La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/07/2015 | FRANCE | N°13MA04863

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 07 juillet 2015, 13MA04863


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 20 juin 2011 par laquelle le conseil municipal de Leucate a procédé au déclassement de l'ancienne voie de desserte de la résidence Ulysse à Port-Leucate.

Par un jugement n° 1104249 du 16 octobre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2013, M.A..., représenté par MeB..., demande à

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 octobre 2013...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 20 juin 2011 par laquelle le conseil municipal de Leucate a procédé au déclassement de l'ancienne voie de desserte de la résidence Ulysse à Port-Leucate.

Par un jugement n° 1104249 du 16 octobre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2013, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 octobre 2013 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération du 20 juin 2011 ;

3°) d'ordonner par voie de conséquence la remise en état des lieux en application de l'article 911-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Leucate les entiers dépens de l'instance, comprenant notamment le droit de plaidoirie et la contribution pour l'aide juridique, ainsi que la somme de 2 500 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de communication et de visa des pièces qu'il a produites les 24 et 26 septembre 2013 ;

- il est également irrégulier en tant qu'il a déclaré la demande irrecevable en se fondant sur la qualification de chemin rural, qui n'est pas un moyen d'ordre public et qui est entachée d'erreur de droit, faisant ainsi obstacle à la contestation de la délibération alors qu'elle est entachée d'un vice de procédure substantiel, ce qui est constitutif d'une autre erreur de droit ;

- le dossier d'enquête publique n'a pas été notifié aux propriétaires des parcelles comprises dans l'emprise du projet, en violation de l'article R. 141-7 du code de la voirie routière ;

- l'arrêté prescrivant l'ouverture de l'enquête publique n'a pas été affiché conformément aux dispositions de l'article R. 141-5 du même code, ni même fait l'objet d'une notification aux propriétaires des parcelles comprises dans l'emprise du projet ;

- cet arrêté ainsi que le dossier d'enquête publique sont insuffisants ;

- l'article L. 128-2 du code de la voirie routière a été méconnu en l'absence de mise en demeure d'acquérir la voie aux riverains de la voie publique ;

- la délibération est entachée d'un détournement de pouvoir et d'un détournement de procédure ;

- rien ne s'oppose à la remise en état des lieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2014, la commune de Leucate, représentée par MeD..., de la SCP HGC avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- elle s'en remet à la sagesse de la Cour sur la qualification de la voie en cause ;

- les autres moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de la voirie routière ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné Mme Evelyne Paix, président-assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bédier, président de la 7ème Chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.A....

1. Considérant que, par jugement du 16 octobre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A...tendant à l'annulation de la délibération du 20 juin 2011 par laquelle le conseil municipal de Leucate a procédé au déclassement du domaine public de l'ancienne voie de desserte de la résidence Ulysse à Port-Leucate ; que M. A...relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique (...) est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public " ; qu'aux termes de l'article L. 2111-14 du même code : " Le domaine public routier comprend l'ensemble des biens appartenant à une personne publique (...) et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées " ; qu'aux termes de l'article L. 141-1 du code de la voirie routière : " Les voies qui font partie du domaine public routier communal sont dénommées voies communales " ; qu'enfin l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime dispose : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune "

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'emprise de l'ancienne voie de desserte de la résidence Ulysse, laquelle a été créée dans le cadre d'un projet d'aménagement lancé en 1965, appartient à la commune de Leucate ; qu'elle est située en agglomération ; que la commune l'a goudronnée et équipée de l'éclairage public ; qu'elle est ouverte à la circulation publique ; que, dans ces conditions et quand bien même elle ne figure pas sur le tableau des voies communales, qui n'est pas tenu à jour, elle constitue, en application des dispositions des articles L. 2111-1 et L. 2111-14 du code général de la propriété des personnes publiques ainsi que de celles de l'article L. 141-1 du code de la voirie routière, une voie communale appartenant au domaine public routier communal ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal a estimé que la voie en cause n'était pas une voie communale mais un chemin rural au sens des dispositions de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime ; que, par suite, c'est également à tort que les premiers juges ont déduit de cette qualification qu'aucune décision de déclassement du chemin en litige n'était nécessaire et que la délibération contestée présentait ainsi un caractère superfétatoire et n'était pas susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir ; que, par conséquent et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés sur ce point, M. A...est fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité et doit, pour ce motif, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur légalité de la délibération du 20 juin 2011 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 141-5 du code de la voirie routière : " Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant toute la durée de celle-ci, l'arrêté du maire est publié par voie d'affiche et éventuellement par tout autre procédé " ;

6. Considérant que s'il appartient à l'autorité administrative de procéder à l'ouverture de l'enquête publique et à la publicité de celle-ci dans les conditions fixées par les dispositions du code de la voirie routière précédemment citées, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 4 mai 2011, le maire de Leucate a prescrit l'ouverture de l'enquête publique sur le projet de déclassement, celle-ci devant se dérouler du 20 mai au 3 juin 2011 inclus ; que, par un arrêté modificatif du 19 mai 2011, il a décidé de prolonger l'enquête jusqu'au lundi 6 juin inclus, la mairie étant fermée le vendredi 3 juin en raison d'une fête locale ; qu'il résulte du certificat d'affichage du 6 juin 2011 produit par la commune, visé par le commissaire enquêteur, que les deux arrêtés des 4 et 19 mai 2011 " ont été affichés sur les panneaux municipaux à compter du 20 mai 2011 au 6 juin 2011 inclus " ; que l'arrêté du 4 mai 2011 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique n'a donc pas été affiché quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête mais seulement pendant la durée de l'enquête elle-même, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 141-5 du code de la voirie routière ; qu'en l'espèce, ce vice de procédure n'a nécessairement pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération de déclassement ; que, par suite, la délibération du 20 juin 2011 est entachée d'illégalité ;

8. Considérant que le moyen retenu suffisant à annuler la délibération contestée, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens de la demande ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à demander l'annulation de la délibération du 20 juin 2011 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

11. Considérant qu'au regard du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que la commune de Leucate procède à la remise en état des lieux ; que, par suite, les conclusions correspondantes doivent être rejetées ;

Sur les autres conclusions des parties :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Leucate, partie perdante, la somme globale de 2 000 euros au titre de la contribution pour l'aide juridique, prévue à l'article R. 761-1 du code de justice administrative, et des dispositions de l'article L. 761-1 du même code ; qu'en revanche les droits de plaidoirie ne sont pas au nombre des dépens énumérés par l'article R. 761-1 ; que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle aux conclusions de commune de Leucate présentées au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 octobre 2013 est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de Leucate en date du 20 juin 2011 est annulée.

Article 3 : La commune de Leucate versera à M. A...la somme globale de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et à la commune de Leucate.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Paix, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Chanon, premier conseiller,

- Mme Jorda-Lecroq, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2015.

''

''

''

''

2

N° 13MA04863

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04863
Date de la décision : 07/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

71-02-002 Voirie. Régime juridique de la voirie. Déclassement d'une voie.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP HENRY GALIAY CHICHET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-07-07;13ma04863 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award