Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme AghavniD..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 25 juin 2013 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par une ordonnance n° 1303541 du 30 août 2013, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 octobre 2013, MmeD..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 30 août 2013 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 25 juin 2013 ;
3°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;
4°) de condamner l'Etat à verser à Me E...une somme de 1 196 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
5°) subsidiairement, de surseoir à statuer en saisissant la Cour de justice de l'Union européenne des questions de savoir si l'office français de protection des réfugiés et apatrides peut être assimilé à une instance juridictionnelle, si le tribunal administratif peut être regardé comme une juridiction compétente permettant d'exercer le droit à un recours effectif au sens du a) de l'article 39 de la directive 2005/85 et si une obligation de quitter le territoire peut légalement être prise alors qu'un recours contre une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides est pendant devant la Cour nationale du droit d'asile.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée, qui a été rendue sans instruction et sans audience préalables, en méconnaissance des articles 3, 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est irrégulière ; notamment, en raison de leur assignation à résidence, ils auraient dû bénéficier de plein droit d'une audience publique, assistés de leur conseil, dans un délai de soixante-douze heures ;
- le premier juge a également appliqué à tort les dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dès lors qu'il avait soulevé en première instance une question préjudicielle destinée à la Cour de justice de l'Union Européenne, estimant qu'une décision de retour ne pouvait pas être prise avant que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur leur demande d'asile et qu'un tel moyen ne saurait être inopérant à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français qui est une décision de retour au sens de la directive 2008/115/CE ;
- le défaut de recours suspensif devant la Cour nationale du droit d'asile est contraire à l'article 39 de la directive 2005/85 ; l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'est pas une instance juridictionnelle au sens de ladite directive, mais une administration ; le tribunal administratif n'est pas une instance compétente en matière d'asile ; par suite, le préfet des Pyrénées-Orientales ne pouvait légalement pas prendre une obligation de quitter le territoire français, qui est une décision de retour au sens de la directive 2008/115/CE, avant que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur sa demande d'asile ; ce moyen, soulevé en première instance, n'est pas inopérant, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge ;
- à titre subsidiaire, il y aura lieu de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle pour lui demander si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut être assimilé à une instance juridictionnelle, si le tribunal administratif peut être regardé comme étant une instance compétente permettant d'exercer un droit à un recours effectif devant une juridiction concernant une demande d'asile et si une obligation de quitter le territoire français peut être prise alors qu'une demande d'asile est en cours.
Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2014, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 17 juin 2015, le préfet des Pyrénées-Orientales, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme D...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 novembre 2013.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 ;
- la directive n° 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur.
1. Considérant que, par une ordonnance en date du 30 août 2013, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme D...tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2013 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme D...relève appel de cette ordonnance ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) et les présidents de formation de jugement des tribunaux peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;
3. Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier, Mme D...a notamment invoqué, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige, le fait d'avoir été privée du droit à un recours effectif devant une juridiction et en particulier le fait que l'arrêté en litige avait été pris sans attendre les suites données à son recours devant la Cour nationale du droit d'asile, ainsi que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ; que la requérante avait également sollicité la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ; que ces moyens, qui étaient assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien et n'étaient pas dépourvus des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé, n'étaient ni inopérants ni irrecevables ; que les termes dans lesquels ils étaient exprimés permettaient au juge d'en saisir la portée et d'en apprécier le mérite au regard des pièces produites ; que, dès lors, la demande de Mme D...n'entrait pas dans le champ d'application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et relevait de la seule compétence d'une formation de jugement collégiale ; qu'il suit de là que l'ordonnance du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier en date du 30 août 2013 est entachée d'irrégularité et doit être annulée pour ce motif sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D...devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., ressortissante arménienne née en 1989 déclare être entrée en France en décembre 2011 avec son époux, M. C..., de nationalité arménienne, et leurs deux enfants Aram et Erevan, nés en janvier 2009 et mai 2011 ; que le 13 décembre 2011, M. C...et Mme D...sollicitent l'asile auprès du préfet de l'Hérault ; que cependant les intéressés ayant déjà demandé l'asile en Pologne le 11 novembre 2011, le préfet, par des décisions des 20 décembre 2011 et 7 février 2012, les informe, d'une part, de ce que la France n'est pas responsable de leur demande d'asile et qu'il va demander leur reprise en charge à la Pologne, en application des dispositions du règlement CE du Conseil n° 343/2003 du 18 février 2003 qui organisent la répartition des compétences entre les Etats membres et permettent ainsi de régler les demandes multiples de statut de réfugié, et d'autre part, qu'il refuse leur admission provisoire au séjour sur le fondement de l'article L. 741-4 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après avoir obtenu l'accord des autorités polonaises le 23 décembre 2011, qui se déclarent responsables de l'instruction de la demande d'asile des époux C...-D..., et acceptent leur reprise en charge sur leur territoire, le préfet des Pyrénées-Orientales, par un arrêté en date du 7 février 2012, décide leur remise aux autorités polonaises, en les assignant le même jour à résidence, afin de pouvoir exécuter cette décision ; que toutefois, ces décisions n'ayant pas été exécutées, le dépassement du délai de six mois prévu par les dispositions de l'article 19 dudit règlement pour assurer le transfert des époux C...-D... dans ce pays, en a, de droit, transféré la responsabilité à la France, laquelle devait donc se prononcer sur la demande d'asile de M. C...et de Mme D...; que par deux décisions du 12 mars 2013, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé leur admission au séjour, sur le fondement de l'article L. 741-4 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que l'Arménie figure sur la liste des pays considérés comme sûrs, et a transmis leur demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le cadre de la procédure dite " prioritaire ", en les autorisant à rester en France jusqu'à la décision de l'Office ; qu'à la suite des deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 31 mai 2013, notifiées aux intéressés le 14 juin 2013, rejetant leurs demandes d'asile, le préfet des Pyrénées-Orientales a pris à l'encontre des époux C...-D..., le 25 juin 2013, deux arrêtés portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que toutefois les époux C... -D... ont introduit le 28 juin 2013 deux recours contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides auprès de la Cour nationale du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant qu'il résulte de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'admission au séjour d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que dans les situations limitativement énumérées à cet article, au nombre desquelles figure le fait que : " 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres Etats ; 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande. " ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France (...), l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) " et qu'enfin, aux termes de l'article L. 742-6 : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. (...) " ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 8° de l'article L. 314-11 du même code, que l'examen d'une demande de séjour au titre de l'asile peut conduire successivement à l'intervention d'une décision du préfet sur l'admission provisoire au séjour en France pour permettre l'examen de la demande d'asile, puis d'une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile, enfin, d'une décision du préfet statuant sur le séjour en France, le cas échéant à un autre titre que l'asile et éventuellement assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et l'oblige à quitter le territoire français ne sont pas prises pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour opposé le 7 février 2012 à Mme D...par le préfet de l'Hérault ne peut être utilement invoqué à l'appui du recours dirigé contre l'arrêté du 25 juin 2013 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales, après la notification du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, l'a obligée à quitter le territoire français ;
8. Considérant, en second lieu, que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution, après la décision de l'OFPRA rejetant une demande d'asile, qu'à l'encontre d'un étranger entrant dans le champ d'application du 2° au 4° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il incombe de ce fait au juge saisi de la contestation de la légalité d'une obligation de quitter le territoire français après la décision de l'OFPRA fondée sur le 2° de cet article, de s'assurer que l'étranger entre bien dans le cas visé par ces dispositions ; que la seule circonstance qu'une décision administrative ait refusé l'admission au séjour au motif tiré de ce que le pays d'origine de l'intéressé appartient à la liste des pays considérés comme sûrs et qu'elle n'ait pas été contestée ou qu'elle n'ait pas été annulée par le juge administratif ne fait pas obstacle à ce que le juge détermine lui-même, sans se prononcer sur la légalité de cette décision, si la demande d'asile relevait bien des cas mentionnés à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans l'hypothèse où il estime que tel n'était pas le cas, et alors même que l'intéressé n'avait pas été effectivement admis à séjourner en France, cet étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours ;
9. Considérant que Mme D...fait valoir qu'elle a été privée du droit à un recours effectif dès lors que l'arrêté du 25 juin 2013 a été pris sans attendre les suites données à son recours devant la Cour nationale du droit d'asile ; que toutefois, l'Arménie appartenant effectivement à la liste des pays considérés comme sûrs, au sens du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, établie par le conseil d'administration de l'OFPRA, c'est à bon droit que le préfet des Pyrénées-Orientales a estimé que Mme D...relevait des dispositions précitées du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par suite, il a pu légalement prendre une décision obligeant Mme D...à quitter le territoire français après la notification de décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6, sans attendre que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur le recours forme par l'intéressée ; que le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en refusant d'attendre la décision de la Cour nationale du droit d'asile avant de prendre ladite décision doit dès lors être écarté ;
10. Considérant, en troisième lieu, que, si l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorise le préfet à prendre une mesure d'éloignement à l'égard de l'étranger dont l'admission provisoire au séjour a été refusée sur le fondement du 2° ou du 4° de l'article L. 741-4 de ce code aussitôt que la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, d'une part l'intéressé peut contester devant le tribunal administratif les motifs de sa non-admission au séjour et demander, notamment, la suspension de cette décision, d'autre part, les articles L. 512-1 et suivants du même code permettent à l'étranger de former un recours en annulation devant le tribunal contre la mesure d'éloignement ; qu'en vertu de l'article L. 513-1, celle-ci ne peut être mise à exécution tant que le délai de recours n'a pas expiré ; qu'en outre, l'exercice d'un tel recours a lui-même pour effet de suspendre l'exécution de la mesure jusqu'à la décision du tribunal ; qu'à l'occasion de sa demande d'annulation, l'étranger peut faire valoir les risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que la mesure d'éloignement ne peut être exécutée sans que l'étranger n'ait été mis à même de soumettre à un juge impartial et indépendant l'appréciation de son droit à se maintenir en France compte tenu des dangers auxquels il serait exposé s'il devait être renvoyé dans son pays d'origine ;
qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec l'article 39 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 doit être écarté ; que l'intéressée n'est pas non plus fondée à soutenir que le caractère écrit de la procédure devant la juridiction administrative ne permettrait pas un examen de la crédibilité des déclarations des étrangers effectué dans le cadre de l'examen de leur situation dans le pays d'origine, en méconnaissance des dispositions de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004, qui imposent à l'autorité saisie d'une demande d'asile de s'informer, avant de statuer, de la situation générale du pays d'origine ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale (...) " ;
12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme D...ne bénéficiait du droit de se maintenir en France que jusqu'à la notification de la décision du 31 mai 2013 par laquelle l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut de réfugié ; que toutefois, l'arrêté contesté n'a ainsi pas eu pour effet d'empêcher Mme D... de saisir la Cour nationale du droit d'asile d'un recours contre ladite décision ; que le droit au recours effectif garanti par les stipulations de l'article 13 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme n'implique pas que la requérante puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile, dès lors que, notamment, elle peut s'y faire représenter par son conseil ; que, de même, l'intéressée aurait pu contester devant les juridictions administratives, y compris par la voie d'une demande de référé suspension, la décision ayant refusé son admission provisoire au séjour et impliquant l'examen de sa demande d'asile selon la procédure dite prioritaire ; que, si elle s'en est abstenue, elle a formé en revanche une demande d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination prises à son encontre devant le tribunal administratif de Montpellier, par un recours ayant eu pour effet de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement le concernant ; que l'intéressée a donc bénéficié d'un temps suffisant pour présenter utilement ses observations ; que, devant le tribunal, elle a fait valoir les risques de traitements inhumains et dégradants auxquels l'exposerait son renvoi dans son pays d'origine ; que, dans ces circonstances, il n'apparaît pas que Mme D...ait été privée de son droit à un recours effectif en violation de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, dès lors que les dispositions de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 ont été transposées en droit français par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et le décret n° 2008-702 du 15 juillet 2008 relatif au droit d'asile, Mme D...n'est pas fondée à se prévaloir directement des dispositions de l'article 39 de cette directive à l'encontre de la mesure d'éloignement prise à son encontre ;
13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
14. Considérant qu'il est constant que Mme D...et son époux sont tous deux en situation irrégulière sur le territoire français ; que, l'arrêté préfectoral contesté n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer les deux enfants du couple de leurs parents ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;
15. Considérant, en dernier lieu, que si Mme D...se prévaut de l'engagement de son époux en tant que bénévole dans une association, de son apprentissage rapide de la langue française et de problèmes de santé, ces seules circonstances ne suffisent pas à démontrer que le préfet des Pyrénées-Orientales aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante, laquelle ne peut justifier au mieux que d'une présence en France de moins de dix-huit mois à la date de l'arrêté litigieux ;
En ce qui concerne la décision fixant l'Arménie comme pays de destination :
16. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
17. Considérant que si Mme D...dont la demande d'asile ainsi qu'il est dit plus haut, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, fait valoir qu'elle ne peut retourner en Arménie en raison des persécutions dont elle pourrait faire l'objet par des réseaux mafieux et de l'impossibilité de trouver une protection auprès des autorités arméniennes, elle n'apporte pas d'éléments probants permettant de considérer qu'elle serait effectivement et personnellement exposée à une menace grave en cas de retour dans son pays ; que par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant l'Arménie comme pays de destination, aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que Mme D...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté en date du 25 juin 2013 du préfet des Pyrénées-Orientales ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme D... de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'Etat tirées des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 1303541 en date du 30 août 2013 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Mme D...devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de la requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme AghavaniD...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2015 où siégeaient :
- M. Martin, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R.222-26 du code justice administrative,
- M. B...et Mme Chenal-Peter, premiers conseillers,
Lu en audience publique, le 9 juillet 2015.
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N° 13MA04021 2
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