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26/10/2015 | FRANCE | N°14MA02907

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2015, 14MA02907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de l'admettre au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de l'Albanie.

Par un jugement n° 1304729 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2014, Mme A..., représentée p

ar MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de l'admettre au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de l'Albanie.

Par un jugement n° 1304729 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2014, Mme A..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 20 mars 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2013 du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie du droit à travailler ;

4°) à défaut, d'annuler la décision fixant le pays de renvoi et d'ordonner son assignation à résidence sur le fondement des dispositions de l'article L. 561-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'ordonner au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à MeB....

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée en ce qui concerne l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet n'a pas sérieusement analysé l'intérêt supérieur de son enfant ;

- elle justifie de motifs lui permettant de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de séjour viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de séjour viole l'article 3 § 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de renvoi l'expose à des menaces en cas de retour dans son pays d'origine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2015, le préfet des Alpes-Maritimes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance de la circulaire du 28 novembre 2012 est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées le 17 mars 2015, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juin 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Ouillon.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante albanaise née le 6 janvier 1964, est entrée en France en mars 2009 avec son époux, leur fils majeur et leur fille mineure ; que par lettre du 1er février 2013, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en se prévalant des énonciations de la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 ; que, par arrêté du 15 octobre 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de Mme A...tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / (...) - refusent une autorisation (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour vise les stipulations et les dispositions législatives et réglementaires dont elle fait application et, notamment, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention internationale relative aux droits de l'enfant et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle comporte également des considérations de fait relatives à la situation personnelle de Mme A... et précise notamment que cet arrêté ne porte pas atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants ; que la décision attaquée comporte ainsi l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, permettant d'établir que le préfet a procédé à l'examen de la situation de l'intéressée au regard notamment de l'intérêt de son enfant mineur ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ladite décision serait insuffisamment motivée manque en fait et doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle est entrée en France en 2009, que sa famille y est bien intégrée, qu'elle maîtrise la langue française, que sa fille obtient de très bons résultats scolaires et que son fils est licencié au sein d'un club de football ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée en France à l'âge de quarante-cinq ans, que son époux, de même nationalité, fait également l'objet d'une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français et qu'elle n'établit pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale hors de France avec son époux et son enfant mineur ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions et de la durée de son séjour en France, et alors même qu'elle ne serait pas une menace pour l'ordre public, la décision du 15 octobre 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;

7. Considérant que les circonstances dont se prévaut la requérante, tirées de ce que sa fille, présente en France depuis plus de cinq ans, serait scolarisée en classe de seconde et obtiendrait de très bon résultats à l'école et que son fils, majeur, serait licencié dans un club de football, ne sont pas de nature à caractériser à elles seules des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas méconnu ces dispositions ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de celle-ci sur la situation de l'intéressée ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante ne peut utilement invoquer la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 dès lors que les critères de régularisation y figurant ne présentent pas le caractère de lignes directrices susceptibles d'être invoquées mais constituent de simples orientations pour l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que rien ne s'oppose à ce que la fille mineure de Mme A...reparte avec ses parents dans son pays d'origine, où sa scolarité pourra être poursuivie ; que dès lors, le préfet des Alpes-Maritimes, dont la décision de refus de séjour opposée à la requérante n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de son enfant, n'a pas porté à l'intérêt supérieur de cet enfant une atteinte méconnaissant les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d 'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

13. Considérant que Mme A...dont la demande d'asile politique a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés le 8 octobre 2009, ce rejet ayant été confirmé par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 11 octobre 2011, fait valoir qu'elle serait exposée à des risques pour sa sécurité en cas de retour en Albanie compte tenu de son appartenance à la minorité ethnique des Chams ; que, toutefois, elle n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle encourrait des risques particuliers pour sa sécurité personnelle en cas de retour en Albanie ; que, par suite, les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peuvent qu'être rejetées ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par MmeA..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction formées par la requérante ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Me B... de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à Me B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Moussaron, président,

M. Marcovici, président-assesseur,

M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 octobre 2015.

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N° 14MA02907

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02907
Date de la décision : 26/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Sylvain OUILLON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : OLOUMI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-26;14ma02907 ?
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