Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Lamaudamath a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2008 au 31 décembre 2010.
Par un jugement n°1201346 du 18 avril 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 juin 2013 par télécopie et régularisée par courrier le 27 juin suivant, la SARL Lamaudamath, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 avril 2013 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen relatif à l'application du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts en se bornant à considérer que la configuration des immeubles ne permettait pas d'accueillir des prestations para-hôtelières ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen relatif à l'interprétation administrative de la loi fiscale résultant de l'instruction administrative du 30 avril 2003 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 3 A-2-03 en se bornant à considérer que cette instruction ne contenait aucune interprétation de la loi différente de celle dont il avait été fait application ;
- dès lors que les immeubles dont elle est propriétaire ont été donnés en location à des exploitants qui y exerçaient une activité para-hôtelière, le tribunal ne pouvait écarter le moyen tiré de ce qu'elle était en droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée en considérant qu'elle n'entrait pas dans le champ du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts au motif que la configuration des lieux ne permettait pas d'accueillir des prestations para-hôtelières ;
- dans la mesure où il résultait des termes mêmes des baux conclus avec les sociétés exploitantes qu'elles exerçaient une activité para-hôtelière, elle a été induite en erreur sur l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de la location au regard du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ;
- l'administration n'a pas apporté la preuve que les prestations prévues par les stipulations des baux n'avaient jamais été réalisées ;
- elle devait être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de son activité de loueur en meublé, ainsi qu'il résulte des paragraphes n°9 à 11 de l'instruction administrative du 30 avril 2003 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 3 A-2-03, qui indique que l'imposition s'applique à l'exploitation de chambres d'hôtes, de maisons ou appartements meublés, de résidences pour étudiants et de maisons de retraite, et de la doctrine administrative référencée BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20, qui précise que la prestation d'accueil peut être confiée à un mandataire en un lieu unique différent du local lui-même et qu'un système d'accueil électronique suffit ;
- elle devait être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de son activité de loueur en meublé, ainsi qu'il résulte du paragraphe n°8 de l'instruction administrative du 30 avril 2003, qui est plus favorable que les dispositions de l'article 261 D du code général des impôts, en ce qu'il n'exige pas que les prestations soient effectivement réalisées ;
- la majoration pour manquement délibéré dont l'administration a fait application est infondée, dès lors que le vérificateur n'a pas remis en cause le montant du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qui avait été remboursé, et qu'il n'a pas démontré qu'elle aurait connaissance de l'inexécution des prestations para-hôtelières prévues par les baux conclus avec les sociétés exploitantes ;
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré ;
- les intérêts de retard sont contestés par voie de conséquence.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 décembre 2013, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono, rapporteur,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Lamaudamath, dont l'objet social est la mise en location de locaux meublés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le principe de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de cette société et a rappelé la taxe déduite au titre de la période du 1er avril 2008 au 31 décembre 2010 ; que la SARL Lamaudamath relève appel du jugement en date du 18 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe, et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant, en premier lieu, que la requérante fait valoir que les premiers juges n'auraient pas répondu aux moyens relatifs à l'application du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts et au bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale résultant de l'instruction administrative du 30 avril 2003 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 3 A-2-03 ; que, toutefois, ces critiques manquent en fait dès lors qu'il ressort du jugement que le tribunal a considéré, d'une part, que les villas que la SARL Lamaudamath donnait en location meublée ne bénéficiaient d'aucune des prestations para-hôtelières visées au b du 4° de l'article 261 D du code, et, d'autre part, que la société ne pouvait utilement invoquer la doctrine administrative exprimée dans l'instruction du 30 avril 2003 au motif qu'elle ne contenait pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il était fait application ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient la SARL Lamaudamath, le jugement attaqué n'est pas entaché d'omissions à statuer sur ces deux points ;
3. Considérant, en second lieu, s'agissant de la majoration prévue par l'article 1729 du code général des impôts, que, contrairement à ce qui est soutenu, les premiers juges ont indiqué de façon précise les raisons pour lesquelles ils ont considéré que l'administration avait établi le manquement délibéré, dès lors qu'ils ont fait état de l'importance des rappels de taxe sur la valeur ajoutée non déductible, et retenu que la société requérante ne pouvait ignorer, eu égard notamment aux liens avérés entre elle et les sociétés exploitantes des immeubles, appartenant au même groupe, qu'aucune prestation para-hôtelière n'était effectivement réalisée ; que par suite, le jugement attaqué, qui a répondu de manière suffisamment circonstanciée à l'argumentation développée par la SARL Lamaudamath, n'est pas entaché d'une insuffisante motivation sur cet autre point ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. / Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : / (...) b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. / c. Aux locations de locaux nus, meublés ou garnis consenties à l'exploitant d'un établissement d'hébergement qui remplit les conditions fixées aux a ou b (...) " ;
5. Considérant que la SARL Lamaudamath, créée le 1er avril 2008, a acquis le 24 avril 2008 plusieurs villas situées à Narbonne, qu'elle a données en location à la société Eurospa, puis à la société Eurospa Voyages, devenue Loisirs et Voyage du Millénaire, dans le cadre de baux conclus les 24 avril 2008 et 20 mai 2010, prévoyant la réalisation par ces dernières de prestations de location avec fourniture de prestations para-hôtelières ; que l'administration a estimé, pour remettre en cause l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de l'activité de la SARL Lamaudamath, que les locataires des villas ne bénéficiaient d'aucune des prestations prévues par les dispositions précitées du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ;
6. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ; que, par suite la SARL Lamaudamath n'est pas fondée à soutenir qu'il incombe à l'administration de démontrer que les prestations prévues par les stipulations des baux n'ont jamais été réalisées par les sociétés exploitantes ;
7. Considérant que la SARL Lamaudamath ne conteste ni qu'aucune des prestations visées au b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts n'était offerte par les sociétés exploitantes aux clients occupant les villas, ainsi que son gérant l'avait d'ailleurs reconnu au cours de la vérification de comptabilité, ni même que lesdites sociétés ne disposaient pas des moyens leur permettant de fournir ces prestations ; qu'ainsi, alors même que les baux mentionnaient que les sociétés exploitantes entendaient fournir de telles prestations, les locaux donnés en location par la société requérante ne pouvaient être regardés comme loués à l'exploitant d'un établissement d'hébergement remplissant les conditions posées au b du 4° de l'article 261 D du code ; que dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, l'activité de la SARL Lamaudamath était de plein droit exonérée de taxe sur la valeur ajoutée ;
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :
8. Considérant que la société requérante ne saurait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction administrative du 30 avril 2003, publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 3 A-2-03, qui ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application au point 7 ci-dessus ; que, pour le même motif, elle ne peut se prévaloir de la doctrine référencée BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20, au demeurant postérieure au fait générateur de l'imposition ;
Sur les pénalités :
En ce qui concerne les intérêts de retard :
9. Considérant qu'aux termes du I de l'article 1727 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard (...) " ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que l'administration était fondée à rappeler la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort ; que, par suite, c'est à bon droit qu'elle a fait application des intérêts de retard ;
En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :
11. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
12. Considérant que, pour apporter la preuve du manquement libéré, l'administration invoque, outre l'importance des rappels, la circonstance que la SARL Lamaudamath ne pouvait ignorer le défaut de réalisation des prestations para-hôtelières prévues par les baux conclus avec les sociétés exploitantes des villas, avec lesquelles elle est étroitement liée, dès lors qu'au regard des liens d'interdépendance qui les unissent, les trois sociétés appartiennent au même groupe informel ; que la société requérante ne conteste pas la réalité des liens ainsi mis en évidence entre elle et les sociétés exploitantes des villas ; que, dans ces conditions, le ministre doit être regardé comme démontrant l'existence d'un manquement délibéré ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Lamaudamath n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'elle ne peut ainsi prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL LAMAUDAMATH est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LAMAUDAMATH et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2015, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- M. Martin, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 novembre 2015.
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N° 13MA02589 2
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