La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2015 | FRANCE | N°14MA02101

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 26 novembre 2015, 14MA02101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Les Deux B a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 et la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1204317 du 18 février 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge.

Procédu

re devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2014, la SARL Les Deux B, représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Les Deux B a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 et la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1204317 du 18 février 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2014, la SARL Les Deux B, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 février 2014 ;

2°) de prononcer la décharge demandée.

Elle soutient que :

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires dite des vins n'est pas adaptée à un établissement de restauration rapide dans lequel la consommation de vin s'effectue au bar et propose la méthode basée sur la consommation de pain ;

- un abattement sur le chiffre d'affaires de 15 à 20 % doit être pris en compte pour la baisse de fréquentation de l'établissement due aux travaux d'aménagement du tramway ainsi qu'une réfaction au prorata de la durée de fermeture administrative de l'établissement en 2007 ;

- l'intention délibérée d'éluder l'impôt n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2014, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la société n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution du chiffre n'est pas appropriée ;

- à défaut de pièces justificatives, la requérante ne justifie pas de la pertinence de la méthode basée sur la consommation de pain ;

- le moyen tiré de la prise en compte d'éléments factuels est inopérant ;

- le bien-fondé des pénalités est démontré.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Les Deux B, qui exerce à Marseille une activité de débit de boissons-brasserie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ; que le service, après avoir rejeté la comptabilité de la société, a procédé à une reconstitution des recettes et des résultats déclarés ; que le vérificateur a, par suite, rectifié le résultat imposable de la SARL Les Deux B au titre de l'impôt sur les sociétés pour les années 2007 et 2008 et procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ; que la société interjette appel du jugement du 18 février 2014, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de ces impositions ainsi que des pénalités qui les ont assorties ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve et le rejet de la comptabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration démontre que la comptabilité produite par la société n'est pas régulière, compte tenu de l'absence de pièces justificatives de recettes pour la période considérée et de la découverte en cours de contrôle d'achats non déclarés et non comptabilisés ; que ces irrégularités constituent des motifs suffisants de rejet de comptabilité ; que la société requérante ne conteste d'ailleurs pas le caractère non probant de sa comptabilité au titre des années en litige ; que, dès lors, c'est à bon droit qu'après avoir écarté la comptabilité comme non probante, l'administration a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société ;

4. Considérant que le litige n'ayant pas été soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et la société requérante n'ayant pas accepté les rectifications proposées, il appartient à l'administration d'apporter la preuve du bien-fondé de ces rectifications ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

5. Considérant que, pour reconstituer les recettes de l'établissement exploité par la société requérante, le vérificateur a utilisé à titre principal la méthode dite " des vins ", qui consiste à déterminer le pourcentage des vins à partir d'un échantillon de notes dans le chiffre d'affaires global et à reconstituer le chiffre d'affaires de chacun des exercices en appliquant le coefficient global obtenu aux achats de vins revendus après prise en compte des pertes, des offerts et de la consommation du personnel et des dirigeants ; que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires " snack " de l'établissement à partir des achats de revendus de liquides, soit le vin ; que la société n'ayant pas présenté sur la période vérifiée les doubles des notes de table, le service a par suite utilisé l'échantillon de cent trois notes de tables présenté par le contribuable ; que la méthode retenue a consisté à déterminer les ventes de vin théoriques à partir des factures d'achats de vin des fournisseurs et à déterminer le pourcentage des ventes de vin par rapport aux ventes de solides dans l'échantillon des notes de tables ; que le service a calculé un pourcentage de ventes de vins dans l'échantillon de cent trois notes de 7,2 % et a ensuite déterminé la recette globale du restaurant en partant dudit pourcentage ; que, si la société requérante allègue sans le justifier par des indices précis et concordants, que la méthode de reconstitution utilisée par l'administration est inadaptée dès lors que la consommation de vin au comptoir serait désormais plus fréquente du fait d'un phénomène de mode, l'administration fiscale lors de son contrôle a relevé à bon droit que le vin consommé dans l'établissement, lequel est une brasserie et non un bar à vins, est principalement constitué de vin de table ; que la société requérante propose, par ailleurs, une estimation de la consommation de pain à raison d'une baguette pour trois repas comme méthode alternative ; que, toutefois, la société ne justifie pas des quantités de pain par repas ni du rapport retenu entre le chiffre d'affaires pour le pain et le chiffre d'affaires total ; qu'enfin, la société requérante soutient que le chiffre d'affaires reconstitué est exagéré dès lors que n'ont pas été pris en compte des événements factuels tels que la baisse de fréquentation induite par la fermeture administrative de l'établissement en 2007 et les travaux du tramway en 2007 et 2008 ; que l'administration fiscale indique toutefois sans être sérieusement contestée que le chiffre d'affaires total de chacun des exercices a été reconstitué sur la base des achats revendus réels constatés au cours de ces périodes et non à partir d'une estimation du volume de la clientèle ; que, dès lors, la méthode alternative proposée par la requérante doit être regardée dans cette mesure comme trop sommaire et comme ne permettant pas de déterminer le chiffre d'affaires de la période en litige avec une meilleure approximation que celle de l'administration ;

6. Considérant, par suite, que la méthode de reconstitution utilisée par l'administration n'étant ni excessivement sommaire, ni radicalement viciée, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve dont elle a la charge du bien-fondé de la reconstitution du chiffre d'affaires de l'activité de l'établissement et, par suite, des impositions en litige ;

Sur l'application des pénalités :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré " ;

8. Considérant que, compte tenu du caractère irrégulier et non probant de la comptabilité de la société requérante, en particulier de l'absence de pièces justificatives des recettes et de leur globalisation, ainsi que de l'importance et de la répétition des minorations de recettes, soit 120 % en 2007 et 58 % en 2008, et du constat d'achats non déclarés et non comptabilisés sur la période vérifiée, alors que la société n'établit pas que les résultats reconstitués ne seraient pas cohérents avec les conditions réelles de son activité, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe, de la volonté délibérée de la société d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration prévue par les dispositions précitées ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Les Deux B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Les Deux B et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.

''

''

''

''

N° 14MA02101 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02101
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : AGOPIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-26;14ma02101 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award