Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. H...B...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 12 juillet 2011 par laquelle le maire de la commune de Porto-Vecchio a délivré un permis de construire tacite à la SARL Casa di Petra pour réaliser 26 logements au lieu-dit Foce Incesa à Piccovaggia.
Par un jugement n° 1200282 du 7 janvier 2014, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision susvisée et a mis à la charge de la SARL Casa di Petra une somme de 1 500 euros à verser à M. B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête enregistrée le 20 février 2014 sous le n° 14MA00826, complétée par des mémoires enregistrés les 29 juin 2015, 29 août 2015, et 11 et 14 septembre 2015, la SARL Casa di Petra, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 janvier 2014,
2°) de rejeter la demande de M.B...,
3°) et de mettre à la charge de tout succombant une somme de 10 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas rejeté la demande comme tardive et ont estimé que l'affichage régulier du permis de construire bordant une voie ouverte à la circulation publique n'était pas démontré avant le 20 octobre 2011 ;
- le permis de construire n'a pas été affiché sur la parcelle d'assiette du projet mais sur la parcelle n° 1004 en bordure de la route de Palombaggia, de façon continue à compter du 30 septembre 2011 comme l'attestent constats d'huissier et témoins, ce qui a déclenché le délai de recours des tiers ;
- M. B...avait au surplus connaissance du projet ;
- au regard de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, le projet situé en limite d'un espace déjà fortement urbanisé peut être considéré comme une extension de l'urbanisation en continuité, et constitue en tout état de cause contrairement à ce qu'a estimé le tribunal un hameau nouveau intégré à l'environnement de 26 maisons d'architectures typiques de la Corse ;
- l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme n'a pas été méconnu, le projet se trouvant en continuité des parties urbanisées de la commune dans le prolongement de plus de quarante maisons existantes ;
- le projet, caractérisé par un souci particulier d'insertion dans les espaces naturels et recouvrant moins de 10 % de la surface totale du terrain, ne constitue pas une urbanisation dispersée nuisant à la vocation des espaces naturels en violation de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme ;
- elle justifie bénéficier d'une servitude notariée d'une largeur de 4 mètres pour l'accès au terrain figurant sur les plans de masse du projet, et au demeurant non contestée par M. B..., sans que l'existence d'un débat devant le juge civil ait d'influence sur ce point ;
- le terrain dispose en outre d'autres voies d'accès pouvant constituer des voies secondaires ou de secours ;
- la plainte pour faux de M. B...contre le constat d'affichage établi par Me C...a été classée sans suite le 1er juin 2015 par le procureur de la République d'Ajaccio avec autorité de la chose jugée, et ce constat ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse sur la réalité de l'affichage le 30 septembre 2011.
Par des mémoires en défense enregistrés les 3 juillet 2014, 1er juin et 8 septembre 2015 M. H...B...représenté par Me G...demande à la Cour :
- de confirmer le jugement contesté,
- d'appliquer la procédure d'inscription de faux à certaines pièces produites par la partie adverse en application de l'article R. 633-1 du code de justice administrative,
- et de mettre à la charge de la SARL Casa di Petra une somme de 10 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la SARL Casa di Petra s'appuie sur un procès-verbal d'huissier du 30 septembre 2011 qui est doublement faux en tant qu'il constate un affichage du permis sur la parcelle d'assiette F 2739 et un affichage sur la parcelle n° 1004 à cette date ; une plainte a été déposée de ce fait ;
- la requérante se fonde sur des attestations de complaisance certifiant des faits matériellement inexacts, le permis n'ayant pas été affiché avant le 20 octobre 2011, et ces pièces doivent également faire l'objet de l'inscription de faux prévue par l'article R. 633-1 du code de justice administrative ;
- les pièces adverses n°s 40 et 41 qui procèdent à une dénonciation calomnieuse doivent également faire l'objet d'une inscription de faux ;
- sa demande de première instance n'était pas tardive, le pétitionnaire ne prouvant pas ainsi qu'il lui incombe la réalité de l'affichage du permis sur le terrain avant le 20 octobre 2011 de manière visible d'une voie ouverte à la circulation publique ;
- aucune connaissance acquise de sa part n'a fait courir le délai de recours contentieux ;
- les premiers juges ont annulé à juste titre le permis de construire en retenant quatre motifs d'annulation ;
- le projet ne peut constituer un hameau nouveau au sens donné à ce terme par la jurisprudence dès lors qu'aucun document d'urbanisme ne prévoit la possibilité d'en accueillir dans cette zone, et que le nombre et l'agencement des constructions ne peuvent être assimilées à un hameau ;
- le projet n'est pas situé en zone urbanisée ;
- la société pétitionnaire ne justifie d'aucun accord ni décision de justice lui reconnaissant un droit de passage pour l'accès prévu au projet ;
- le maire de la commune de Porto-Vecchio a d'ailleurs opposé un refus le 20 mars 2015 à la nouvelle demande de permis de construire formée par la SARL Casa di Petra pour méconnaissance de la loi littoral et du règlement national d'urbanisme ;
Un courrier du 7 août 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
II - Par une requête enregistrée le 7 mars 2014 sous le n° 14MA01119, complétée par des mémoires enregistrés les 11 avril et 22 mai 2014 et le 11 septembre 2015, la commune de Porto-Vecchio, représentée par MeF..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Bastia du 7 janvier 2014 ;
2°) de mettre à la charge de M. B...une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'un vice de forme dès lors qu'elle n'a pas été régulièrement convoquée à l'audience publique ;
- le recours de M. B...était tardif car le permis de construire a fait l'objet d'un affichage régulier sur la parcelle F n° 2739 visible depuis la voie publique, qu'il n'appartenait pas au tribunal de contester en écartant un constat d'huissier faisant foi jusqu'à inscription de faux ; le pétitionnaire n'était pas tenu d'apposer un autre panneau en bordure de la parcelle 1004, ce qu'il a fait en tout état de cause ;
- le projet, situé dans une zone urbanisée au sens de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme et du schéma d'aménagement de la Corse, et constituant un hameau nouveau intégré à l'environnement, ne méconnaissait pas ces dispositions ;
- le terrain d'assiette faisait partie des espaces actuellement urbanisés de la commune au sens des articles L. 111-1-2 et R. 111-14-1 du code de l'urbanisme, alors surtout que le permis a été délivré sur le fondement d'un plan local d'urbanisme opposable avant son annulation juridictionnelle ;
- le permis de construire étant délivré sous réserve des droits des tiers, les premiers juges ne pouvaient sans erreur de droit exiger du pétitionnaire la production de la servitude de passage dont elle se prévalait ;
- le permis de construire ayant été annulé par le jugement contesté, sa requête d'appel n'était pas soumise à l'obligation de notification prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
Par des mémoires en défense enregistrés les 15 juillet 2014 et 9 mai 2015, M. H... B...représenté par Me G...demande à la Cour :
- de rejeter la requête de la commune de Porto-Vecchio comme irrecevable,
- d'appliquer la procédure d'inscription de faux à certaines pièces produites par la partie adverse en application de l'article R. 633-1 du code de justice administrative,
- en toute hypothèse, de confirmer le jugement contesté du tribunal administratif,
- de mettre à la charge de la commune de Porto-Vecchio une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête de la commune est irrecevable faute d'avoir respecté la procédure de notification de l'appel prévue en ce cas par les dispositions de l'article R. 411-7 du code de justice administrative ;
- la société pétitionnaire s'appuie sur un procès-verbal d'huissier du 30 septembre 2011 qui est doublement faux en tant qu'il constate un affichage du permis sur la parcelle d'assiette F 2739, et un affichage sur la parcelle n° 1004 à cette date ; une plainte pénale a été déposée de ce fait ;
- la requérante se fonde sur des attestations de complaisance certifiant des faits matériellement inexacts, le permis n'ayant pas été affiché avant le 20 octobre 2011, et ces pièces doivent également faire l'objet de l'inscription de faux prévue par l'article R. 633-1 du code de justice administrative ;
- sa demande de première instance n'était pas tardive, le pétitionnaire ne prouvant pas ainsi qu'il lui incombe la réalité de l'affichage du permis sur le terrain avant le 20 octobre 2011 de manière visible d'une voie ouverte à la circulation publique ;
- aucune connaissance acquise de sa part n'a fait courir le délai de recours contentieux ;
- les premiers juges ont annulé à juste titre le permis de construire en retenant quatre motifs d'annulation ;
- le projet ne peut constituer un hameau nouveau au sens donné à ce terme par la jurisprudence dès lors qu'aucun document d'urbanisme ne prévoit la possibilité d'en accueillir dans cette zone, et que le nombre et l'agencement des constructions ne peuvent être assimilées à un hameau ;
- le projet n'est pas situé en zone urbanisée ;
- la société pétitionnaire ne justifie d'aucun accord ni décision de justice lui reconnaissant un droit de passage pour l'accès prévu au projet ;
- le maire de la commune de Porto-Vecchio a d'ailleurs opposé un refus le 20 mars 2015 à la nouvelle demande de permis de construire formée par la SARL Casa di Petra pour méconnaissance de la loi littoral et du règlement national d'urbanisme.
Un courrier du 7 août 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
III- Par une requête enregistrée le 29 juin 2015 sous le n° 15MA02623, la SARL Casa di Petra, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement susvisé du tribunal administratif de Bastia du 7 janvier 2014 ;
2°) de mettre à la charge de tout succombant une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conditions prévues par l'article R. 811-16 du code de justice administrative sont remplies ;
- les moyens invoqués contre le jugement contesté sont sérieux, la fin de non-recevoir qu'elle a opposée en première instance étant confortée par des éléments nouveaux ;
- l'exécution du jugement l'expose à une perte financière très importante, alors qu'elle consacrait son entière activité au programme immobilier en cause, que la construction de plusieurs maisons a été entamée avant l'annulation du permis de construire, que les travaux et les ventes ont été stoppés, qu'elle a dû recourir au licenciement économique, perdu plus de 4 millions d'euros de chiffre d'affaires entre 2013 et 2014 et enregistré une perte nette ;
Par un mémoire en défense enregistré le 29 octobre 2015, qui n'a pas été communiqué, M. B...conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SARL Casa di Petra une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SARL Casa di Petra a présenté un mémoire en réplique le 30 octobre 2015 après clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 92-129 du 7 février 1992 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 7 octobre 2015 pour l'instance n° 15MA02623 et par un avis d'audience portant clôture d'instruction immédiate adressé le même jour en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative pour les instances n° 14MA00826 et n° 14MA01119.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hameline,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- les observations de Me A...et de MeD..., représentant la SARL Casa di Petra, celles de Me E...substituant Me F...représentant la commune de Porto-Vecchio, et celles de Me G...représentant M.B.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier
1. Considérant que la SARL Casa di Petra a obtenu du maire de la commune de Porto-Vecchio le 12 juillet 2011 un permis de construire tacite valant division foncière pour édifier un ensemble de 26 maisons d'habitation représentant une surface hors oeuvre nette totale de 3 554 mètres carrés, sur un terrain cadastré F n° 2739 situé au lieu-dit Foce Incesa à Piccovaggia ; que, par jugement du 7 janvier 2014, le tribunal administratif de Bastia a annulé ce permis de construire à la demande de M. H...B...; que, par deux requêtes distinctes, la SARL Casa di Petra et la commune de Porto-Vecchio interjettent appel dudit jugement ; que la SARL Casa di Petra a ultérieurement formé une demande de sursis à exécution de ce même jugement ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les requêtes introduites par la SARL Casa di Petra et par la commune de Porto-Vecchio sous les numéros 14MA00826 et 14MA01119 tendent à l'annulation d'un même jugement du tribunal administratif de Bastia ; que la requête n° 15MA02623 introduite par la SARL Casa di Petra tend au sursis à exécution de ce même jugement ; que ces trois instances ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a, dès lors, lieu de les joindre et d'y statuer par un seul arrêt ;
3. Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel de la commune de Porto-Vecchio ;
Sur la régularité du jugement contesté :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative :
" Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience (...) " ; que par ailleurs, aux termes de l'article R. 431-1 du même code : " Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire. " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour que les parties à l'instance devant le tribunal administratif de Bastia ont été convoquées le 14 novembre 2013 à l'audience publique du 10 décembre 2013 et que la SELARL Cloix et Mendès-Gil, conseil de la commune de Porto-Vecchio, a accusé réception de cette convocation le 15 novembre 2013 ; que le moyen tiré de ce que l'absence de convocation de la commune à l'audience publique conformément aux dispositions précitées vicierait la procédure suivie devant les premiers juges doit, dès lors, être écarté ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance de M.B... :
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 " ; qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article A. 424-16 du même code : " Le panneau prévu à l'article A. 424-1 (1) indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. Il indique également, en fonction de la nature du projet : / a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel ; (...) " ; que l'article A. 424-18 du même code précise que : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier " ;
7. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'affichage du permis de construire sur le terrain d'assiette de la construction autorisée doit être effectué de telle façon que les mentions qu'il comporte soient lisibles de la voie publique ou, lorsque le terrain n'est pas desservi par une voie publique, d'un espace ouvert au public ; que lorsque le terrain d'assiette n'est pas desservi par une telle voie et que l'affichage sur le terrain ne pourrait, dès lors, satisfaire à cette exigence, seul un affichage sur un panneau placé en bordure de la voie publique ou de l'espace ouvert au public le plus proche du terrain fait courir le délai de recours contentieux à l'égard des tiers autres que les voisins qui empruntent la voie desservant le terrain pour leurs besoins propres ;
8. Considérant, d'autre part, qu'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées ;
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle cadastrée F n° 2739 d'assiette du projet était desservie, à la date de la décision en litige, par une voie publique ou ouverte au public à partir de laquelle des tiers pouvaient être en mesure d'accéder au panneau d'affichage ; qu'un affichage du permis de construire pouvait, dès lors, être régulièrement effectué sur une autre parcelle que le terrain d'assiette bordée par une voie publique ; que, cependant, si la SARL Casa di Petra soutient que le permis de construire tacite du 12 juillet 2011 a été affiché à une date indéterminée antérieure au 30 septembre 2011 sur une parcelle cadastrée n° 1004 appartenant à son gérant et située en bordure du chemin communal dénommé route de Palombaggia, elle n'en justifie pas, en se bornant à produire trois constats d'huissier successifs des 30 septembre, 28 octobre et 2 décembre 2011 qui attestent un affichage non sur cette parcelle mais sur le terrain d'assiette du projet cadastré F 2739 et, de manière contradictoire que celui-ci serait " visible et lisible de la route ", ainsi que diverses attestations de témoins qui, si elles concernent la parcelle n° 1004, ne sont précises ni sur la date exacte d'implantation d'un panneau d'affichage, ni pour la plupart sur le contenu de celui-ci qualifié de " panneau de chantier " dont la présence est relevée simultanément à celle de panneaux publicitaires du projet " Petra Suprana " ; qu'à l'inverse, M.B..., propriétaire de la parcelle F n° 2358 située immédiatement en aval du terrain d'assiette, a relevé dans un courrier adressé à la commune de Porto-Vecchio le 15 octobre 2011 faisant suite au démarrage des travaux qu'aucun permis n'était affiché à l'entrée du chantier, et indique pour sa part que le panneau d'affichage a été implanté sur la parcelle n° 1004 le 20 octobre 2011 seulement ; que, dans ces conditions, et ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la SARL Casa di Petra ne justifie pas de la réalité d'un affichage du permis de construire en litige conforme aux articles R. 600-2 et A. 424-18 précités à une date antérieure ; que la circonstance que l'huissier intervenu en 2011 à la demande de la société pétitionnaire ait indiqué à celle-ci le 11 octobre 2012 que le panneau d'affichage ayant fait l'objet de ses trois constats " était bien positionné en bordure de la route goudronnée " ne saurait suffire à apporter a posteriori une telle preuve ; que ne démontre pas davantage la date certaine d'affichage du permis de construire le fait, invoqué en appel par la SARL Casa di Petra, que la plainte pénale pour faux et usage de faux déposée par M. B... contre l'huissier auteur des constats ait été classée sans suite le 1er juin 2015 par le procureur de la République d'Ajaccio, après enquête, pour infraction insuffisamment caractérisée ; qu'enfin, les démarches de M. B...antérieures à son recours gracieux du 8 décembre 2011 ne peuvent être regardées, compte tenu de leur objet et de leur contenu susmentionné, comme révélant la connaissance acquise par ce dernier de la délivrance d'un permis de construire tacite le 12 juillet 2011, susceptible de faire courir à son égard le délai de recours contentieux ; que, par suite, la commune de Porto-Vecchio et la SARL Casa di Petra n'établissent pas que le permis de construire en litige était affiché conformément aux dispositions susmentionnées au plus tard le 30 septembre 2011 ;
10. Considérant, au surplus, qu'ainsi qu'il a été indiqué au point 1, le permis de construire contesté a été délivré en vue de l'édification d'un ensemble immobilier de 26 maisons d'habitation et leurs annexes, et de la division du terrain en lots y afférente ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des photographies du panneau d'affichage produites par la SARL Casa di Petra, que celui-ci portait uniquement la mention, s'agissant de la nature du projet, " maison individuelle ", et ne contenait aucune indication permettant de saisir l'ampleur et la consistance réelle de l'opération, la seule mention d'une surface hors oeuvre nette totale de 3 554 mètres carrés ne pouvant par elle-même apporter au public d'indication sur la division foncière opérée et l'importance du nombre de constructions prévues ; que, dans ces conditions, l'affichage du permis de construire ne peut être regardé comme ayant été régulièrement effectué au regard des prescriptions précitées de l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme, et n'a pu, également, pour ce second motif, faire courir le délai de recours contentieux mentionné à l'article R. 600-2 précité du code de l'urbanisme ;
11. Considérant que, sans qu'il soit besoin de recourir à la procédure d'inscription de faux prévue par l'article R. 633-1 du code de justice administrative comme le demande M. B... à propos de certaines des pièces produites par la SARL Casa di Petra, il résulte de ce qui précède que le recours contentieux formé par l'intéressé le 2 avril 2012 devant le tribunal administratif de Bastia aux fins d'annulation du permis de construire, suite au rejet implicite de son recours gracieux le 8 février 2012, n'était pas tardif ; que les requérantes ne sont, dès lors, pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont regardé la demande comme recevable ;
Sur la légalité de la décision de permis de construire tacite du 12 juillet 2011 :
12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme applicable aux communes littorales : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement " ; que, par ailleurs, le schéma d'aménagement de la Corse approuvé par décret du 7 février 1992 prescrit que l'urbanisation du littoral demeure limitée, et pour en prévenir la dispersion, privilégie la densification des zones urbaines existantes et la structuration des espaces périurbains, en prévoyant, d'une part, que les extensions, lorsqu'elles sont nécessaires, s'opèrent dans la continuité des centres urbains existants et, d'autre part, que les hameaux nouveaux demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier ; que de telles prescriptions apportent des précisions relatives aux modalités d'application des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code l'urbanisme et sont compatibles avec elles ;
13. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais qu'en revanche aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations et villages ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, entouré par un vaste espace de maquis dépourvu de toute construction, n'est bordé que sur l'un de ses côtés par une zone de constructions de faible densité caractérisant une urbanisation diffuse ; que, dans ces conditions, le projet autorisé sur la parcelle F n° 2739 ne peut être regardé comme s'inscrivant en continuité ni avec l'agglomération urbaine de Porto-Vecchio située à plusieurs kilomètres ni même, en toute hypothèse, avec le centre du village de Piccovaggia ;
14. Considérant, d'autre part, qu'un permis de construire ne peut être délivré, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, pour la réalisation de constructions qui ne sont pas en continuité avec les agglomérations et villages existants qu'à la condition que le projet soit conforme à la destination d'une zone délimitée par le document local d'urbanisme, dans laquelle celui-ci prévoit la possibilité d'une extension de l'urbanisation de faible ampleur intégrée à l'environnement par la réalisation d'un petit nombre de constructions de faible importance, proches les unes des autres et formant un ensemble dont les caractéristiques et l'organisation s'inscrivent dans les traditions locales ;
15. Considérant qu'en l'espèce, si les appelantes soutiennent que l'ensemble de 26 maisons d'habitation projeté par la SARL Casa di Petra présente les caractéristiques urbanistiques d'un hameau nouveau intégré à l'environnement au sens des dispositions précitées, elles ne peuvent le faire utilement en tout état de cause ; qu'en effet, à la date du permis de construire en litige, le projet autorisé ne se situait pas dans une zone destinée par un document local d'urbanisme en vigueur à accueillir exceptionnellement un tel ensemble de constructions, alors qu'en toute hypothèse le plan local d'urbanisme de la commune de Porto-Vecchio approuvé le 30 juillet 2009 avait été annulé en totalité avant cette date par un jugement du tribunal administratif de Bastia du 20 mai 2011 devenu depuis définitif ;
16. Considérant, par suite, que la commune de Porto-Vecchio et la société Casa di Petra ne sont pas fondées à soutenir que les premiers juges ont retenu à tort la méconnaissance par le permis litigieux des dispositions combinées de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme et du schéma d'aménagement de la Corse ;
17. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension des constructions existantes ; 2° Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à l'exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application " ;
18. Considérant que les dispositions précitées sont applicables au permis de construire du 12 juillet 2011, en l'absence de document local d'urbanisme opposable à cette date par suite de l'annulation juridictionnelle du plan local d'urbanisme de la commune de Porto-Vecchio ; que le terrain d'assiette de l'opération projetée par la SARL Casa di Petra ne peut être regardé, pour les raisons déjà indiquées au point 13 ci-dessus, comme inclus dans des parties actuellement urbanisées de cette commune au sens de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ; que la réalisation d'un nouvel ensemble d'habitations par le biais d'une division parcellaire n'entre dans aucune des possibilités de construction qui demeurent... ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont également accueilli le moyen invoqué devant eux par M. B...et tiré de la méconnaissance des dispositions de cet article par l'autorisation de construire litigieuse ;
19. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions sont de nature, par leur localisation ou leur destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés " ;
20. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet, ne se situant pas dans la continuité d'une zone agglomérée ou déjà urbanisée de manière dense, ainsi qu'il a été dit précédemment, a pour effet d'urbaniser par l'implantation de 26 maisons d'habitation, relativement distantes les unes des autres et leurs annexes, une partie conséquente d'un secteur de 40 hectares jusqu'alors à l'état naturel de maquis, ne comportant aucune construction et non desservi par la voie publique ni par un réseau d'assainissement collectif ; que c'est, dès lors, à juste titre que les premiers juges ont relevé que le projet était, en l'espèce, susceptible de favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants au sens des dispositions précitées ;
21. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, applicable à l'autorisation litigieuse en l'absence de plan local d'urbanisme en vigueur : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. " ;
22. Considérant que le permis, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme ; que, dès lors, si l'administration et le juge administratif doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique ;
23. Considérant qu'en l'espèce, la société Casa di Petra s'est prévalu à l'appui de sa demande d'une servitude de passage sur les fonds privés séparant la parcelle F n° 2739 de la route de Palombaggia, résultant des actes passés lors du partage en 1975 du fonds Terazzoni et des divisions foncières ultérieures de celui-ci, d'où est issue notamment la propriété de M. B... ; que, si ce dernier fait valoir l'existence d'un contentieux devant le juge civil des référés et de décisions rendues par celui-ci en sa faveur à propos du passage de cette servitude sur son terrain, il ne conteste pas sérieusement, par les seuls éléments qu'il fait valoir, l'existence même d'une servitude pour le désenclavement de la parcelle F n° 2739, quel que soit par ailleurs l'emplacement précis de son tracé sur la parcelle ; que la circonstance que la largeur de la servitude serait de 4 mètres et non de 5 mètres dans la traversée de ce fonds n'est pas non plus de nature, à elle seule, à démontrer une violation des dispositions précitées de l'article R. 111-5, alors que le caractère disproportionné de la desserte par rapport au projet autorisé n'est au demeurant pas clairement soutenu ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté que la parcelle F n° 2739 peut également être desservie par un accès distinct constituant une " voie secondaire ou de sécurité " empruntant d'autres parcelles la séparant du chemin communal situé en aval ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif a retenu à tort, parmi les motifs d'annulation du permis de construire en litige, que celui-ci méconnaissait l'article R. 111-5 précité du code de l'urbanisme ;
24. Considérant, toutefois, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 20 ci-dessus que les appelantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé le permis de construire tacitement délivré le 12 juillet 2011 par le maire de Porto-Vecchio à la SARL Casa di Petra ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement présentées par la SARL Casa di Petra :
25. Considérant que, dès lors que le présent arrêt statue sur les conclusions de la requête de la SARL Casa di Petra tendant à l'annulation du jugement attaqué, ses conclusions présentées par requête n° 15MA02623 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement en application de l'article R. 811-16 du code de justice administrative se trouvent, en toute hypothèse, privées d'objet ; qu'il n'y a donc plus lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
26. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. B...qui n'est pas la partie perdante au présent litige, voit mise à sa charge une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Porto-Vecchio et la SARL Casa di Petra ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Casa di Petra et de la commune de Porto-Vecchio une somme de 1 500 euros chacune, à verser à M. B...sur le fondement des mêmes dispositions, et de rejeter le surplus des conclusions présentées en application de celles-ci.
D É C I D E :
Article 1er : La requête n° 14MA00826 de la SARL Casa di Petra et la requête n° 14MA01119 de la commune de Porto-Vecchio sont rejetées.
Article 2 : La commune de Porto-Vecchio, d'une part, et la SARL Casa di Petra, d'autre part, verseront chacune à M. B...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête n° 15MA02623 présentée par la SARL Casa di Petra.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties aux trois instances susmentionnées est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Porto-Vecchio, à la SARL Casa di Petra, et à M. H...B.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2015, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 novembre 2015.
''
''
''
''
4
N° 14MA00826 - 14MA01119 - 15MA02623