Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'homologuer le rapport d'expertise de M.B..., déposé le 29 octobre 2007 au greffe du tribunal, de constater la responsabilité solidaire de l'association syndicale autorisée (ASA) du canal de Saint Lions et de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF) des Alpes de Haute-Provence, de les condamner solidairement à procéder aux travaux préconisés par l'expert dans la " solution n° 1, destruction du seuil ", afin de faire cesser le trouble, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, de les condamner solidairement à lui verser la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts et de mettre à la charge solidaire de l'ASA du canal de Saint Lions et de la DDAF des Alpes de Haute-Provence le versement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Par un jugement n° 1005953 du 27 mai 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 juin 2013, M.D..., représenté par Me C...D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 mai 2013 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de faire droit à ses demandes ;
3°) de mettre à la charge solidaire de l'ASA du canal de Saint Lions et de la DDAF des Alpes de Haute-Provence la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens et, en cas d'exécution forcée de la condamnation, le paiement des sommes correspondant au montant de l'article 10 du décret
n° 96-1080 du 12 décembre 1996 modifié par le décret n° 2001/212 du 8 mars 2001.
Il soutient :
- qu'il est propriétaire d'un vaste domaine immobilier, situé en partie sur le territoire de la commune de Clumanc, et qui est traversé par une rivière dénommée l'Asse de Clumanc ;
- que, selon l'article L. 215-2 du code de l'environnement, le cours d'eau lui appartient dans la traversée de sa propriété ;
- que, dans le courant de l'année 1986, l'ASA du canal de Saint Lions a fait réaliser sur l'Asse de Clumanc un seuil, dénommé seuil de Seïsset, sans son autorisation préalable ;
- qu'il avait donné son accord verbal uniquement sur les travaux de remise en état et d'entretien d'une prise d'eau existante et non pour la construction d'un ouvrage en béton en travers de la rivière ;
- que l'ASA de Saint Lions est intervenue en qualité de maître de l'ouvrage litigieux, sous maîtrise d'oeuvre de la DDAF des Alpes de Haute-Provence ;
- que l'existence de ce barrage seuil a fait artificiellement remonter le niveau des terres alluviales portant le lit de la rivière au même niveau que les champs qui le bordent en amont du seuil, notamment la plaine de Seïsset comprenant les terres agricoles dont il est propriétaire ;
- que, désormais, les terres de la plaine agricole fertile de Seïsset risquent à chaque crue de se trouver emportées et inondées, ce phénomène trouvant son origine directe et exclusive dans la construction du seuil litigieux ;
- qu'il y a urgence à ce que ce seuil soit détruit afin de redonner à la rivière son profil naturel d'équilibre ;
- que la création de ce seuil est constitutive d'une véritable voie de fait et d'une atteinte à son droit de propriété ;
- qu'il ressort clairement du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Marseille que ses terres subissent des dommages en raison de l'ouvrage incriminé ;
- que les travaux ont été réceptionnés sans réserves par la DDAF pour un montant de 148 961,60 francs TTC ;
- que l'expert conclut que la création du seuil et son défaut d'entretien par l'ASA de Saint Lions ont, d'une part, modifié le débit des matériaux solides et modifié le profil de l'Asse sur une distance d'environ 750 mètres à 1 kilomètre et, d'autre part, que dorénavant il est impossible de curer le lit de la rivière en amont du seuil, sauf à procéder à une opération d'extraction et non de curage ;
- que la DDAF a manqué à son obligation de conseil tandis que l'ASA a manqué à son obligation d'entretien de l'ouvrage ;
- qu'il souhaite que la solution identifiée par l'expert sous le n° 1, dite de destruction du seuil, soit retenue ;
- qu'il ne saurait être tenu pour responsable de l'entretien du lit de la rivière alors que le seuil a été construit contre son gré et qu'il est victime de son défaut d'entretien ;
- que les travaux de curage étaient autrefois inutiles en l'absence de seuil ;
- qu'en tout état de cause le département est habilité à assurer l'entretien des cours d'eau en vertu de l'article L. 211-7 du code de l'environnement ;
- qu'il a commencé à alerter la DDAF de ces difficultés dès 1996 ;
- que l'Etat ne communique aucun justificatif relatif à l'information qui lui aurait été donnée sur la nature et l'importance des travaux réalisés dans le lit de l'Asse ;
- que, dans ces conditions, son accord verbal ne saurait suffire compte tenu de l'ampleur des travaux réalisés ;
- qu'il était nécessaire d'obtenir son consentement éclairé sur les travaux qui étaient envisagés ;
- que la condition de l'anormalité du trouble de voisinage est remplie ;
- qu'il y a lieu de condamner solidairement la DDAF et l'ASA à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice qu'il subit depuis de nombreuses années.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2014, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a conclu au rejet de la requête.
Il soutient :
- que c'est à bon droit que le tribunal a rejeté comme ne relevant pas des pouvoirs dont dispose le juge administratif les conclusions à fin d'injonction présentées à titre principal par
M.D... ;
- que, depuis le jugement attaqué, M. D...s'est abstenu de saisir le préfet des Alpes de Haute-Provence d'une demande tendant à la destruction du seuil litigieux ;
- que la requête d'appel ne comporte, pas plus qu'en première instance, la justification des préjudices dont entend se prévaloir M.D... ;
- qu'il ne justifie ainsi ni dans son principe, ni dans son étendue, d'un quelconque préjudice financier imputable à la création du seuil critiqué.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Firmin, rapporteur ;
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;
- et les observations de Me E...substituant Me D...pour M. A...D....
1. Considérant que M. D...est propriétaire d'un vaste domaine immobilier, situé en partie sur le territoire de la commune de Clumanc, et qui est traversé par une rivière dénommée l'Asse de Clumanc ; que, dans le courant de l'année 1986, l'ASA du canal de Saint Lions a fait réaliser, sur la propriété de M. D...et dans le lit de l'Asse de Clumanc, un seuil dénommé seuil de Seïsset, sous la maîtrise d'oeuvre de la DDAF des Alpes de Haute-Provence ; que M.D..., estimant que la présence de cet ouvrage entraînait le dépôt des matériaux solides habituellement charriés par les eaux et l'exhaussement du fil d'eau de la rivière au même niveau que les terres agricoles dont il est propriétaire et qui subiraient, de ce fait, des inondations récurrentes, a, après expertise ordonnée par le tribunal administratif de Marseille, saisi cette juridiction d'une demande tendant à la condamnation solidaire de l'ASA du canal de Saint Lions et de la DDAF des Alpes de Haute-Provence à procéder aux travaux préconisés par l'expert dans la " solution n° 1, destruction du seuil ", afin de faire cesser le trouble et à lui verser la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts ; qu'il interjette appel du jugement du 27 mai 2013 par lequel les premiers juges ont rejeté sa demande ;
2. Considérant qu'en cause d'appel M. D...a abandonné ses conclusions aux fins d'injonction à titre principal qui tendaient à ce que la juridiction administrative ordonne sous astreinte la destruction de l'ouvrage litigieux et que le tribunal a rejeté à bon droit ;
3. Considérant que la mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec cet ouvrage ou cette opération ; que les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers ;
4. Considérant que le requérant sollicite que lui soit allouée la somme globale de
25 000 euros en réparation des préjudices qu'il subit en raison des inondations répétitives de ses terres agricoles qui trouvent leur origine, selon lui, dans la présence du seuil ci-dessus décrit dont le défaut d'entretien serait la cause depuis plusieurs années ; qu'il s'abstient toutefois de produire un quelconque justificatif à l'appui de cette demande, susceptible d'en établir, sinon le bien fondé, du moins la façon dont le montant de cette somme globale a été déterminé, comme il lui a déjà été opposé par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ainsi que par les motifs du jugement attaqué ; qu'il ressort du rapport de l'expertise ordonnée par les premiers juges que les terres agricoles dont M. D...allègue de la dégradation sont données à bail à un fermier, lequel a toujours scrupuleusement payé son loyer ; qu'ainsi, à supposer même que les désordres allégués soient établis et puissent être considérés en lien direct et certain avec le défaut d'entretien par l'ASA du canal de Saint Lions de son ouvrage hydraulique et la prétendue absence de conseil de la part des services de l'Etat à ce sujet en leur qualité de maître d'oeuvre de l'ouvrage, M. D...n'est fondé à se plaindre ni d'un trouble de jouissance, ni d'une perte de loyer ; qu'aucune des pièces versées au dossier n'établit une quelconque perte de valeur vénale des terres propriété de M.D..., dont il résulte de l'instruction qu'elles sont situées dans le lit moyen de l'Asse, laquelle n'a d'ailleurs pas été retenue par l'expert ; qu'il n'est pas plus fondé à se prévaloir de la commission d'une voie de fait par l'ASA du canal de Saint Lions et les services de l'Etat dès lors qu'il ressort de ses propres écritures qu'il a autorisé, au moins verbalement, les travaux litigieux, dont la réalisation n'est pas manifestement étrangère à l'un des pouvoirs appartenant à l'administration ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge solidaire de l'ASA du canal de Saint Lions et de l'Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que
M. D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., à l'association syndicale autorisée du canal de Saint Lions et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Copie en sera adressé au préfet des Alpes de Haute-Provence.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2015 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Firmin, président assesseur,
- MmeF..., première conseillère.
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N° 13MA02443 2