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10/11/2015 | FRANCE | N°13MA05105

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2015, 13MA05105


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été mises à leur charge au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1201738 du 17 octobre 2013, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2013, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la Cour

:

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 octobre 2013 ;

2°) de prono...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été mises à leur charge au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1201738 du 17 octobre 2013, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2013, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 octobre 2013 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la somme de 35 euros au titre de la contribution à l'aide juridique.

Ils soutiennent que :

- il a été suffisamment justifié des frais de déplacements professionnels exposés par M. B... au cours des années 2005 et 2006 ;

- il en va de même s'agissant du montant des frais de réception ;

- l'administration ne pouvait imposer comme revenus d'origine indéterminée des sommes dont elle était en mesure d'identifier l'origine ;

- il a suffisamment été justifié de ce que les sommes en cause correspondaient à des remboursements de frais professionnels, ce qui a été admis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés ;

- si la cour considère que les pièces jointes pour la première fois à la requête d'appel permettent de rattacher les sommes perçues à une catégorie de revenu, l'administration, dans le cadre d'une substitution de base légale, sollicite le maintien de l'imposition de ces sommes dans la catégorie des rémunérations allouées aux gérants majoritaires de SARL, en application de l'article 62 du code général des impôts.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeD..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme B...ont été assujettis, à l'issue d'une procédure d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2005 et 2006, à raison notamment, d'une part, de la réintégration dans leur revenu imposable de remboursements de frais de déplacement, de repas et de réception, que M. B...soutient avoir exposés pour la SARL Yves B...dont il est le gérant majoritaire, suivant la procédure de rectification contradictoire, et, d'autre part, de la taxation en tant que revenus d'origine indéterminée de sommes versées par les SARL Transroute, Genet et Transports YvesB... dont M. B...est également le dirigeant, suivant la procédure de taxation d'office ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 17 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 ;

Sur les frais de déplacement, de repas et de réception :

2. Considérant que les remboursements de frais, même non justifiés, consentis à un gérant majoritaire de SARL, qui sont susceptibles d'être regardés comme un complément de rémunération trouvant son origine dans l'exercice des fonctions de l'intéressé, constituent en principe un élément de sa rémunération imposable, en application de l'article 62 du code général des impôts, dans la catégorie des rémunérations alloués aux gérants majoritaires de SARL, sauf si leur montant, ajouté aux autres éléments de la rémunération, a pour effet de porter le total de celle-ci à un niveau excessif ; qu'aux termes de l'article 81 du code général des impôts : " Sont affranchis de l'impôt : 1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet. (...) " ; qu'aux termes de l'article 83 du même code : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales (...) " ; que les gérants majoritaires qui entendent bénéficier de ces dispositions à raison de sommes que leur a versées une société doivent être en mesure de justifier que ces sommes ont couvert des frais qu'ils ont réellement exposés, ainsi que l'exigeaient leurs fonctions au sein de l'entreprise, dans l'intérêt de cette dernière ;

En ce qui concerne les frais de déplacement et de repas :

3. Considérant que M. B...réitère en appel l'argumentation tirée de la nécessaire énergie et de l'effort commercial déployés par le dirigeant d'une société de transport ; qu'il produit à l'appui de ses prétentions des tableaux récapitulant les modalités de calcul qui ont présidé au versement des sommes en cause ainsi que la copie d'un cahier d'écolier, qu'il qualifie d'agenda, mentionnant en regard de dates, des destinations et des éléments de calcul ; que ces documents ne sont pas propres à démontrer que les sommes litigieuses correspondaient à des sommes exposées dans l'intérêt des fonctions exercées par M. B...pour le compte de la SARL YvesB..., alors, au surplus, que l'administration fait valoir sans être contredite que l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle n'a pas permis d'établir que les époux B...avaient effectivement acquitté, à titre personnel, les frais pour lesquels ils ont obtenu des remboursements de la part de la société, en l'absence de débit correspondant sur les comptes bancaires personnels, et de retrait d'espèces alors que M. B...n'a pas de carte de paiement et qu'il disposait d'un véhicule de tourisme qui lui était affecté personnellement par la SA Genest dont il était président directeur général ;

En ce qui concerne les frais de réception :

4. Considérant que le service vérificateur a réintégré dans les bases imposables du contribuable des remboursements de frais de réception après avoir constaté que des repas avaient été pris les samedis soir, dimanches et jours fériés ; que pour contester ces rehaussements, les contribuables se bornent à faire valoir que l'activité de gestion " ne s'arrête malheureusement pas le week-end " et que " les frais de réception sont particulièrement limités, dans le souci d'une bonne gestion ", en indiquant, en regard des dates auxquelles ces dépenses ont été exposées, un commentaire censé démontrer que ces dépenses ont été engagées dans l'intérêt de l'entreprise et en lien avec les fonctions de M.B... ; que toutefois, ces mentions ne sont pas corroborées par des documents susceptibles de les étayer et, en particulier, par les copies d'" agendas " produites en appel ; que M. B...indique ainsi que des frais de réception d'un montant respectif de 46 et de 134 euros exposés les samedi 7 et dimanche 8 octobre 2006 correspondraient à sa présence lors d'un salon à Paris alors que le document censé correspondre à son agenda est muet sur un déplacement professionnel effectué à l'une de ces dates ; qu'il en est de même, par exemple, s'agissant des frais de réception correspondant, selon M.B..., à des déplacements à Troyes effectués le 15 et 22 juillet 2006 ; qu'ainsi les appelants n'apportent pas plus en appel qu'en première instance la preuve de ce que les sommes en cause ont couvert des frais qu'ils ont réellement exposés, ainsi que l'exigeaient les fonctions de M.B..., et dans l'intérêt de la société ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration, qui ne soutient pas que les remboursements de frais litigieux auraient eu pour effet de porter la rémunération totale de M. B...à un niveau excessif, a pu à bon droit inclure les sommes litigieuses dans les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. et Mme B...dès lors qu'ils ne justifiaient pas que les frais dont ils fournissaient les états aient correspondu à des frais exposés par eux dans l'intérêt de la société Yves B...et les imposer sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts ;

Sur les sommes initialement imposées comme revenus d'origine indéterminée :

6. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme B...font valoir que l'administration ne peut se prévaloir des pouvoirs qu'elle tient des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales pour exiger du contribuable qu'il lui fournisse des précisions quant à la nature et à l'objet de certaines de ses dépenses pour le taxer d'office au cas où il s'abstiendrait de répondre à une telle demande ; qu'en l'espèce la demande d'éclaircissements adressée aux contribuables le 10 octobre 2008 concernait les crédits bancaires injustifiés et non des dépenses ; que le moyen invoqué est donc inopérant ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme B...critiquent le recours à la procédure de demande de justifications ; que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; que M. et Mme B...persistent à soutenir en appel que dès lors que l'origine des crédits bancaires litigieux, d'un montant de 7 528,94 euros et versés par les sociétés Transroute, Genet et Transports Yves B...était connue, l'administration n'aurait pu légalement mettre en oeuvre la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme B...n'ont pas été en mesure de justifier, au cours de la procédure d'imposition, de l'objet de ces versements et se sont contentés de soutenir que ces sommes correspondraient à des remboursements de frais de déplacement ou engagés pour le compte de ces sociétés sans être en mesure d'étayer ces affirmations ; qu'au vu de ces éléments, l'administration a pu régulièrement taxer d'office lesdites sommes en les intégrant directement au revenu global, en tant que revenus d'origine indéterminée, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il est loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

9. Considérant que M. et Mme B...ont produit pour la première fois en appel des documents propres à justifier de l'objet des remises de chèques litigieuses ; qu'au vu de ces éléments, les sommes en cause peuvent recevoir la qualification de remboursements de frais consentis à un gérant majoritaire de SARL, susceptibles d'être regardés comme un complément de rémunération trouvant son origine dans l'exercice des fonctions de l'intéressé ; qu'ils constituent dès lors un élément de sa rémunération imposable, en application de l'article 62 du code général des impôts, dans la catégorie des rémunérations allouées aux gérants majoritaires de SARL, dès lors qu'il n'est pas établi que leur montant, ajouté aux autres éléments de la rémunération, a eu pour effet de porter le total de celle-ci à un niveau excessif ; qu'il y a lieu par suite de rattacher les sommes en cause à la catégorie mentionnée ci-avant, ainsi que le demande à titre subsidiaire l'administration ; que M. et Mme B...sont fondés à obtenir une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie des rémunérations allouées aux gérants majoritaires de SARL à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ; que les intéressés, qui supportent la charge de la preuve en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales n'établissent pas, en revanche, que ces sommes devraient être déduites de leur revenu imposable faute de démontrer qu'elles ont été exposées dans l'intérêt social ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... sont seulement fondés à demander la réduction des impositions supplémentaires en litige à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres aux rémunérations allouées aux gérants majoritaires de SARL, s'agissant de la somme de 7 528,94 euros au titre de l'année 2006 ; qu'il sont, par suite, seulement fondés à demander la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. et Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 7 528,94 euros, initialement imposée au titre de l'année 2006 en tant que revenus d'origine indéterminé intégrée au revenu global de M. et Mme B...est rattachée à la catégorie des rémunérations alloués aux gérants majoritaires de SARL.

Article 2 : M. et Mme B...sont déchargés, en droits et pénalités, de la différence entre la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 et celle résultant de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 octobre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

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N° 13MA05105

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