Vu, sous le n° 14MA03856, la requête, enregistrée le 1er septembre 2014, présentée pour M. A...B..., domicilié..., par la SCP Pinet ;
M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300116 du 15 juillet 2014 du tribunal administratif de Montpellier rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2012 par laquelle le préfet de l'Aude a rejeté la demande d'autorisation de travail qu'il avait présentée pour M. C...D... ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat (préfecture de l'Aude) la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. B...soutient que :
- les statistiques mentionnées par le préfet sont en décalage avec la réalité du marché, comme le prouvent ses recherches infructueuses ;
- son offre d'emploi ne comportait pas des exigences différentes de celles du poste à pourvoir, de sorte que l'absence de double compétence pouvait tout à fait être opposée aux vingt-deux candidats proposés par le Pôle Emploi ;
- la qualification et l'expérience de M.D..., qui possède des qualités morales et de désintéressement, sont en adéquation avec les caractéristiques de l'emploi ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2015, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que les moyens présentés par M. B...sont infondés ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 février 2015, présenté pour M.B..., qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 1er septembre 2014 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2015 :
- le rapport de M. Thiele, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public ;
1. Considérant que M. B...a, sur le fondement des articles L. 5221-5 et R. 5221-20 du code du travail, présenté une demande d'autorisation de travail au bénéfice de M. C...D..., ressortissant tchadien qu'il souhaitait recruter en qualité d'aide-ménager et jardinier ; que, par décision du 19 novembre 2012, le préfet a rejeté cette demande, au motif, en premier lieu, que la situation de l'emploi, qui était opposable, n'était " pas favorable, compte tenu des indicateurs de tension existant dans le département, concernant les métiers d'aide-ménager et d'aide-jardinier ", qui comptent respectivement 1 118 et 429 demandeurs d'emplois inscrits dans le département, pour 5 offres parues à la fin d'août 2012, en deuxième lieu, que l'offre d'emploi déposée " comportait des exigences sans relation avec la nature du poste à pourvoir ", en troisième lieu, que les compétences d'aide-ménager et d'aide-jardinier ne font pas appel aux mêmes compétences et que " l'absence de double compétence ne pouvait être opposée aux 22 candidatures proposées par Pôle Emploi ", en quatrième lieu que le dossier de demande d'autorisation de travail ne justifie pas que M. D...dispose des compétences, des qualifications, de la formation ou de l'expérience pour occuper ce poste de travail ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) " ;
3. Considérant que, pour refuser à M. D...l'autorisation sollicitée, le préfet s'est fondé, notamment, sur les motifs tirés de ce que l'offre d'emploi déposée " comportait des exigences sans relation avec la nature du poste à pourvoir ", et que les compétences d'aide-ménager et d'aide-jardinier ne faisant pas appel aux mêmes compétences, " l'absence de double compétence ne pouvait être opposée aux 22 candidatures proposées par Pôle Emploi " ; que, toutefois, aucun texte ni aucun principe ne s'opposait à ce que l'offre d'emploi déposée par M. B... porte sur un poste polyvalent d'aide-ménager et d'aide-jardinier, dont il n'est pas sérieusement contesté qu'il correspondait précisément aux besoins de M. et MmeB... ; que le préfet ne pouvait donc, pour ce motif, refuser de tenir compte du caractère infructueux de la recherche d'emploi faite par M.B... ;
4. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur les autres motifs de l'arrêté, cités au point 1 ci-dessus ;
5. Considérant que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, M. B... est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2012 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'eu égard au motif retenu, le présent arrêt, qui implique seulement le réexamen de la demande d'autorisation de travail présentée par M.B..., n'implique pas que le préfet délivre à M. D...un titre de séjour portant mention " salarié " ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. B...en remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1300116 du 15 juillet 2014 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La décision du 19 novembre 2012 par laquelle le préfet de l'Aude a rejeté la demande d'autorisation de travail que M. B...avait présentée pour M. C...D... est annulée.
Article 3 : L'Etat (préfecture de l'Aude) versera à M. B...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2015, à laquelle siégeaient :
M. Marcovici, président,
M. Thiele, premier conseiller,
Mme Héry, premier conseiller.
Lu en audience publique le 20 avril 2015.
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N° 14MA03856 2
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