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06/07/2015 | FRANCE | N°13MA03181

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 06 juillet 2015, 13MA03181


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme NadineTazia demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle a subis à raison de la carence de l'Etat à la reloger.

Par un jugement n° 1204714 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée 24 juillet 2015, MmeA..., représentée par MeB...,

demande à la cour :

- de réformer le jugement du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme NadineTazia demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle a subis à raison de la carence de l'Etat à la reloger.

Par un jugement n° 1204714 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée 24 juillet 2015, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

- de réformer le jugement du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 400 euros au titre du préjudice matériel qu'elle a subi et 29 600 euros au titre du préjudice moral ;

- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande est bien fondée, comme l'a jugé le tribunal ;

- l'indemnisation du préjudice est insuffisante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2015, le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'existence du préjudice moral n'est pas établie ;

- la cour administrative d'appel de Paris ne condamne pas à des sommes aussi élevées que celles qui sont demandées ;

- le calcul théorique, par rapport au coût du loyer dans le secteur social, ne peut être retenu.

Mme Tazia été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 octobre 2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- et les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public.

1. Considérant que MmeA..., qui avait saisi la commission de médiation des Bouches-du-Rhône sur le fondement du droit opposable au logement, a été déclarée prioritaire et devant être relogée en urgence par décision de cette commission du 6 mai 2010 ; que le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement du 6 mai 2011 devenu définitif, enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au logement de Mme Tazidans un délai de deux mois sous astreinte destinée au fonds d'aménagement urbain de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de 25 euros par jour de retard ; que par un jugement du 25 juin 2012, devenu définitif, le tribunal administratif de Marseille a enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au logement de Mme Tazidans un délai de trois mois sous astreinte destinée au fonds d'aménagement urbain de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de 50 euros par jour de retard ; que Mme Tazirelève appel du jugement par lequel le tribunal administratif a limité la condamnation de l'Etat à une somme de 800 euros ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 300-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le droit à un logement décent et indépendant (...) est garanti par l'Etat à toute personne qui (...) n'est pas en mesure d'y accéder par ses propres moyens ou de s'y maintenir. / Ce droit s'exerce par un recours amiable puis, le cas échéant, par un recours contentieux dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent article et les articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1. " ; qu'aux termes du II de l'article L. 441-2-3 du même code : " (...) Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. Elle détermine pour chaque demandeur, en tenant compte de ses besoins et de ses capacités, les caractéristiques de ce logement (...) / La commission de médiation transmet au représentant de l'Etat dans le département la liste des demandeurs auxquels doit être attribué en urgence un logement. / (...) Le représentant de l'Etat dans le département désigne chaque demandeur à un organisme bailleur disposant de logements correspondant à la demande. En Ile-de-France, il peut aussi demander au représentant de l'Etat d'un autre département de procéder à une telle désignation. (...) / En cas de refus de l'organisme de loger le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département qui l'a désigné procède à l'attribution d'un logement correspondant aux besoins et aux capacités du demandeur sur ses droits de réservation. (...) " ; que selon les dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code précité : " I.-Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence et qui n'a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement. (...) / Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d'urgence et que n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l'Etat et peut assortir son injonction d'une astreinte. " ; qu'aux termes de l'article R. 441-16-1 du même code : " A compter du 1er décembre 2008, le recours devant la juridiction administrative prévu au I de l'article L. 441-2-3-1 peut être introduit par le demandeur qui n'a pas reçu d'offre de logement tenant compte de ses besoins et capacités passé un délai de trois mois à compter de la décision de la commission de médiation le reconnaissant comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence. Dans les départements d'outre-mer et, jusqu'au 1er janvier 2014, dans les départements comportant au moins une agglomération, ou une partie d'une agglomération, de plus de 300 000 habitants, ce délai est de six mois. " ;

3. Considérant que les dispositions précitées, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé leur adoption, fixent pour l'Etat une obligation de résultat dont peuvent se prévaloir les demandeurs ayant exercé les recours amiable ou contentieux prévus à l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; que pour rendre effectif le droit à un logement décent et indépendant, dont l'Etat est le garant, le législateur a, d'une part, prescrit que le représentant de l'Etat dans le département du demandeur, ou des autres départements en ce qui concerne la région Ile-de-France, saisisse les bailleurs sociaux en vue du relogement de ce dernier dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision de la commission de médiation et, en cas de refus de ces organismes, procède à l'attribution d'un logement sur ses droits de réservation, et, d'autre part, institué un recours spécifique en faveur des demandeurs prioritaires n'ayant pas reçu d'offre, devant un juge doté d'un pouvoir d'injonction et d'astreinte pour que leur relogement soit assuré ;

4. Considérant qu'il est constant que Mme Tazin'a toujours pas pu obtenir le bénéfice d'un logement décent ; que les jugements du 6 mai 2011 et 25 juin 2012 du tribunal administratif de Marseille enjoignant au préfet des Bouches-du-Rhône d'assurer le relogement de Mme Taziet de sa famille n'ont pas été exécutés ; que cette double carence est constitutive de fautes de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur les préjudices :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Tazivit depuis de nombreuses années, avec ses quatre enfants, dans un logement exigu et insalubre n'offrant pas des conditions normales d'habitabilité ; qu'elle est personnellement fondée à demander l'indemnisation des troubles de toute nature ayant résulté de son maintien dans ces conditions de logement précaires du fait des carences fautives de l'administration ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature personnellement subis par Mme Tazidepuis le mois de mai 2011 et du trouble apporté à l'intéressée par la non exécution des jugements du tribunal, en portant la somme allouée par le tribunal à 8 000 euros tous intérêts compris au jour du présent arrêt ; qu'en revanche, elle n'établit pas l'existence d'un préjudice matériel tenant à la différence entre le montant des loyers qu'elle a versés durant cette période et celui qu'elle aurait pu être amenée à régler s'il lui avait été donné satisfaction dès lors qu'il n'est pas établi que le loyer du logement qu'elle aurait pu occuper serait inférieur à celui qu'elle occupe ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que Mme Tazia obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que la motivation de ces conclusions permet de les regarder comme demandant à la cour de verser une somme au titre de ces dernières dispositions ; que si ces conclusions devaient être lues comme demandant également la condamnation de l'Etat à verser une somme au titre des frais non compris dans les dépens de première instance, le motif retenu par le tribunal n'est pas contesté en appel ; qu'il en résulte que la demande formulée au titre des frais non compris dans les dépens de première instance ne peut qu'être rejetée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à Me Taxilla somme de 2 000 euros, ce versement emportant renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 800 (huit cents) euros au versement de laquelle a été condamné l'Etat par le jugement susvisé est portée à 8 000 (huit mille) euros.

Article 2 : Le jugement susvisé est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 (deux mille) euros à Me Taxilau titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce versement emportant renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme NadineTazi, à Me Taxilet au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2015, où siégeaient :

- M. Guerrive, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- M.Thiele, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 juillet 2015.

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N° 13MA03181

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03181
Date de la décision : 06/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

38-07-01 Logement.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : TAXIL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-07-06;13ma03181 ?
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