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02/02/2015 | FRANCE | N°13MA02111

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 02 février 2015, 13MA02111


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2013, sous le n° 13MA02111, présentée pour M. A...E...D..., demeurant..., par Me B...C... ;

M. D...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 26 avril 2013 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 23 avril 2013 du préfet des Alpes-Maritimes lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement et le pl

açant en rétention administrative ;

- d'annuler l'arrêté préfectoral liti...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2013, sous le n° 13MA02111, présentée pour M. A...E...D..., demeurant..., par Me B...C... ;

M. D...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 26 avril 2013 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 23 avril 2013 du préfet des Alpes-Maritimes lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement et le plaçant en rétention administrative ;

- d'annuler l'arrêté préfectoral litigieux ;

- d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, relative au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 23 juillet 2013 du bureau d'aide juridictionnelle accordant l'aide juridictionnelle totale à M.D... ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties de la date de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2015 le rapport de M. Guerrive ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

1. Considérant, en premier lieu, que M.D..., de nationalité mauritanienne, soutient qu'il ne pouvait faire directement l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il avait préalablement déposé, auprès du préfet des Alpes-Maritimes, une demande d'admission exceptionnelle au séjour ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, par un courrier du 8 avril 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a indiqué à l'intéressé que sa demande était incomplète et ne pouvait pas être instruite en l'état ; que le requérant n'établit pas, devant le juge d'appel, davantage que devant le juge de premier ressort, avoir effectivement adressé aux services préfectoraux les documents complémentaires demandés et, par suite, nécessaires à la poursuite de l'instruction de sa demande ; qu'il s'ensuit que M. D...ne saurait être regardé comme ayant déposé une demande de titre de séjour ; que, dès lors, le moyen invoqué par le requérant et tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire serait entachée d'un vice de procédure n'est pas fondé et doit être écarté ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " ce droit comporte notamment: / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ; et qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (...) ;

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont issues des dispositions de la loi du 16 juin 2011, relative à l'immigration, l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; qu'il s'ensuit que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet doit appliquer les principes généraux de l'Union européenne dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre ; que, cependant, ce droit n'implique pas nécessairement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; que, dans les circonstances de l'espèce, il ressort des pièces du dossier, en particulier du procès verbal d'audition de l'intéressé, dressé le 23 avril 2013 à 10 h 33, que ce dernier, d'ailleurs sous l'empire d'un refus de séjour précédemment pris à son encontre le 29 août 2011, a été expressément avisé de ce qu'il devrait quitter le territoire français, ce dont il a pris acte ; qu'il s'ensuit que M. D...doit être regardé comme ayant été, préalablement à la notification de la mesure d' éloignement critiquée, intervenue le 23 avril 2013 à 15 h 25, mis en mesure de présenter, le cas échéant, des observations écrites ou orales ;

5. Considérant, en cinquième lieu, que M. D...soutient qu'il est présent en France, de manière continue, depuis 13 années et se prévaut d'une activité salariée pour justifier qu'il a fixé, sur le territoire français, le centre de sa vie privée et professionnelle ; que, cependant, si le requérant produit au dossier de nombreuses fiches de paye, les contrats auxquels elles se réfèrent, à durée déterminée, concernent pour la plupart des emplois saisonniers et, par suite, non susceptibles d'établir l'existence d'une activité professionnelle continue et de nature à justifier une présence habituelle en France de l'intéressé, depuis la date à laquelle il déclare être entré sur le territoire national ; que les autres pièces produites au dossier ne sont pas davantage susceptibles de prouver que l'intéressé aurait fixé en France le centre de sa vie privée et de ses intérêts ; que, par ailleurs, M.D..., âgé de 38 ans à la date de l'arrêté litigieux, célibataire et sans charge de famille, ne soutient pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'eu égard aux conditions du séjour en France de l'intéressé, favorisé d'ailleurs par la détention et l'usage de titres de séjours frauduleux, l'arrêté critiqué n'a pas porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, en prenant à l'encontre de l'intéressé l'obligation de quitter le territoire contestée, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

6. Considérant que M. D...soutient que la décision du préfet des Alpes-Maritimes lui refusant un délai de départ volontaire est incompatible avec la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil , et que cette décision est disproportionnée en regard de la réalité de sa situation dès lors qu'il était aisément localisable par les services compétents et ne présentait donc aucun risque de fuite ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier que M. D...s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 29 août 2011 par le préfet des Alpes-Maritimes ; que, dès lors, le risque de fuite doit être regardé comme avéré au sens des dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est par une exacte application des dispositions susmentionnées que le préfet des Alpes-Maritimes a pu refuser au requérant un délai de départ volontaire ;

Sur la légalité des autres décisions attaquées :

7. Considérant que M. D...n'invoque aucun moyen à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté litigieux du préfet des Alpes-Maritimes en tant qu'il a décidé son placement en rétention administrative ;

8. Considérant qu'à l'appui des conclusions qu'il dirige contre l'arrêté attaqué en tant qu'il a fixé la Mauritanie comme pays de destination de la mesure d'éloignement, M. D...n'assortit le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'aucune précision de nature à permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter sa requête d'appel tendant à l'annulation dudit jugement, de même que ses conclusions aux fins d'injonction et de condamnation présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...D..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N° 13MA02111 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02111
Date de la décision : 02/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis GUERRIVE
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : MURUGAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-02-02;13ma02111 ?
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