adressé au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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N° 13MA03437

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03437
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. Divers régimes protecteurs de l`environnement. Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ABESSOLO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-15;13ma03437 ?
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