Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2013, présentée pour M. C... D..., demeurant ... et pour M. A...D..., demeurant..., par MeB... ;
MM. D...demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100580 et 1100584 du 26 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 10 décembre 2010 déclarant l'insalubrité remédiable du logement leur appartenant sis 3 rue Peyreguis à Grasse (06130) ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral susmentionné ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Grasse la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Marchessaux, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;
1. Considérant que MM. D...relèvent appel du jugement du 26 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 10 décembre 2010 déclarant l'insalubrité remédiable du logement leur appartenant sis 3 rue Peyreguis à Grasse (06130) ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Lorsqu'un immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d'immeubles, un îlot ou un groupe d'îlots constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé ou, par application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1, du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : / 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; / 2° Sur les mesures propres à y remédier (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1331-26-1 du code précité : " Lorsque le rapport prévu par l'article L. 1331-26 fait apparaître un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité de l'immeuble, le représentant de l'Etat dans le département met en demeure le propriétaire, ou l'exploitant s'il s'agit de locaux d'hébergement, de prendre les mesures propres à faire cesser ce danger dans un délai qu'il fixe. Il peut prononcer une interdiction temporaire d'habiter. / Dans ce cas, ou si l'exécution des mesures prescrites par cette mise en demeure rend les locaux temporairement inhabitables, les dispositions des articles L. 521-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation sont applicables. / Le représentant de l'Etat dans le département procède au constat des mesures prises en exécution de la mise en demeure. / Si les mesures prescrites n'ont pas été exécutées dans le délai imparti, le représentant de l'Etat dans le département procède à leur exécution d'office. / Si le propriétaire ou l'exploitant, en sus des mesures lui ayant été prescrites pour mettre fin au danger imminent, a réalisé des travaux permettant de mettre fin à toute insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département en prend acte. " ; qu'aux termes de l'article L. 1331-27 du même code en vigueur alors : " Le représentant de l'Etat dans le département avise les propriétaires (...) au moins trente jours à l'avance de la tenue de la réunion de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques et de la faculté qu'ils ont de produire dans ce délai leurs observations (...)/ Le rapport motivé prévu à l'article L. 1331-26 est tenu à la disposition des intéressés dans les bureaux de la préfecture. Une copie est déposée à la mairie de la commune ou, à Paris, Marseille et Lyon, de l'arrondissement où est situé l'immeuble. / Toute personne justifiant de l'une des qualités mentionnées au premier alinéa est, sur sa demande, entendue par la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques et appelée aux visites et constatations des lieux. Elle peut se faire représenter par un mandataire. (...) " ; qu'aux termes du II de l'article L. 1331-28 du code précité dans sa version applicable à l'arrêté en cause : " Lorsque la commission ou le haut conseil conclut à la possibilité de remédier à l'insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département prescrit les mesures adéquates ainsi que le délai imparti pour leur réalisation sur avis de la commission ou du haut conseil et prononce, s'il y a lieu, l'interdiction temporaire d'habiter et, le cas échéant, d'utiliser les lieux (...) " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 70 de la loi susvisée du 17 mai 2011: " Lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision. / L'alinéa précédent s'applique également aux consultations ouvertes conduites en application de l'article 16 de la présente loi. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par lettre en date du 8 novembre 2011, postée le 15 novembre suivant, le préfet des Alpes-Maritimes a informé les requérants qu'une procédure d'insalubrité prévue à l'article L. 1331-26 du code de la santé publique avait été déclenchée suite à une visite des lieux en date du 5 octobre 2010 et que le rapport d'insalubrité de l'immeuble serait soumis à l'avis du conseil départemental de l'environnement, des risques sanitaires et technologiques (CODERST), lors de sa séance du 10 décembre 2010 à la préfecture des Alpes-Maritimes ; que ce courrier leur précisait également que ledit rapport était à leur disposition au secrétariat du service communal d'hygiène et de santé de Grasse, que les intéressés pouvaient produire leurs observations relatives à cette affaire, par écrit, au service santé-environnement de la délégation territoriale des Alpes-Maritimes et, s'ils l'estimaient utile, être entendus ou se faire représenter par une personne dûment mandatée lors de la séance du CODERST ; qu'il est ainsi constant que le délai de trente jours prévu à l'article L. 1331-27 du code de la santé publique n'a pas été respecté ; que, toutefois, les requérants ont bénéficié d'un délai suffisant d'une vingtaine de jours pour faire connaître leurs observations, prendre connaissance du rapport d'insalubrité et être entendu lors de la séance du CODERST ou se faire représenter par un conseil alors même que M. C...D...résidait en Ile-de-France, ce dernier ne démontrant nullement avoir tenté, sans succès, de prévenir son employeur ou de prendre l'attache d'un conseil spécialisé ; que, dès lors, les premiers juges ont estimé à juste titre que le non respect du délai de trente jours prévu à l'article L. 1331-27 du code de la santé publique ne les avait pas privé d'une garantie ; qu'en statuant ainsi, ils n'ont pas méconnu les dispositions précitées de l'article 70 de la loi du 17 mai 2011 qui ne sauraient limiter l'office du juge administratif aux seuls vices pour défaut de consultation dès lors que ces dispositions énoncent, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, une règle qui s'inspire du principe selon lequel, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un rapport complémentaire de présentation au CODERST a été établi par l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur, le 9 décembre 2010, soit la veille de la séance dudit conseil ; que ce rapport avait pour objet de lui proposer de suspendre la procédure d'urgence engagée au titre de l'article L. 1331-26-1 précité du code de la santé publique et de l'intégrer dans le projet de l'arrêté préfectoral portant déclaration d'insalubrité remédiable du logement ; que les premiers juges ont estimé à bon droit que cette circonstance n'a entaché la procédure d'aucune irrégularité dès lors que ce document ne portait que sur l'application de la procédure prévue à l'article L. 1331-26-1 du code de la santé publique permettant au préfet de prendre les mesures propres à faire cesser un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité de l'immeuble concerné, en proposant de la suspendre et de l'intégrer dans l'arrêté attaqué qui du reste n'en fait pas application ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et plus particulièrement du rapport, en date du 5 novembre 2010, de présentation au CODERST établi par le service communal d'hygiène et de santé de la commune de Grasse, sur le fondement duquel le préfet des Alpes-Maritimes a pris l'arrêté litigieux, qu'ont été constatés dans le logement de MM. D...une importante humidité causée notamment par des infiltrations d'eau au rez-de-chaussée, une hauteur sous plafond insuffisante dans la salle d'eau et les toilettes au rez-de-chaussée et dans la chambre au 2ème étage, une installation électrique insuffisamment protégée dans les pièces de service présentant un risque d'électrocution, un éclairement naturel très insuffisant, des fenêtres en bois dégradées et vétustes, une insuffisance de la ventilation permanente et générale donnant sur l'extérieur, un équipement électrique de production d'eau chaude mal entretenu et fuyard, une absence de garde corps sur les fenêtres des 1er et 2ème étages avec des risques de chute pour les enfants, un escalier pas assez sécurisé à cause notamment d'une hauteur insuffisante de garde-corps maçonné, l'absence de diagnostic sur l'accessibilité au plomb et enfin la présence de rongeurs et de blattes dans le logement ; que si MM. D...soutiennent qu'il est reproché à leur logement de ne pas avoir de vide sanitaire, le rapport précité ne mentionne pas ce grief parmi les critères d'insalubrité retenus ni ne préconise des travaux à ce titre ; que contrairement à ce qu'ils font valoir, l'arrêté attaqué ne leur impose pas de réaliser des travaux sur un ouvrage public mais de rechercher et de traiter les causes d'humidité dans leur logement ; qu'à supposer même que ces causes auraient pour origine la défectuosité du réseau communal des eaux pluviales, cette circonstance est sans incidence dès lors qu'il leur est toujours loisible s'ils s'y croient fondés d'engager une action en responsabilité contre la commune de Grasse en vue d'obtenir la réparation du préjudice en résultant pour eux, ce que du reste ils ont fait en déposant un recours en ce sens devant le tribunal administratif de Nice ; qu'en outre, le rapport en date du 5 novembre 2010 mentionne que des travaux de réparation de ce réseau public ont été effectués par la ville de Grasse fin 2009 et relève que les causes d'humidité sont multiples et certaines sont extérieures aux logements ; qu'il précise, entre autre cause, une fuite sur la sortie du cumulus électrique d'eau chaude au premier étage, ainsi qu'un phénomène de condensation dû à l'insuffisance des ventilations et de l'isolation thermique ; que s'agissant de l'installation du chauffage électrique dans la salle de bains et de la ventilation, la seule production d'une facture du 27 novembre 2007 concernant des travaux de rénovation électrique et de remplacement de divers appareillages réalisés dans le logement en cause n'est pas de nature à établir que l'installation électrique était conforme à la date de l'arrêté querellé, soit plus de trois ans après lesdits travaux ; qu'en se bornant à faire valoir que les locataires ne leur ont jamais signalé la présence d'insectes, qu'aucune mesure n'a été engagée à l'encontre des autres propriétaires et qu'il serait étonnant que leur logement qui se trouve dans un immeuble collectif de cinq étages soit le seul concerné, MM. D...ne démontrent pas que les constatations du rapport du 5 novembre 2010 sur la présence de blattes et de rongeurs seraient erronées ; que, par suite, le préfet des Alpes-Maritimes n'a commis aucune erreur d'appréciation en déclarant, par l'arrêté en cause, le logement des appelants insalubre avec possibilité d'y remédier ;
7. Considérant que si MM. D...affirment que l'éclairage naturel est suffisant au regard de l'article 40-2 du règlement sanitaire départemental et que le logement ne contient pas de pièces habitables dont la hauteur sous plafond serait inférieure à 2,20 mètres, ils ne le démontrent pas ; que ces moyens doivent dès lors être écartés ;
8. Considérant que les requérants reprennent en appel le moyen qu'ils avaient invoqué en première instance et tiré de ce que le remplacement des carreaux cassés résulterait du fait du locataire ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nice ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Grasse, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à MM. D...quelque somme que ce soit au titre des frais que ceux-ci ont exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de MM. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à M. A...D...et au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
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N° 13MA02036