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23/04/2015 | FRANCE | N°14MA04811

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 23 avril 2015, 14MA04811


Vu, enregistrée le 5 décembre 2014, la requête présentée pour Mme E...C..., demeurant ...par le cabinet d'avocats Preziosi et Ceccaldi ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1403421 du 26 novembre 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande, présentée sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, tendant à la condamnation solidaire du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins et de la société Axa France, son assureur, à lui verser une provision de 107 739,50 euros à valoi

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Vu, enregistrée le 5 décembre 2014, la requête présentée pour Mme E...C..., demeurant ...par le cabinet d'avocats Preziosi et Ceccaldi ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1403421 du 26 novembre 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande, présentée sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, tendant à la condamnation solidaire du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins et de la société Axa France, son assureur, à lui verser une provision de 107 739,50 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice corporel qu'elle estime avoir subi à raison des fautes commises dans sa prise en charge le 9 octobre 2012 par le centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de condamner solidairement le centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins et la société Axa France à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner solidairement le centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins et la société Axa France aux entiers dépens ;

......................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2015 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me B... du cabinet Preziosi et Ceccaldi pour Mme C...et de Me A...du cabinet Andrei-Zuelgaray pour le centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins ;

1. Considérant que MmeC..., alors âgée de 81 ans, a appelé le 9 octobre 2012 son médecin traitant en raison de l'apparition de céphalées et de vomissements ; que celui-ci s'est déplacé à son domicile à 13 heures et a rédigé un courrier destiné à la clinique Plein Ciel en vue de son hospitalisation et de la réalisation d'un scanner ; que cet établissement ne disposant pas de service de neuro-imagerie, elle a été dirigée vers le service des urgences du centre hospitalier d'Antibes où elle est arrivée à 17 h 42 ; qu'après un examen clinique et un scanner cérébral, elle a été renvoyée à son domicile le soir même à 22 h 39 ; que, le lendemain matin, eu égard à la paralysie de ses membres inférieur et supérieur gauches, elle a été transportée à nouveau aux urgences du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins où l'IRM pratiquée a conclu à l'absence d'AVC ; qu'après avoir passé la nuit dans l'unité d'hospitalisation de courte durée, le chef de service des urgences a conclu le 11 octobre 2012 à un accident ischémique protubérantiel et le neurologue consulté a confirmé un accident ischémique du tronc cérébral ; que, saisi par Mme C..., l'assureur du centre hospitalier, Axa France, a diligenté une expertise amiable contradictoire ; que le rapport de cet expert, le DrD..., conclut à un défaut de prise en charge de la requérante par le service des urgences du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins à l'origine d'un préjudice corporel et notamment d'un déficit fonctionnel permanent de 20 % ; que Mme C...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice la condamnation solidaire du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins et de la société Axa France à lui verser une provision de 107 739,50 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel ; que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés a rejeté sa demande ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence de demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ; qu'aux termes de l'article R. 541-3 du même code : " L'ordonnance rendue par le président du tribunal administratif ou par son délégué est susceptible d'appel devant la cour administrative d'appel " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 I du code de la santé publique, applicable pour des soins réalisés après le 5 septembre 2001 : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...). " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la patiente, qui souffrait de maux de tête associés à des nausées et à des vomissements, a été examinée le 9 octobre 2012 à 13 heures par son médecin traitant qui a rédigé un courrier à l'attention des médecins hospitaliers qui allaient la suivre et qui, suspectant un accident vasculaire cérébral (AVC), demandait la réalisation d'un scanner pour éliminer l'hypothèse d'une hémorragie cérébrale sur antécédents d'hypertension artérielle et de diabète non insulinodépendant ; que si Mme C...soutient, en se fondant sur le rapport du 15 juin 2013 de l'expert mandaté par l'assureur du centre hospitalier, le DrD..., qu'elle n'a été vue par un médecin des urgences qu'après 19 heures et que ce délai était beaucoup trop long selon les recommandations pour une prise en charge efficace d'une suspicion d'AVC en 4 heures maximum, il résulte de l'instruction que Mme C..., qui avait été orientée à tort par son médecin traitant vers une clinique privée non pourvue d'un service de neuro-imagerie, n'est arrivée aux urgences du centre hospitalier d'Antibes qu'à 17 h 42, qu'elle a fait l'objet d'une prise en charge paramédicale à 18 h 42 et a été examinée par un médecin à 19 h 28 ; que, dans ces conditions, le retard invoqué de prise en charge n'est pas imputable au centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins ; qu'en tout état de cause, le délai susmentionné recommandé de 4 heures, à le supposer même scientifiquement prouvé en l'absence de toute référence à de la littérature médicale par l'expert sur ce point, était déjà dépassé lorsqu'elle est arrivée aux urgences du centre hospitalier ; que ce retard invoqué de prise en charge ne peut être regardé en l'état comme une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ;

5. Considérant en deuxième lieu, que Mme C...soutient, en se fondant sur le rapport du même expert le DrD..., que le fait d'avoir été renvoyée le 9 octobre 2012 à 22 h 28 à son domicile au lieu d'être gardée en observation à l'hôpital pendant la nuit et sans qu'un traitement anticoagulant et antiagrégant ne lui aient été alors prescrits, alors qu'elle présentait un signe de Babinski positif à gauche révélé lors du scanner réalisé ce 9 octobre, constitue une faute, qui a permis, selon l'expert, à l'AVC "minime et débutant" de prospérer pendant la nuit à son domicile et a entraîné une hémiplégie gauche justifiant un retour aux urgences le lendemain ; que, d'abord, il résulte de l'instruction, et notamment du dossier hospitalier de la requérante, qu'à l'issue de son observation au service des urgences, entre 17 h 42 et 22 h 28 soit presque pendant 5 heures, la nouvelle évaluation clinique réalisée à 22 h 28 a montré que son état était resté stable depuis son arrivée sur le plan hémodynamique, qu'aucun déficit neurologique n'a été constaté, que les céphalées avaient disparu et que le scanner cérébral réalisé était normal, ce qui a justifié son renvoi à son domicile ; que le centre hospitalier produit le rapport du 14 avril 2014 d'un contre expert neurologue qui a été soumis au contradictoire, qui ne méconnaît pas le secret médical et qui peut servir au juge d'élément d'information ; que ce second expert explique sans contradiction que le signe de Babinski gauche révélé lors du scanner ne permettait pas à lui seul de déduire que la requérante présentait un déficit neurologique lors de son admission aux urgences à 17 h 42 le 9 octobre 2012 et qu'il n'y avait pas de raison d'évoquer ce jour-là un possible AVC, qui aurait nécessité qu'un traitement anticoagulant et antiagrégant lui soit tout de suite prescrit ; que ce traitement a été administré à la patiente le 10 octobre 2012 ; qu'en outre, si ce contre expert affirme lui aussi que, compte tenu de son âge, de ses facteurs de risques vasculaires antérieurs, de sa tension artérielle ce jour-là élevée et non encore totalement équilibrée à sa sortie, il aurait été préférable d'hospitaliser Mme C...et de la garder en observation la nuit du 9 au 10 octobre, uniquement pour surveiller sa tension artérielle, il explique clairement et en des termes pondérés que la cause de la survenue de l'AVC de Mme C... n'est pas connue ; que, dans l'hypothèse où l'AVC serait dû à l'hypertension de la requérante, par occlusion d'une artère perforante lors de la survenue d'un à-coup hypertensif, le fait de la garder en observation aurait pu permettre de normaliser sa tension artérielle et d'éviter le lendemain la survenue du déficit hémiparétique gauche ; mais que dans l'hypothèse où l'AVC serait dû au diabète de MmeC..., par l'occlusion d'une sténose artérielle intracrânienne, le fait de la garder hospitalisée pour faire baisser sa tension n'aurait pas évité l'AVC le lendemain ; qu'il conclut en affirmant que " rien ne permet d'affirmer qu'on eût réellement évité en la gardant hospitalisée, la survenue dans la nuit de l'AVC ", que "le fait de ne pas l'avoir hospitalisée n'est pas constitutif d'une perte de chance " et que " les conclusions du Dr D...sont selon nous discutables. " ; que MmeC..., qui se fonde sur le rapport du premier expert et qui ne produit aucune littérature médicale de nature à contredire les dires précis et argumentés du second expert, neurologue, n'établit pas, contrairement à ce qu'elle prétend, que le fait de ne pas l'avoir gardée en observation a entraîné des séquelles beaucoup plus lourdes ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge a estimé que l'obligation de réparer à la charge du centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins ne pouvait être regardée comme étant, en l'état de l'instruction, non sérieusement contestable ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés a rejeté sa demande de provision ;

Sur les conclusions subsidiaires du centre hospitalier tendant à ce qu'il soit prescrit une expertise :

7. Considérant que, dès lors qu'il est fait droit aux conclusions principales du centre hospitalier tendant au rejet de la requête de MmeC..., il n'y a pas lieu de se prononcer sur ses conclusions subsidiaires ;

Sur les dépens :

8. Considérant que la présente instance n'a engendré aucun dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de la requérante tendant à la mise au centre hospitalier de la charge des dépens doivent ainsi être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que le centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, soit condamné à verser quelque somme que ce soit à Mme C...au titre des frais non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C..., au centre hospitalier d'Antibes-Juan les Pins, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes et à la société Axa France.

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N° 14MA048115

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA04811
Date de la décision : 23/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : ANDREI - ZUELGARAY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-23;14ma04811 ?
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