Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner l'Etat à lui verser la somme de 455 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du chef de l'incendie survenu le 14 février 2009 dans la cellule de la maison d'arrêt de Grasse où il était incarcéré, à.titre subsidiaire à ce que soit ordonnée une expertise médicale, et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Par un jugement n° 1203210 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 avril 2015, M. A...B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice en date du 12 février 2015 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 455 000 euros ;
3°) subsidiairement d'ordonner une expertise médicale ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration pénitentiaire a commis une faute de surveillance, n'a pas eu une réactivité suffisante ;
- la sécurité du service public pénitentiaire présente des dysfonctionnements des dispositifs anti-incendie ;
- le requérant a subi des brûlures et une intoxication liées aux manquements de l'administration à garantir la sécurité des détenus ;
- il a subi des préjudices patrimoniaux, un déficit fonctionnel temporaire et permanent, des souffrances morales et physiques, un préjudice esthétique temporaire et permanent, un préjudice d'agrément, un préjudice sexuel, et un préjudice d'établissement ;
- le lien de causalité entre les fautes commises par l'administration pénitentiaire et les dommages subis est établi.
Un courrier du 23 juillet 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 1er septembre 2015 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pocheron,
- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...B...a été écroué le 12 octobre 2007 à la maison d'arrêt de Grasse en exécution d'une condamnation pour trafic de stupéfiants ; que, le 14 février 2009, il a bénéficié d'une permission de sortie ; qu'à son retour à l'établissement, vers dix-sept heures, il titubait et présentait des difficultés à s'exprimer ; qu'après la réalisation de sa fouille, il a été conduit à l'infirmerie, où il a été ausculté par un médecin, qui a décidé qu'il pouvait regagner sa cellule ; qu'il a toutefois recommandé aux agents pénitentiaires de retirer de ladite cellule les médicaments qui pouvaient s'y trouver, et de placer M. A...B...en surveillance de nuit, le détenu devant en outre dormir sur le lit du bas pour éviter une chute ; que, la consultation terminée, vers dix-sept heures trente-cinq, M. A...B...a été reconduit dans sa cellule par les deux chefs de poste qui ont procédé à la fouille de sa cellule et sont restés avec le détenu pendant quinze à vingt minutes ; qu'à leur départ, ils ont demandé à la personne détenue dans la cellule voisine de les appeler s'il entendait des bruits inquiétants de la part de M. A...B... ; que, vers dix-huit heures, les agents pénitentiaires ont été alertés par les détenus d'un départ de feu dans l'aile 2 de la maison d'arrêt ; qu'après avoir identifié la cellule de M. A...B..., comme étant à l'origine de l'incendie, des surveillants sont intervenus au rez-de-chaussée de ce bâtiment, lieu de localisation de la cellule en cause, pour faire sortir l'intéressé de cette cellule avant de refermer rapidement la porte pour éviter la propagation du feu dans la coursive ; qu'ils ont alors mis M. A... B...en sécurité et lui ont prodigué les premiers soins, puis l'ont conduit à l'infirmerie ; qu'à dix-neuf heures trente, M. A...B...était conduit en hélicoptère aux urgences du centre hospitalier de Grasse ; que l'intéressé a subi une plaie profonde à l'épaule, a eu le corps en partie brûlé, et a dû subir de nombreuses opérations et notamment des greffes de peau ; que l'incendie en cause a été causé par la mise à feu de son matelas par M. A...B... ; que, par courrier notifié le 26 juin 2012 au garde des sceaux, M. A... B... a réclamé réparation des préjudices subis à la suite de cet incendie ; que cette demande a été rejetée par décision du 13 juillet 2012 ; que M. A... B..., par la présente requête, relève appel du jugement en date du 12 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté son recours tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 455 000 euros en réparation de ses préjudices ;
2. Considérant si M. A...B...soutient qu'il nécessitait une attitude accrue de surveillance en raison de son état de détresse, qu'il n'a pas fait l'objet de la surveillance spéciale de nuit prescrite par le médecin, et que les surveillants ont délégué à tort cette surveillance au détenu de la cellule voisine de la sienne, il résulte de l'instruction que l'incendie, provoqué, ainsi qu'il a été dit, par M. A...B..., s'est déclaré au plus tard à dix-huit heures dix, heure à laquelle des détenus ont signalé l'existence d'un départ de feu ; qu'il ressort des comptes-rendus des premiers surveillants qui ont conduit M. A...B...à sa cellule après la consultation médicale, que ceux-ci l'ont quitté au plus tôt à dix-sept heures cinquante ; que la surveillance spéciale de nuit recommandée par le médecin, alors qu'il ne ressort d'aucun des documents produits à l'instruction, ni d'ailleurs des déclarations du requérant lui-même, que celui-ci présentait des tendances suicidaires, ne supposait pas la présence permanente d'un surveillant auprès du détenu ou devant sa cellule ; qu'en tout état de cause, à supposer même que le dispositif de surveillance mis en place n'aurait pas été suffisant, il ne saurait être à l'origine du dommage eu égard à la brièveté du temps écoulé entre le départ des surveillants de la cellule de M. A...B...et le moment où l'incendie s'est déclenché ; que le défaut de surveillance allégué n'est ainsi pas établi ;
3. Considérant que si M. A...B...fait valoir qu'il a fallu vingt minutes aux surveillants pour ouvrir la porte de sa cellule, il ressort des déclarations du requérant lui-même que l'ouverture de la porte de sa cellule est intervenue deux à cinq minutes après que l'alerte a été donnée à dix-huit heures dix ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à invoquer un défaut de réactivité des surveillants qui se sont portés à son secours ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des différents rapports des agents de la maison d'arrêt de Grasse produits par le requérant lui-même, que la circonstance que les trappes de désenfumage n'ont pas été immédiatement opérationnelles, ce qui a nécessité leur déclenchement manuel, a été sans incidence sur les secours apportés à M. A...B...ou sur son état de santé, la fumée ayant commencé à envahir la coursive après que l'intéressé a été placé en lieu sûr ; que la longueur insuffisante de la lance incendie n'a également eu aucune incidence sur les secours apportés à M. A...B...ou sur son état de santé, celle-ci ayant été utilisée pour tenter de mettre fin à l'incendie de sa cellule alors qu'il avait été évacué ; que la circonstance que les surveillants n'auraient pas disposé des clefs de la promenade pour évacuer les autres détenus a été en tout état de cause également sans incidence sur les secours apportés à M. A...B...et sur son état de santé ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que des dysfonctionnements des dispositifs anti-incendie seraient à l'origine des dommages qu'il a subis ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A...B...la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2015, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 2 novembre 2015.
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N° 15MA01488