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05/11/2015 | FRANCE | N°14MA01770

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2015, 14MA01770


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 116 595,24 euros en réparation de ses préjudices.

Par un jugement n° 1201662 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 avril 2014, MmeB..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1201662 du tribunal administratif de Nîmes ;r>
2°) de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 194 996 euros en réparation de ses préjudic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 116 595,24 euros en réparation de ses préjudices.

Par un jugement n° 1201662 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 avril 2014, MmeB..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1201662 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 194 996 euros en réparation de ses préjudices ;

3°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune d'Avignon a refusé de faire droit à sa demande indemnitaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la matérialité des faits est établie ;

- la réalité de ses préjudices et l'existence d'un lien de causalité entre ces derniers et l'ouvrage public sont démontrées ;

- la borne sur laquelle elle a chuté, de petite taille et se confondant par sa taille et sa couleur avec le trottoir, présente sur un lieu destiné à accueillir fréquemment un public important, constitue un ouvrage anormalement aménagé ;

- ces bornes sont difficilement décelables en présence d'une fréquentation importante des lieux et ne bénéficient d'aucune signalisation spécifique ;

- la commune ne saurait démontrer l'absence de défaut d'entretien normal en faisant état de la finalité de l'ouvrage ;

- l'emplacement de ces bornes est inapproprié et dangereux sur ces lieux, destinés à accueillir un public important et marqués par l'étroitesse de l'espace réservé aux piétons en raison notamment d'un kiosque métallique à proximité ;

- les bornes litigieuses ont été retirées suite à l'accident et cette suppression démontre à elle seule le caractère inadéquat et gênant de leur emplacement ;

- elle a droit à l'indemnisation de ses préjudices patrimoniaux, à savoir 300 euros en remboursement de frais divers, 7 296 euros de perte de revenus actuels et 168 000 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ;

- elle a également droit à la somme de 2 600 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, 8 000 euros pour les souffrances endurées, 7 000 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent et 1 800 euros pour son préjudice esthétique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2015, la commune d'Avignon, représentée par la SCP Brun Chabadel Expert, demande à la Cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de Mme B...;

2°) à titre subsidiaire, si la responsabilité de la commune était engagée, d'opérer un partage de responsabilité et de limiter l'indemnisation des préjudices à la somme globale de 9 600 euros ;

3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de Mme B...la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

- la requête est irrecevable, aucune critique du jugement n'étant formulée par l'appelante ;

- la cause de la chute n'est pas déterminée ;

- Mme B...a pu chuter en raison de la bousculade à l'entrée du théâtre ;

- les secours ne sont pas intervenus et Mme B...a assisté au spectacle prévu ;

- aucune attestation médicale n'est produite pour démontrer l'exactitude des faits et la réalité de la chute à cette date ;

- d'ailleurs, le rapport d'expertise médicale a été réalisé à la demande de Mme B...plusieurs mois après les faits et la réclamation préalable est intervenue près de deux ans après les faits ;

- aucune attestation du personnel du théâtre n'a été produite ;

- ainsi le lien de causalité n'est pas suffisamment établi ;

- aucun défaut d'entretien de l'ouvrage public ne lui est imputable ;

- aucune défectuosité importante n'est présente devant le théâtre ;

- les bornes litigieuses sont des ouvrages destinés à la sécurité des piétons, matérialisant la voie et empêchant l'empiètement des véhicules ;

- l'ouvrage public n'est pas isolé et il existe de nombreuses bornes implantées le long de la rue Henri Fabre ;

- les bornes ne présentent aucune particularité ;

- l'affluence des passants ne peut gêner la visibilité de ces bornes ;

- aucune photographie ne permet de constater l'existence d'un kiosque métallique qui aurait entravé la bonne visibilité des bornes ;

- en tout état de cause, l'appelante aurait dû les contourner compte tenu de leur dimension ;

- l'affluence des passants n'est pas une circonstance dont le juge tient compte pour apprécier l'entretien normal de l'ouvrage ou la nature et l'importance des obstacles que les piétons doivent s'attendre à rencontrer ;

- la défectuosité alléguée doit être regardée comme n'étant pas plus grave que celles que les usagers doivent normalement s'attendre à rencontrer sur une voie publique ;

- Mme B...patientait devant le théâtre en toute connaissance des lieux et il y a lieu de retenir sa faute d'inattention ;

- aucun accident dû à la présence de ces bornes ne s'est produit à cet endroit ;

- la faute de la victime doit être considérée comme étant la cause de son accident ou pour le moins exonérer en grande partie la commune en cas de condamnation ;

- l'augmentation de la demande indemnitaire par rapport à la première instance n'est pas justifiée ;

- l'indemnisation sollicitée est excessive et n'est pas motivée ;

- la demande de remboursement des frais divers n'est justifiée par aucun élément ;

- la perte de gains professionnels actuels n'est pas précisément établie ;

- la perte de gains professionnels futurs n'est pas justifiée ;

- aucune somme supérieure à 5 500 euros ne pourra être allouée à l'appelante au titre du déficit fonctionnel temporaire et permanent ;

- une somme maximale de 3 511 euros pourrait être allouée au titre des souffrances et 600 euros pour le préjudice esthétique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me C...de la SCP Brun-Chabanel-Expert pour la commune d'Avignon.

1. Considérant que Mme B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête tendant à la condamnation de la commune d'Avignon à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis en lien avec sa chute survenue le 10 juillet 2010 aux alentours de 20 heures alors qu'elle se trouvait dans une file d'attente devant un théâtre rue Henri Fabre ;

2. Considérant qu'il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu du fait d'un ouvrage public, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

3. Considérant que la réalité de la chute de Mme B...en raison d'une borne métallique située entre le trottoir et la chaussée est établie par la production de plusieurs attestations circonstanciées et de photographies ; que, contrairement à ce que la commune soutient, Mme B... s'est rendue dans la nuit au service des urgences du centre hospitalier de Montélimar où ont été constatés ses dommages corporels ; que le lien de causalité entre les dommages et l'ouvrage public est ainsi établi ;

4. Considérant cependant que la borne litigieuse, de 30 cm de haut et 26 cm de large, n'excède pas, par sa nature et son importance, les obstacles que tout piéton normalement attentif doit s'attendre à rencontrer sur la voie publique, plusieurs de ces bornes étant installées tout le long de la rue à intervalles réguliers et étant destinées à délimiter le trottoir de la chaussée ; qu'il appartient à un piéton normalement attentif de les contourner malgré l'affluence des passants ; que, dans ces conditions, ladite borne n'est pas constitutive d'un défaut d'entretien normal de la voie publique de nature à engager la responsabilité de la commune, quand bien même les bornes auraient été enlevées depuis l'accident ; que les conclusions à fin d'indemnisation et d'annulation de Mme B...doivent dès lors être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'intimée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Avignon, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...le versement d'une somme à la commune d'Avignon au titre des frais exposés par cette collectivité et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Avignon tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au régime social des indépendants du Rhône et à la commune d'Avignon.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Laso, président-assesseur,

- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.

Lu en audience publique le 5 novembre 2015.

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N° 14MA01770


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01770
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-01-01 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages sur les voies publiques terrestres. Entretien normal.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : TOUBOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-05;14ma01770 ?
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