Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...épouse A...E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 février 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1401712 du 22 juillet 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 3 décembre 2014 sous le n° 14MA04794 et un mémoire complémentaire enregistré le 5 octobre 2015, Mme B... épouse A...E..., représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2014 pris par le préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande sous la même astreinte et dans le délai d'un mois, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La requérante soutient que :
- le jugement est irrégulier, faute de s'être prononcé sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté a méconnu l'article 3-1 de la convention internationales des droits de l'enfant ; il a violé les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a contrevenu aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.
II. Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 9 juin 2015 sous le n° 15MA02365, Mme B...épouse A...E..., représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du 22 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 février 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2°) d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision juridictionnelle à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La requérante soutient que :
- elle est fondée à demander le sursis à l'exécution du jugement en cause ;
- l'exécution de ce jugement risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin, rapporteur,
- et les observations de Me D...représentant Mme B...épouse A...E..., requérante.
1. Considérant que Mme B...épouse A...E..., ressortissante tunisienne née en 1979, s'est vu opposer un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français par un arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 14 février 2014 ; que par requête enregistrée sous le n° 14MA04794, elle relève appel du jugement du 22 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que par requête enregistrée sous le n° 15MA02365, elle demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les requêtes n° 14MA04794 et 15MA02365 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;
Sur la requête n° 14MA04794 :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté contesté :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'arrêté attaqué que Mme B...épouse A...E...est entrée régulièrement en France le 31 janvier 2008 ; que, eu égard aux éléments produits et à la stabilité de son adresse située à Juan-les-Pins jusqu'à la date de son mariage, elle doit être regardée comme ayant habituellement résidé en France depuis lors, ce que n'a d'ailleurs pas contesté le préfet ; qu'à Antibes, le 29 octobre 2011, elle a épousé M. F... A...E..., un compatriote titulaire d'une carte de résident ; que la résidence commune des époux A...E...est établie par les pièces produites ; que le 24 décembre 2012, un enfant, Rayan, est né de cette union à Antibes ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances susmentionnées, l'arrêté en cause, intervenu le 14 février 2014, a, dès lors, porté au droit au respect de la vie familiale de Mme B...épouse A...E...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B...épouse A...E...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme B... épouse A...E...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur la requête n° 15MA02365 :
7. Considérant que la Cour se prononçant au fond dans la présente affaire, il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué, enregistrée sous le n° 15MA02365 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions susvisées de mettre à la charge de l'Etat le versement à la requérante d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle dans les présentes instances et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15MA02365.
Article 2 : Le jugement du 22 juillet 2014 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 14 février 2014 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme B...épouse A... E... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Mme B...épouse A...E...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...épouse A...E...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...épouse A...E..., au préfet des Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2015, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- M. Martin, président assesseur,
- Mme Chenal-Peter, premier conseiller,
Lu en audience publique le 3 novembre 2015.
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N° 14MA04794, 15MA02365 2
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