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24/11/2015 | FRANCE | N°13MA02174

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 24 novembre 2015, 13MA02174


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et de leur accorder le bénéfice du sursis de paiement.

Par un jugement n°1104882 du 7 mars 2013, le tribunal administratif de Montpellier a déchargé M. et Mme B...de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 à raison du produit du rachat de contra

ts d'assurance-vie, à hauteur de la différence entre le taux d'imposition appliqué et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et de leur accorder le bénéfice du sursis de paiement.

Par un jugement n°1104882 du 7 mars 2013, le tribunal administratif de Montpellier a déchargé M. et Mme B...de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 à raison du produit du rachat de contrats d'assurance-vie, à hauteur de la différence entre le taux d'imposition appliqué et le taux de 7,5 % prévu par l'article 125-0 A du code général des impôts, et rejeté les conclusions tendant au bénéfice du sursis de paiement.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés le 30 mai 2013 et le 10 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 mars 2013 ;

2°) de rétablir à la charge de M. et Mme B...la cotisation d'impôt sur le revenu de l'année 2010 à concurrence de la somme de 13 918 euros ;

3°) de réformer en ce sens le jugement entrepris.

Il soutient que :

- son recours est recevable, dès lors qu'il dispose d'un délai global de quatre mois pour saisir la cour administrative d'appel, lequel est justifié par les nécessités particulières de fonctionnement de l'administration fiscale ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts, qui prévoit que l'option pour le prélèvement libératoire prévu à l'article 125 A du code est exercée au plus tard lors de l'encaissement des revenus, ajoute illégalement aux dispositions législatives de l'article 125 A, le législateur ayant implicitement fixé le terme du délai d'option au moment du paiement de ces revenus en mettant à la charge d'un tiers tenu au paiement la collecte du prélèvement ;

- M. et Mme B...ne contestent pas ne pas avoir opté pour le prélèvement libératoire avant l'encaissement des sommes correspondant au rachat de contrats d'assurance-vie auquel ils ont procédé en 2010.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2013, M. B..., représenté par Me C..., conclut au rejet du recours et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le recours est tardif, dès lors que les dispositions de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales, qui augmentent la durée du délai d'appel au bénéfice de l'administration fiscale, créant ainsi une rupture d'égalité non justifiée, ne peuvent s'appliquer.

- les autres moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que le ministre des finances et des comptes publics relève appel du jugement en date du 7 mars 2013 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a déchargé M. et Mme B...de la cotisation primitive à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010, à raison du produit de rachats de contrats d'assurance-vie, à hauteur de la différence entre le taux appliqué et le taux de 7,5 % prévu par l'article 125-0 A du code général des impôts ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. B... au recours du ministre :

2. Considérant que le recours présenté par le ministre des finances et des comptes devant la Cour a été enregistré dans le délai d'appel de deux mois dont il dispose, à compter de l'expiration du délai de deux mois imparti au service local pour lui transmettre le jugement attaqué et le dossier de l'affaire, en vertu des dispositions de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales ; que ces dispositions tiennent compte des nécessités particulières du fonctionnement de l'administration fiscale qui la placent dans une situation différente de celle des autres justiciables, et justifient le délai complémentaire de deux mois accordé au ministre, délai dont les contribuables peuvent d'ailleurs, en provoquant eux-mêmes la signification du jugement au ministre, réduire la durée ; que lesdites dispositions ne confèrent pas au ministre, contrairement à ce que soutient M.B..., un privilège qui serait de nature à porter atteinte au principe d'égalité ; que M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations qui concernent l'amélioration des procédures administratives et le régime des décisions administratives et ne sont pas applicables aux décisions des juridictions administratives ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel du ministre ne peut qu'être écartée ;

Sur les conclusions du ministre :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 125-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. Les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation ainsi qu'aux placements de même nature souscrits auprès d'entreprises d'assurance établies en France sont, lors du dénouement du contrat, soumis à l'impôt sur le revenu (...) / II. Les dispositions de l'article 125 A, à l'exception des III à IV de cet article, sont applicables aux produits prévus au I. Le taux du prélèvement est fixé : / 1° Lorsque le bénéficiaire des produits révèle son identité et son domicile fiscal dans les conditions prévues au 4° du III bis de l'article 125 A : / (...) d. A 7,5 % lorsque cette durée a été égale ou supérieure à six ans pour les bons ou contrats souscrits entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1989 et à huit ans pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 1990 (...) " ; qu'aux termes de l'article 125 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. (...) les personnes physiques qui bénéficient d'intérêts, arrérages et produits de toute nature de fonds d'Etat, obligations, titres participatifs, bons et autres titres de créances, dépôts, cautionnements et comptes courants, peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu, lorsque la personne qui assure le paiement de ces revenus est établie en France (...) / Celui-ci est effectué par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus. / (...) VI. Les modalités et conditions d'application du présent article sont fixées par décret " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts : " Dans les cas autres que ceux prévus aux articles 41 duodecies C et 41 duodecies D le prélèvement ne doit être opéré par l'établissement payeur que si le bénéficiaire des revenus opte pour son assujettissement à ce prélèvement, dans les conditions définies au I et IV de l'article 125 A du code général des impôts. / L'option, qui est irrévocable, est exercée au plus tard lors de l'encaissement des revenus " ;

5. Considérant que les premiers juges ont estimé que les dispositions précitées de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts font obstacle à la possibilité offerte au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation et que les articles 125 A et 125-0 A du code n'ont ni prévu de date butoir pour l'exercice de l'option, ni expressément autorisé le pouvoir réglementaire à fixer un délai à peine de déchéance de ce droit d'option ;

6. Considérant toutefois qu'en application des dispositions précitées de l'article 125 A du code général des impôts, une faculté d'option est ouverte aux contribuables personnes physiques qui, pour l'imposition des revenus qu'elles visent, peuvent choisir de les intégrer dans leur revenu global annuel soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème progressif ou de les assujettir à un prélèvement forfaitaire libératoire de l'impôt sur le revenu ; que ce prélèvement est opéré à la source par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus, de sorte qu'il ne peut résulter que d'un choix exprimé par le bénéficiaire des produits au plus tard au moment de ce paiement ; que celui-ci ne peut exercer cette option ultérieurement, après l'encaissement des produits, pas plus qu'il ne saurait revenir sur son exercice éventuel, le caractère irrévocable de ces choix se justifiant par la nature de prélèvement à la source du prélèvement forfaitaire libératoire, laquelle implique que le contribuable se soit déterminé à la date d'encaissement des revenus, ainsi que par l'absence, dans le texte de la loi, de l'organisation d'une éventuelle restitution d'impôt dans le cas où le choix d'exercer l'option ou d'y renoncer serait postérieur au paiement des revenus des capitaux mobiliers ;

7. Considérant, par suite, que le pouvoir réglementaire, auquel le législateur a renvoyé le soin de fixer les modalités d'exercice du choix pour le prélèvement libératoire sur les revenus de placement a pu, par le second alinéa de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts, légalement donner à cette option un caractère irrévocable, conformément à l'article 125 A du code général des impôts, sans méconnaître les dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dès lors, d'une part, que ce caractère résulte du texte législatif lui-même et, d'autre part, que ce dernier n'institue pas au profit des contribuables un droit ou un avantage fiscal qui, sans qu'un texte réglementaire puisse y faire obstacle alors que le législateur ne l'aurait pas prévu, pourrait faire l'objet d'une demande ou d'une régularisation par voie de réclamation après l'expiration du délai fixé pour en solliciter le bénéfice, mais offre seulement une possibilité de choix entre des modalités d'imposition différentes pour certains revenus de placement ;

8. Considérant qu'il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les dispositions de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts ajoutent illégalement aux dispositions législatives du même code et que l'administration ne pouvait dans ces conditions opposer à M. et Mme B...la circonstance qu'ils n'avaient pas opté pour le prélèvement au plus tard lors de l'encaissement des revenus ; que, par conséquent, en l'absence d'autres moyens soulevés par les intimés devant le tribunal administratif ou la Cour, le ministre des finances et des comptes publics est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif a prononcé la décharge de la cotisation primitive à l'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme B...ont été assujettis au titre de l'année 2010, à raison du produit de rachats de contrats d'assurance-vie, à hauteur de la différence entre le taux appliqué et le taux de 7,5 % prévu par l'article 125-0 A du code général des impôts ; que, par suite, il y a lieu de faire droit aux conclusions du ministre tendant au rétablissement de M. et Mme B...au rôle de l'impôt sur le revenu de l'année 2010 pour un montant de 13 918 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1104882 du 7 mars 2013 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : M. et Mme B...sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010 à concurrence de la somme de 13 918 euros.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à M. et Mme A...B....

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Martin, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,

- Mme Chenal-Peter, premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 novembre 2015.

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N° 13MA02174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02174
Date de la décision : 24/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Produits des placements à revenus fixes.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : SCP DEL POSO - DENNEVE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-24;13ma02174 ?
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