Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007 et de condamner l'Etat à lui restituer la somme de 161 340 euros qui a été exigée en garantie par le comptable public de Draguignan, assortie des intérêts moratoires.
Par jugement n° 1103389 du 17 juillet 2013, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 septembre 2013 et un mémoire complémentaire, enregistré le 2 juin 2014, MmeC..., représentée par MeB..., a demandé à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 juillet 2013 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui restituer la somme de 161 340 euros assortie des intérêts moratoires ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 150 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 mars 2014 et le 23 octobre 2014, le ministre de l'économie et des finances a conclu au rejet de la requête.
Par des mémoires distincts, enregistrés le 27 mars 2015 et le 29 avril 2015, Mme C...demande à la Cour, à l'appui de sa requête enregistrée le 18 septembre 2013, tendant à l'annulation du jugement n° 1103389 du 17 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande en décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007 et tendant à la condamnation de l'Etat à lui restituer la somme de 161 340 euros assortie des intérêts moratoires, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du premier alinéa du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts et de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat et, le cas échéant, du conseil Constitutionnel.
Mme C...soutient que :
- les dispositions du premier alinéa 2° du I de l'article 109 du code général des impôts sont applicables au litige ;
- elles n'ont pas fait l'objet d'une déclaration de conformité ;
- la question posée présente un caractère sérieux ;
- les dispositions en cause sont contraires à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dans la mesure où elles méconnaissent les facultés contributives des contribuables assujettis à l'impôt et privent ces derniers des garanties légales exigées par l'article 13 ;
- elles sont aussi contraires à l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui affirme le droit des citoyens à constater la nécessité de la contribution publique et de consentir à l'impôt, droit qui figure au nombre des droits et libertés garantis par la Constitution au sens de l'article 61-1 de celle-ci.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 avril 2015 et le 7 mai 2015, le ministre des fiances et des comptes publics demande à la Cour de ne pas faire droit à la transmission demandée.
Il soutient que :
- la question posée ne présente pas un caractère sérieux ;
- la théorie dite du maître de l'affaire est une construction jurisprudentielle qui ne peut être valablement contestée dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité ;
- les impositions établies sur le fondement du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts ne méconnaissent pas les capacités contributives des contribuables ;
- le moyen tiré par la requérante de la méconnaissance par les dispositions arguées d'inconstitutionnalité de l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen soulève en fait la question de l'incompétence négative du législateur ; que le moyen tiré de la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être utilement invoqué à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité s'agissant d'une disposition législative antérieure à la Constitution du 4 octobre 1958.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 notamment ses articles 13 et 14 ;
- la loi n° 48-1974 du 31 décembre 1948 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, modifiée par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ;
- le décret n° 48-1986 du 9 décembre 1948 ;
- le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;
- le code général des impôts et notamment le 2° du 1. de l'article 109 ;
- le code de justice administrative.
1. Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine des conditions d'application du présent article " ; que selon l'article 23-2 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " (...) La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat (...) Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux (...) " ;
2. Considérant que le premier alinéa du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts dispose que sont considérés comme revenus distribués " toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices " ;
3. Considérant que ces dispositions sont applicables au litige et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ; que, par suite, il importe seulement d'examiner si la question posée par Mme C...n'est pas dépourvue de caractère sérieux ;
4. Considérant que la requérante soutient que ces dispositions seraient contraires à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dans la mesure où elles méconnaissent les facultés contributives des contribuables assujettis à l'impôt et privent ces derniers des garanties légales exigées par l'article 13 ainsi qu'à l'article 14 de la même Déclaration qui affirme le droit des citoyens à constater la nécessité de la contribution publique et de consentir à l'impôt, droit qui figure au nombre des droits et libertés garantis par la Constitution au sens de l'article 61-1 de celle-ci ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions arguées d'inconstitutionnalité, issues de l'article 70 du décret 48-1986 du 9 décembre 1948, qui ont reçu valeur législative par l'article 15 de la loi 48-1974 du 31 décembre 1948, telles qu'éclairées par la jurisprudence du Conseil d'Etat, que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que des distributions ont été appréhendées par la personne dont elle établit qu'elle est, dans la société dont des revenus ont été regardés comme distribués, le seul maître de l'affaire ; qu'un contribuable qui n'a pu démontrer le caractère non fondé des éléments de preuve apportés par l'administration fiscale pour établir qu'il a la qualité de seul maître de l'affaire est regardé, pour l'application du premier alinéa du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts comme ayant appréhendé les distributions de la société ; que les impositions supplémentaires mises à la charge de la personne reconnue comme le maître de l'affaire résultent de l'application des règles et barèmes communs à tous les contribuables ayant perçu des revenus identiques à ceux ainsi appréhendés ; qu'elles ne sont, ainsi, ni dénuées de relation avec la capacité contributive de ce contribuable, ni confiscatoires ; qu'elles ne méconnaissent pas, ainsi, le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
6. Considérant, en second lieu, que, comme le relève à juste titre le ministre des finances et des comptes publics en défense, le moyen tiré par la requérante de la méconnaissance par les dispositions arguées d'inconstitutionnalité de l'article 14 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen soulève en fait la question de l'incompétence négative du législateur ; que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité dans le cas où serait affecté un droit ou une liberté que la Constitution garantit ne saurait l'être à l'encontre d'une disposition législative antérieure à la Constitution du 4 octobre 1958 ; que le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question de constitutionnalité invoquée ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil d'Etat ;
O R D O N N E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par MmeC....
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A...C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Fait à Marseille, le 8 juin 2015.
Le président de la 7ème chambre
Jean-Louis Bédier
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le Greffier,
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N° 13MA03772 QPC
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