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08/10/2015 | FRANCE | N°14MA02981

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2015, 14MA02981


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2013 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours à destination de l'Algérie.

Par un jugement n° 1400087 du 11 avril 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure contentieuse devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 juillet 2014, M.

C..., représenté par la Selarl d'avocats Eden avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2013 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours à destination de l'Algérie.

Par un jugement n° 1400087 du 11 avril 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure contentieuse devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 juillet 2014, M.C..., représenté par la Selarl d'avocats Eden avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400087 du 11 avril 2014 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 28 octobre 2013 contesté ;

3°) d'enjoindre à titre principal, au préfet du Var de lui délivrer un certificat de résidence valable un an portant mention "vie privée et familiale" dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à la Selarl d'avocats Eden avocats en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ou, en cas de non admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C...d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C...soutient que :

* sur le refus de titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée en fait et en droit ;

- sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen individualisé ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas applicables à un ressortissant algérien ;

- il remplit les conditions de l'article L. 311-12 de ce code pour se voir attribuer un titre de séjour en qualité de parent accompagnant un enfant malade, dès lors que l'état de santé de son fils nécessite un suivi médical psychologique qui ne peut être effectué en Algérie du fait des traumatismes qui y sont nés ;

- ce refus méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît aussi l'intérêt supérieur de son enfant garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- ce refus est entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

* sur l'obligation de quitter le territoire français :

- par la voie de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour, cette obligation est dépourvue de base légale ;

- il avait le droit d'être entendu avant l'édiction de cette mesure d'éloignement ;

- cette décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît aussi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- le préfet aurait dû lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours ;

* sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision est insuffisamment motivée en fait ;

- par la voie de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, cette décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

Par mémoire enregistré le 15 avril 2015, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;

- il se réfère à ses écritures de première instance.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision en date du 2 décembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire du 27 décembre 1968 ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 10 septembre 2013 dans l'affaire C 383/13 PPU ;

- l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 5 novembre 2014 dans l'affaire C 166/13 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de MmeD..., première conseillère.

1. Considérant que M.C..., de nationalité algérienne, a sollicité auprès des services du préfet du Var un certificat de résidence d'une durée d'un an en qualité de parent accompagnant un enfant malade sur le fondement des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il interjette appel du jugement du 11 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2013 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours à destination de l'Algérie ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que M. C...soutient que l'arrêté en litige est insuffisamment motivé en fait en ce qu'il ne fait pas mention de la naissance de son deuxième enfant le 2 septembre 2013 en France ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : [...] au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; que l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11 (...). " ;

4. Considérant que les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux Algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par suite, c'est à bon droit, contrairement à ce que soutient le requérant, que les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 311-12 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant que le requérant est entré, avec son épouse et son fils mineurB..., en France le 7 mars 2013 muni d'un visa C l'autorisant à séjourner en France pour une durée de 15 jours ne lui donnant pas vocation à rester en France ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire ; que s'il soutient que l'état de santé de son fils mineur exige le maintien de l'enfant en France dès lors qu'il a présenté un tableau de crise convulsive dans un contexte fébrile, l'avis du 27 juin 2013 du médecin de l'agence régionale de santé affirme que si cet état de santé nécessite une prise en charge médicale, l'enfant peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers celui-ci ; que, si le requérant rétorque que ce suivi médical en Algérie est impossible en raison du traumatisme que son enfant a subi du fait de la tentative d'enlèvement dont il aurait été victime en Algérie et qui aurait poussé ses parents à quitter précipitamment leur pays d'origine avec leur fils, la seule attestation d'un établissement public de santé en Algérie mentionnant que leur fils y a fait l'objet d'un suivi psychologique du 12 juillet 2012 au 21 mars 2013 "pour un traumatisme dû à une tentative de kidnapping par rapport au test qu'on a fait" et un article d'un journal algérien daté du 23 décembre 2012 mentionnant la pratique des enlèvements d'enfant en Algérie ne suffisent pas à établir que l'enfant ne pourrait pas, pour le motif invoqué par son père, suivre un traitement approprié dans son pays ; que le requérant n'invoque aucun élément médical sur la situation des soins en Algérie concernant la pathologie de son fils et ne produit aucune attestation médicale de nature à remettre en cause les dires du médecin de l'agence régionale de santé ; que la circonstance que cet enfant soit scolarisé à la rentrée scolaire 2013-2014 en classe de maternelle en France n'ouvre pas par elle-même droit au séjour ; que, d'ailleurs, le requérant n'établit pas, ni même n'allègue que cet enfant ne pourrait pas suivre une scolarité normale dans son pays d'origine ; que son épouse a fait l'objet le même jour que lui d'une obligation de quitter le territoire français ; que, si M. C...soutient aussi qu'un deuxième enfant est né le 22 septembre 2013 en France, le couple n'invoque aucun élément faisant obstacle à ce que leur vie familiale se reconstitue hors de France avec leurs deux enfants ; que les dispositions susvisées ne consacrent pas un droit aux étrangers de choisir librement le pays où établir leur vie familiale ; que M. C...n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu selon ses dires jusqu'à l'âge de 37 ans et où résident ses deux parents et quatre membres de sa fratrie ; que, par suite, et alors même que son épouse et lui ont un oncle et des cousins vivant régulièrement en France et que le couple présenterait des garanties d'insertion professionnelle, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions de séjour, le préfet n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté litigieux ; que, par suite, il n'a méconnu ni les dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas entaché son refus d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

7. Considérant en quatrième lieu qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 6, l'enfant aîné du requérant peut bénéficier d'un suivi médical adapté et d'une scolarité dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de cette convention a été écarté à bon droit par les premiers juges ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant d'abord que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité du refus de séjour doit être écarté ;

9. Considérant, ensuite, et d'une part, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ; que le II de l'article L. 511-1 prévoit que l'étranger dispose en principe d'un délai de trente jours pour satisfaire à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, ce délai pouvant toutefois être supprimé par décision de l'autorité administrative dans des cas limitativement énumérés ou être exceptionnellement prorogé eu égard à la situation personnelle de l'étranger ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 512-3 du même code : " L'obligation de quitter le territoire français ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n'a été accordé, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, ni avant que le tribunal administratif n'ait statué s'il a été saisi (...) " ; que, d'autre part, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

11. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la Charte des droits fondamentaux ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ; que, ainsi que la Cour de justice l'a jugé dans son arrêt du 5 novembre 2014 susvisé, ce principe ne s'oppose pas à ce que, dans le cadre de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour ;

12. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

13. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande,

de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

14. Considérant que M. C...fait valoir qu'il n'a pas été informé par le préfet qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement et mis en mesure de présenter ses observations sur l'éventualité d'une telle décision ainsi que sur ses modalités d'exécution, avant qu'il ne lui soit fait obligation de quitter le territoire français ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse faisait suite au rejet de sa demande de titre de séjour ; qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune obligation d'information ne pesait sur le préfet ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la décision ; que, dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qu'il tient du principe général du droit de l'Union ;

15. Considérant encore qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). II - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...). " ; que, si le requérant soutient qu'il appartenait au préfet, eu égard à sa situation particulière familiale, de lui accorder un délai de départ volontaire plus long que celui de 30 jours fixé par la décision litigieuse, il n'a pas fait état d'une situation particulière nécessitant la prolongation de ce délai ; qu'en tout état de cause, l'état de santé de son enfant, qui peut recevoir des soins appropriés en Algérie, et la naissance de son second enfant ne permettent pas par elles-mêmes d'établir que le préfet aurait commis une erreur manifeste en fixant à 30 jours le délai de départ volontaire de M. C...;

16. Considérant enfin qu'en l'absence d'argumentation spécifique invoquée par le requérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant par les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 lors de l'examen de la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne le pays de renvoi :

17. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, l'obligation de quitter le territoire litigieuse n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, la décision fixant le pays de renvoi n'est pas dépourvue de base légale ;

18. Considérant que la décision distincte litigieuse fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée en fait par la mention de la nationalité algérienne du requérant, par la précision que son épouse a la même nationalité, qu'elle a fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et que leur vie familiale peut se poursuivre dans leur pays d'origine notamment en raison de l'existence en Algérie d'un traitement approprié à l'état de santé de son fils ; que cette décision n'avait pas en tout état de cause à se prononcer sur les risques encourus par le requérant en cas de retour en Algérie, dès lors que l'intéressé ne faisait pas état de menaces personnelles encourues dans son pays d'origine ; que la décision litigieuse mentionne qu'elle ne méconnaît pas les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

19. Considérant qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle par les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus lors de l'examen de la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles qu'il a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à la Selarl Eden avocats et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président

- M. Laso, président-assesseur,

- MmeD..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.

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N° 14MA0298110

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02981
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-08;14ma02981 ?
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