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30/11/2015 | FRANCE | N°14MA01124

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2015, 14MA01124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Rognac a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner solidairement la société Campenon Bernard Méditerranée, M. B...H..., la société Polybatic, la société Socotec, la société Soper France, la société Etanchéité 13, la société MABTP, la société MAF, le cabinet d'expertise Clé Provence à lui verser la somme de 100 000 euros, sous réserve de l'estimation supérieure par l'expert désigné par le président du tribunal.

Par un jugement n°s 0902419 et 1206311

du 23 décembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a notamment condamné in solidum M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Rognac a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner solidairement la société Campenon Bernard Méditerranée, M. B...H..., la société Polybatic, la société Socotec, la société Soper France, la société Etanchéité 13, la société MABTP, la société MAF, le cabinet d'expertise Clé Provence à lui verser la somme de 100 000 euros, sous réserve de l'estimation supérieure par l'expert désigné par le président du tribunal.

Par un jugement n°s 0902419 et 1206311 du 23 décembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a notamment condamné in solidum M. H...et la société Campenon Bernard Sud Est à verser à la commune de Rognac la somme de 114 098,40 euros toutes taxes comprises au titre des désordres affectant les enduits de façade et la société Campenon Bernard Sud Est à verser à la commune de Rognac la somme de 23 920 euros toutes taxes comprises au titre des désordres affectant la membrane d'étanchéité de la toiture. Le jugement a également condamné M. H...à relever et garantir la société Campenon Bernard Sud Est de la condamnation à hauteur de 57 049,20 euros et 6 389,47 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 mars 2014, la société Campenon Bernard Sud Est, venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée, représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 23 décembre 2013 ;

2°) de rejeter les conclusions de la commune de Rognac dirigées contre elle ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le maître d'oeuvre à la garantir entièrement des condamnations prononcées à son encontre en ce qui concerne les enduits, et condamner le maître d'ouvrage à la garantir en ce qui concerne les infiltrations ;

4) de limiter la somme à laquelle elle a été condamnée aux 2/8 du préjudice soit 9 568 euros TTC ;

5) de mettre les frais d'expertise à la charge des succombants ;

6) de condamner la commune de Rognac à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle soutient que :

- les conditions d'engagement de sa responsabilité sur le fondement de la responsabilité décennale ne sont pas réunies ;

- les désordres étaient apparents à la réception ;

- le maître d'oeuvre est entièrement responsable des désordres relatifs aux enduits, et la commune est responsable des six huitièmes des désordres dus aux infiltrations.

Par un mémoire enregistré le 15 septembre 2014, la commune de Rognac, représentée par MeA..., conclut au rejet de l'appel et à ce que la société Campenon Bernard Sud Est soit condamnée à lui verser une somme de 5 000 euros au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la société ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 16 septembre 2015, M.H..., représenté par Me E..., conclut à sa mise hors de cause, à la réduction des indemnités allouées par le tribunal, et à ce qu'il soit garanti par la société Campenon Bernard Sud Est.

Il soutient que :

- pour les enduits, les désordres ne sont pas décennaux, et seule la responsabilité de l'entreprise peut être recherchée ;

- l'architecte n'a pas rédigé les CCTP ;

- les infiltrations relèvent d'un défaut d'entretien et pas de conception ;

- les condamnations sont trop élevées ;

- le quantum de responsabilité est trop élevé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné M. C...Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Moussaron, président de la 6e chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., pour la commune de Rognac, et de MeG..., pour M.H....

1. Considérant que la commune de Rognac a, par un marché conclu le 1er juillet 1999, confié le lot n° 1 " gros oeuvre, charpente métallique, second oeuvre " des travaux d'aménagement et d'extension du centre d'animation municipal " Georges Batiget " à la société Campenon Bernard Méditerranée, aux droits de laquelle est venue la société Campenon Bernard Sud Est, sous la direction de M.H..., architecte, de la société Polybatic, bureau d'études structure, et de la société Socotec, bureau de contrôle ; qu'une partie des travaux objet du lot n° 1 a été sous-traitée par la société Campenon Bernard Sud Est à la société Soper France, chargée des enduits de façade, et à la société Etanchéité 13, chargée des travaux d'étanchéité de la toiture ; que la réception a été prononcée le 13 novembre 2000 avec des réserves qui ont été levées le 15 octobre 2001 ; que des désordres sont apparus en 2004 affectant l'étanchéité et les enduits de façade qui se sont aggravés par la suite, provoquant des décollements et des chutes d'enduit sur la voie publique ; que, par un jugement n°s 0902419 et 1206311, le tribunal administratif de Marseille a notamment condamné in solidum M. H...et la société Campenon Bernard Sud Est à verser à la commune de Rognac la somme de 114 098,40 euros toutes taxes comprises au titre des désordres affectant les enduits de façade et la société Campenon Bernard Sud Est à verser à la commune de Rognac la somme de 23 920 euros toutes taxes comprises au titre des désordres affectant la membrane d'étanchéité de la toiture ; que le jugement a également condamné M. H...à relever et garantir la société Campenon Bernard Sud Est de la condamnation à hauteur de 57 049,20 euros ; que la société Campenon Bernard Sud Est relève appel de ce jugement ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant que les désordres constatés sont de deux types distincts ; que le premier désordre porte sur l'enduit hydraulique des façades Sud et Est du centre d'animation municipal " Georges Batiget " affecté de défauts d'adhérence provoquant des décollements et des chutes d'enduit sur la voie publique ; que le défaut d'étanchéité provoqué par le défaut d'adhérence n'a pas de conséquences sur les façades, mais uniquement sur les enduits ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les chutes d'enduit aient provoqué des risques pour les personnes, agents et usagers, fréquentant le bâtiment et ses abords, ni que les abords auraient dû faire l'objet de mesures de protection particulières ; que le décollement de cet enduit monocouche qui n'a pas provoqué d'infiltrations au bâtiment, n'a donc pas été de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et n'a pas porté atteinte à sa solidité ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Campenon Bernard et M. H..., dont l'appel provoqué est recevable dès lors que la cour fait en partie droit à l'appel principal et aggrave ainsi sa situation, sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif les a condamnés à réparer les désordres affectant les enduits de façade à hauteur de 95 400 euros HT, soit 114 098,40 euros TTC ;

4. Considérant que le second désordre consiste en des infiltrations d'eau à l'intérieur du bâtiment du fait de défauts affectant le complexe d'étanchéité situé au niveau de la toiture terrasse ; que ces désordres sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; que, par suite, les désordres engagent la responsabilité des constructeurs auxquels ils sont imputables, sur le fondement des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs ; qu'il résulte de l'instruction, que comme l'a jugé le tribunal, ces désordres sont imputables pour partie à la société Campenon Bernard Sud Est, et pour partie à la commune de Rognac ; que si le tribunal a indiqué que " ces désordres sont dus, pour six zones sur huit, à un défaut d'entretien imputable à la commune de Rognac, maître de l'ouvrage ", cette inexactitude ne résulte que d'une erreur de plume ; qu'en effet, c'est à bon droit, dès lors qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la responsabilité de la société était engagée pour trois des huit désordres constatés que le tribunal a jugé " que 3/8 du dommage est imputable à la commune de Rognac et que 5/8ème est imputable à la société " ; que la société n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à réparer les 5/8 des désordres, ni à demander à être entièrement garantie par la commune ;

5. Considérant que M. H...échappant aux termes du présent arrêt à toute condamnation, il y a lieu de modifier la répartition opérée par le tribunal, et de mettre à la charge exclusive de la société Campenon Bernard Sud Est les dépens constitués par les frais d'expertise, liquidés et taxés à hauteur de 18 255,63 euros TTC par l'ordonnance n° 0902418/1004940 du président du tribunal administratif de Marseille en date du 8 juin 2011 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 4 du jugement mettant à la charge solidaire de la société Campenon Bernard et de M. H...une somme de 114 098,40 euros, l'article 7 qui condamne M. H...à relever et garantir la société Campenon Bernard Sud Est de la condamnation de 57 049,20 euros et l'article 8 qui met une partie des dépens à la charge de M.H..., doivent être annulés ; qu'il y a lieu de réformer l'article 6 du jugement qui condamne M. H...à garantir la société Campenon Bernard des condamnations aux dépens et l'article 10 du jugement en tant qu'il a condamné M. H...à verser solidairement une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit à la demande de la commune de Rognac fondée sur ces dispositions ; qu'il y a lieu, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de condamner la commune de Rognac à verser à la société Campenon Bernard Sud Est la somme de 2 000 euros et une somme de 2 000 euros à M. H...;

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 4, 7 et 8 du jugement susvisé du 23 décembre 2013 sont annulés.

Article 2 : L'article 6 du jugement est annulé en tant qu'il met à la charge de M. H...une somme de 18 244,63 euros (dix-huit mille deux cent quarante-quatre euros et soixante-trois centimes) au titre des dépens et l'article 10 du jugement est annulé en tant qu'il condamne M. H... à verser une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La commune de Rognac versera une somme de 2 000 (deux mille) euros à la société Campenon Bernard Sud Est et une somme de 2 000 (deux mille) euros à M.H..., au titre des frais non compris dans les dépens.

Article 4 : Le jugement susvisé du 23 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rognac, à la société Campenon Bernard Sud Est, et à M. B...H....

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Marcovici , président,

- Mme Héry, premier conseiller,

- M. Ouillon, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 novembre 2015.

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N° 14MA01124


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01124
Date de la décision : 30/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : BLUM - ENGELHARD - DE CAZALET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-30;14ma01124 ?
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