La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/04/2015 | FRANCE | N°13MA00701

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 23 avril 2015, 13MA00701


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le centre hospitalier de Pertuis à l'indemniser des préjudices consécutifs à une intervention chirurgicale réalisée dans cet établissement le 29 novembre 2007. La caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, mise en cause, a chiffré le montant des débours exposés pour le compte de Mme C...à 74 401,10 euros, a demandé que le centre hospitalier soit condamné à lui verser cette somme à titre d'indemnité provisionnelle à valoir

sur son recours définitif, ainsi qu'une indemnité forfaitaire de gestion de 977 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le centre hospitalier de Pertuis à l'indemniser des préjudices consécutifs à une intervention chirurgicale réalisée dans cet établissement le 29 novembre 2007. La caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, mise en cause, a chiffré le montant des débours exposés pour le compte de Mme C...à 74 401,10 euros, a demandé que le centre hospitalier soit condamné à lui verser cette somme à titre d'indemnité provisionnelle à valoir sur son recours définitif, ainsi qu'une indemnité forfaitaire de gestion de 977 euros. Par un jugement n° 1000480 du 13 décembre 2012, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le centre hospitalier de Pertuis à verser à Mme C... une somme de 27 825 euros, mis à sa charge les frais d'expertise, et l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse la somme de 8 715,59 euros, ainsi que la somme de 997 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 20 février 2013, le 18 septembre 2014 et le 2 mars 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, représentée par le cabinet d'avocats Faure et A...demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses demandes ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Pertuis à lui verser, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 73 103,66 euros au titre des débours provisoires versés à Mme C...et la somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Pertuis la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les débours dont elle demande le remboursement sont en lien direct avec la faute ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2014, le centre hospitalier du pays d'Aix - centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens soulevés par la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 19 décembre 2014 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeE...,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de MeD..., substituant Me A...pour la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse.

1. Considérant que Mme C...a subi le 29 novembre 2007, au centre hospitalier de Pertuis, aux droits duquel vient le centre hospitalier du pays d'Aix, centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis, une hystérectomie totale avec annexectomie ; qu'à la suite de cette intervention chirurgicale, elle a présenté une lésion profonde à type de brûlure avec nécrose du tissu graisseux sous cutané ; que par jugement du 13 décembre 2012, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le centre hospitalier à réparer les préjudices de Mme C...et n'a que partiellement fait droit aux prétentions de la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse tendant au remboursement de ses débours, évalués par cette dernière à la somme de 74 401,10 euros, en limitant la condamnation prononcée à ce titre à la somme de 8 715,59 euros ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que ni le principe de la responsabilité du centre hospitalier, engagée sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ni son obligation de réparer l'entier dommage ne sont contestés ; qu'en l'absence d'appel incident et de conclusions de la victime, le litige se trouve ainsi circonscrit à la question de savoir si l'indemnisation des débours de l'organisme social correspondant à des indemnités journalières et aux arrérages de la pension d'invalidité concédée à Mme C...n'a pas été sous-estimée par le tribunal ;

Sur l'existence d'un lien de causalité entre les débours postérieurs à la consolidation et la faute :

3. Considérant que le tribunal a indiqué que la caisse avait droit au remboursement des frais médicaux et indemnités journalières qu'elle avait exposés avant la date de consolidation, le 30 mai 2008, qu'il a évalués à la somme de 8 715,59 euros ; que, pour les dépenses exposées postérieurement à la consolidation, le tribunal a estimé que l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute et ces dépenses n'était pas démontrée, ce qui faisait obstacle à leur indemnisation ;

4. Considérant, d'une part, que la consolidation est le moment où l'état de la victime n'est plus susceptible d'être amélioré d'une façon appréciable et rapide par un traitement médical approprié ; que le II du chapitre préliminaire de l'annexe I à l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale indique que : " " La consolidation " est le moment où, à la suite de l'état transitoire que constitue la période des soins, la lésion se fixe et prend un caractère permanent sinon définitif, tel qu'un traitement n'est plus en principe nécessaire, si ce n'est pour éviter une aggravation, et qu'il est possible d'apprécier un certain degré d'incapacité permanente consécutive à l'accident, sous réserve de rechutes et de révisions possibles. / La consolidation ne coïncide pas nécessairement avec la reprise d'une activité professionnelle. Dans certains cas, les séquelles peuvent être suffisamment importantes pour empêcher celle-ci, et dans d'autres, le travail peut être repris avec poursuite de soins, pendant un temps plus ou moins long, en attendant que la séquelle prenne ce caractère permanent, qui justifie la consolidation, à condition que la valeur du préjudice en résultant soit définitive " ; que la fixation d'une date de consolidation, qui caractérise le caractère permanent des lésions, ne constitue pas un événement pertinent pour déterminer si des pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, qu'une pension d'invalidité versée en vertu de l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale a pour objet exclusif de réparer, sont en lien avec la faute commise par un établissement hospitalier et doivent faire l'objet d'une réparation à ce titre ;

5. Considérant, d'autre part, que l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif a noté, en conclusion de son rapport : " arrêt de toute activité professionnelle et agrément " ; que l'expert désigné par jugement avant dire-droit a indiqué pour sa part : " elle est actuellement en invalidité catégorie II depuis mai 2009 en raison de la symptomatologie douloureuse et des séquelles de l'intervention " et a conclu son rapport en indiquant que " Mme C... est placée en invalidité de catégorie 2 à compter du 1/5/2009 en raison de ces douleurs pariétales accentuées à la mobilisation rendant son exercice professionnel impossible (garde malade) " ; que MmeC..., qui exerçait la profession de garde-malade, avait joint à sa demande le rapport médical d'attribution d'invalidité du 27 janvier 2009, mentionnant : " arrêt en cours : oui, du 18.09.2007 " et concluant à son placement en invalidité en portant le diagnostic : brûlures du troisième degré et épisodes dépressifs ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il est établi que les indemnités journalières versées par l'organisme social avant comme après la consolidation sont la conséquence directe et certaine de la faute commise par l'hôpital, tout comme les arrérages de la rente d'invalidité qu'elle perçoit ; que ce lien est d'ailleurs corroboré par une attestation d'imputabilité versée aux débats par la caisse, établie le 31 janvier 2013 par le médecin conseil du recours contre tiers, indiquant comme étant en lien avec l'acte médical fautif tant les indemnités journalières versées depuis le 1er janvier 2008 que la totalité de la pension d'invalidité ; que ce document a été établi par un praticien auquel l'article L. 315-1 de code de la sécurité sociale confie le soin de porter une appréciation sur " tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie " et qui appartient à un service qui, dans son fonctionnement et par le statut de ses agents, est un corps autonome, sans lien de subordination objectif ou subjectif par rapport aux caisses ;

6. Considérant, dès lors, que la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a estimé qu'étaient sans lien avec la faute commise par l'hôpital ceux des débours qu'elle avait exposés postérieurement à la date de consolidation de l'état de MmeC... ;

Sur le montant de l'indemnisation :

En ce qui concerne les indemnités journalières :

7. Considérant qu'il ressort de la motivation du jugement que le tribunal a limité à 2 523,20 euros le montant des indemnités journalières au remboursement desquelles la caisse était en droit de prétendre ; qu'au vu du relevé de débours produit par la caisse, il y a lieu de porter cette somme à 9 794 euros ;

En ce qui concerne les arrérages de la pension d'invalidité :

8. Considérant que les prétentions de la caisse au titre des arrérages de la pension d'invalidité s'élèvent à la somme de 57 117,27 euros, se décomposant en 24 844,26 euros, correspondant aux arrérages échus jusqu'au 1er mars 2015, et 32 273,01 euros, correspondant à un capital représentatif des arrérages à échoir à compter de cette date ; qu'eu égard aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale qui limitent le recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale à l'encontre du responsable d'un accident corporel aux préjudices qu'elles ont pris en charge, le remboursement des prestations qu'une caisse sera amenée à verser à l'avenir, de manière certaine, prend normalement la forme du versement d'une rente et ne peut être mis à la charge du responsable sous la forme du versement immédiat d'un capital représentatif qu'avec son accord ; que la caisse a droit au remboursement, d'une part, des arrérages de cette rente versés jusqu'au 1er mars 2015 et, d'autre part, au fur et à mesure de leur échéance, des arrérages à échoir depuis cette dernière date ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse est, dans les limites exposées ci-dessus, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté une partie de ses prétentions ; que compte tenu des dépenses de santé de 6 192,39 euros qu'elle justifie avoir exposées, d'indemnités journalières de 9 794 euros et d'arrérages échus au 1er mars 2015 de la pension d'invalidité que reçoit Mme C... s'élevant à la somme de 32 273,01 euros, elle est fondée à demander que son indemnisation soit portée à la somme de 48 259,40 euros, auxquels il convient d'ajouter les arrérages de la pension d'invalidité à échoir à compter du 1er mars 2015 ;

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

10. Considérant, d'autre part, que la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 1 037 euros auquel elle a été fixée par l'arrêté interministériel du 19 décembre 2014 ; qu'il y a lieu de porter à ce montant l'indemnité allouée à ce titre en première instance ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la caisse et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le montant de la somme due par le centre hospitalier du pays d'Aix - centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse au titre de la réparation des préjudices consécutifs à l'intervention chirurgicale du 29 novembre 2007 est porté à 48 259,40 euros. Le centre hospitalier remboursera en outre à la caisse, au fur et à mesure de leur échéance, les arrérages de la pension d'invalidité encore à échoir à compter du 1er mars 2015.

Article 2 : La somme due par le centre hospitalier du pays d'Aix - centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est portée à 1 037 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 13 décembre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier du pays d'Aix - centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse, à Mme B... C... et au centre hospitalier du pays d'Aix - centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Firmin, président assesseur,

- MmeE..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 avril 2015.

La rapporteure,

A. E...Le président,

T. VANHULLEBUS

La greffière,

D. GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

''

''

''

''

N° 13MA00701 2

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00701
Date de la décision : 23/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice.

Responsabilité de la puissance publique - Recours ouverts aux débiteurs de l'indemnité - aux assureurs de la victime et aux caisses de sécurité sociale - Droits des caisses de sécurité sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS FAURE ET HAMDI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-23;13ma00701 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award