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23/12/2014 | FRANCE | N°12MA00215

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 23 décembre 2014, 12MA00215


Vu la requête enregistrée le 16 janvier 2012 par télécopie et le 17 janvier 2012 par courrier présentée pour la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Montpellier, par Me C...I... ; Elle demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 0903051 et 0905283 rendu le 9 novembre 2011 par le tribunal administratif de Montpellier en ses articles ayant fait droit aux requêtes de M. B... ;

* de rejeter les requêtes de M. B... ;

* de mettre à la charge de M. B... le paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de ju

stice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du do...

Vu la requête enregistrée le 16 janvier 2012 par télécopie et le 17 janvier 2012 par courrier présentée pour la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Montpellier, par Me C...I... ; Elle demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 0903051 et 0905283 rendu le 9 novembre 2011 par le tribunal administratif de Montpellier en ses articles ayant fait droit aux requêtes de M. B... ;

* de rejeter les requêtes de M. B... ;

* de mettre à la charge de M. B... le paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- les observations de Me A..., substituant MeI..., pour la chambre de commerce et d'industrie de Montpellier,

- et les observations de M. B... ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 12 décembre 2014 présentée pour M. B..., par MeE... ;

1. Considérant que le 11 septembre 2000, M. B... a été engagé par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Montpellier pour exercer, sous contrat, des fonctions de professeur d'informatique, systèmes d'information et nouvelles technologies de l'information et de la communication ; qu'après avoir été nommé responsable du service informatique, il a démissionné de ces fonctions pour réintégrer celles d'enseignant à compter du 1er juin 2002 ; que, par jugement rendu le 13 mars 2008, le tribunal administratif de Montpellier a annulé deux décisions prises par la CCI à l'encontre de M. B..., la première rejetant sa demande tendant au bénéfice du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, la seconde le licenciant en date du 31 mars 2005 ; que l'annulation de ces décisions a été confirmée par la Cour par arrêt du 30 juin 2009, devenu définitif ; que M. B... a, par la suite, été révoqué de ses fonctions par arrêté en date du 10 juillet 2008 ; que, par un jugement en date du 19 décembre 2008, le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé cette révocation au motif qu'elle était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, d'autre part, enjoint à la CCI de Montpellier de procéder à la réintégration de M. B... à compter de la date de prise d'effet de la décision du 10 juillet 2008, dans le délai d'un mois à compter de la notification de son jugement et condamné la CCI à verser à M. B... la somme de 2 000 € au titre du préjudice moral résultant de la révocation du 10 juillet 2008 ; qu'enfin, par une décision en date du 9 octobre 2009, M. B... a été licencié au motif de la suppression de son emploi ; que M. B... a saisi le tribunal administratif de Montpellier de deux requêtes, la première enregistrée sous le n° 0903051 tendant à l'exécution du jugement précité du 19 décembre 2008, la seconde, enregistrée quant à elle sous le n° 095283 tendant à l'annulation de la décision susmentionnée du 9 octobre 2009 et à l'indemnisation du préjudice moral subi du fait de cette décision ; que, par un jugement en date du 9 novembre 2011, le tribunal administratif de Montpellier a, après avoir joint ces deux requêtes, annulé la décision du 9 octobre 2009, et enjoint à la CCI de Montpellier de réintégrer juridiquement M. B... à compter du 11 juillet 2008 en sa qualité de professeur statutaire, de reconstituer à compter de cette date, sa carrière ainsi que ses droits sociaux et, à ce titre de procéder au versement des cotisations patronales et salariales afférentes et de le réintégrer effectivement, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 € par jour de retard ; que, par ce même jugement, le tribunal a condamné la CCI à verser à M. B... une somme de 15 000 € en réparation du préjudice moral subi du fait du licenciement du 9 octobre 2009 ; que la CCI de Montpellier interjette appel de ce jugement en tant qu'il a fait droit aux conclusions de M. B... ; que ce dernier, pour sa part, demande à la Cour de porter à 100 000 € le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de la CCI ;

Sur l'exécution du jugement du 19 décembre 2008 : période du 11 juillet 2008 à la date de prise d'effet du licenciement du 9 octobre 2009 :

En ce qui concerne l'exception d'autorité de la chose jugée :

2. Considérant que la CCI de Montpellier fait valoir que le tribunal administratif de Montpellier se serait déjà prononcé sur l'exécution du jugement du 19 décembre 2008 par un autre jugement du 17 novembre 2009 ; que, toutefois, ledit jugement n'avait nullement pour objet de prescrire les mesures d'exécution du jugement du 19 décembre 2008, relatif à la période du 11 juillet 2008 à la date de prise d'effet du licenciement du 9 octobre 2009, mais celui de liquider l'astreinte prononcée par le jugement susmentionné du 13 mars 2008, lequel avait annulé le rejet de la demande tendant au bénéfice du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie et la décision de licenciement en date du 31 mars 2005 et enjoint à la CCI de Montpellier de réintégrer M. B... " dans les fonctions d'enseignant définies par son contrat " ; que, par suite, l'exception d'autorité de chose jugée susmentionnée doit être écartée ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

3. Considérant que l'injonction prononcée par le jugement du 19 décembre 2008, impliquait qu'en exécution de l'annulation de la révocation dont a fait l'objet M. B... le 10 juillet 2008, la CCI procède à la réintégration juridique de l'intéressé à compter du 11 juillet 2008 ainsi qu'à sa réintégration physique, et qu'elle reconstitue, à compter du 11 juillet 2008 et jusqu'à la date de prise d'effet de la décision le licenciant le 9 octobre 2009 pour suppression de son emploi, sa carrière en qualité d'agent relevant du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ; que cette reconstitution formelle, signée de l'autorité compétente au sein de la CCI, devait indiquer clairement, depuis le 11 juillet 2008, les dates des étapes habituelles de l'avancement à l'ancienneté et au choix selon la moyenne de la catégorie d'emplois que M. B... aurait dû occuper ; que de la reconstitution de la carrière de M. B..., sur la période susmentionnée, selon les principes précités dépendait la reconstitution de ses droits sociaux et droits à pension auprès des organismes de retraite obligatoire et complémentaire, ce qui impliquait, pour la CCI, de verser tant les cotisations patronales que les cotisations salariales normalement générées par les fonctions réputées exercées par M. B... sur la période susmentionnée ;

4. Considérant, en premier lieu, que s'il ressort des pièces du dossier que M. B... a été réintégré physiquement à compter du 26 janvier 2009 pour, cependant, être immédiatement invité à regagner son domicile, il ne résulte d'aucune des pièces versées au dossier, ainsi que l'a, à bon droit, jugé le tribunal administratif de Montpellier par le jugement attaqué, que le président de la CCI requérante ou toute personne ayant délégation aurait pris une décision juridique formelle reconstituant la carrière de M. B... sur la période du 11 juillet 2008 à la date de prise d'effet du licenciement du 9 octobre 2009 et précisant les dates éventuelles d'avancement d'échelons et de niveaux le cas échéant ainsi que les indices de base, au choix ou à l'ancienneté par référence à la moyenne du cadre d'emplois de M. B... ; que la CCI se borne en effet à produire à cet égard un document notifié à M. B... le 4 septembre 2009, qui ne fait état d'aucune classification, niveau et échelon de M. B... et ne peut être regardé comme constitutif d'une reconstitution de carrière ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'à la date du jugement attaqué, il est constant que la CCI de Montpellier n'avait nullement procédé au paiement des cotisations salariales auprès des caisses de retraite obligatoire et complémentaires dont dépend M. B... alors que l'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2008 impliquait nécessairement, M. B... n'ayant pas bénéficié d'une indemnité destinée à réparer le préjudice matériel subi incluant les sommes correspondantes, que la CCI prenne à sa charge, ainsi qu'il a été dit précédemment, le versement de la part salariale de ces cotisations, au même titre que celui de la part patronale ; que, par ailleurs, et en tout état de cause, il est constant que les régularisations auxquelles a procédé la CCI n'ont pu être faites que sur des bases erronées faute de reconstitution préalable de la carrière de l'intéressé du 10 juillet 2008 à la date de prise d'effet du licenciement du 9 octobre 2009 ;

6. Considérant, en revanche, en troisième lieu, que l'exécution du jugement du 19 décembre 2008 n'impliquait, par elle-même, ni que soit délivré à M. B... un exemplaire du statut, du règlement intérieur et de tous documents annexes de la CCI, ni que lui soit versé, au titre de la période au cours de laquelle il a été irrégulièrement évincé, le supplément familial de traitement ou que lui soient alloués des tickets restaurant ni, enfin, que la CCI prenne attache avec la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie dès lors que l'annulation de la mesure d'éviction n'a pas pour effet de priver rétroactivement un agent du droit à l'allocation d'assurance chômage servie pendant la période, comprise entre sa sortie de service et sa réintégration, durant laquelle il était involontairement privé d'emploi, apte au travail et à la recherche d'un emploi ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CCI requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier lui a enjoint de réintégrer juridiquement M. B... à compter du 11 juillet 2008 en sa qualité de professeur statutaire et de reconstituer à compter de cette date sa carrière ainsi que ses droits sociaux et, à ce titre, de procéder au versement des cotisations patronales et salariales afférentes, et, enfin, de le réintégrer effectivement, sous astreinte de 500 € par jour de retard ;

Sur la décision de licenciement pour suppression d'emploi en date du 9 octobre 2009 :

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 33 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie : " La cessation de fonctions de tout agent titulaire ne peut intervenir que dans les conditions suivantes : (...) 3) Par licenciement pour inaptitude physique, après avis du médecin du travail (...) 4) Par licenciement pour insuffisance professionnelle, après avis de la commission paritaire compétente. 5) Par suppression d'emploi, après avis de la commission paritaire compétente, 6) Par mesure disciplinaire dans les conditions précisées aux articles 36 à 37 bis du présent statut " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 35-1 dudit statut : " Lorsqu'une compagnie consulaire décide de prendre des mesures pouvant entraîner un ou plusieurs licenciements par suppression d'emploi, le Président, au vu de la délibération prise en assemblée générale, convoque la commission paritaire locale aux fins de l'informer. Un dossier est communiqué, au plus tard quinze jours avant la date de la réunion, aux membres de la commission paritaire locale et aux délégués syndicaux. Ce dossier comprend : - une information sur les raisons économiques, financières et techniques qui sont à l'origine de la suppression d'un ou plusieurs postes de travail ; - une information sur les moyens examinés par la compagnie consulaire pour éviter les suppressions d'emplois tels que notamment : les possibilités de création d'activités nouvelles, d'augmentation de ressources ou de diminution de charges, d'aménagement du temps de travail et/ou de réduction du temps de travail, de reclassement des agents dont l'emploi pourrait être supprimé dans d'autres services de la compagnie consulaire, d'autres compagnies consulaires ou à l'extérieur de l'institution consulaire ainsi que toutes autres mesures alternatives au licenciement ; - la liste des emplois susceptibles d'être supprimés et les critères retenus ; - le coût et les modalités de mise en oeuvre des mesures annoncées ; - les aides et mesures d'accompagnement apportées aux agents licenciés pour faciliter leur réemploi sur des emplois équivalents telles que bilan de compétences, actions de formation et de validation des acquis de l'expérience, prestations d'une cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi, etc., mises en oeuvre par la compagnie consulaire elle-même ou par un prestataire qu'elle choisit. Elles doivent être adaptées tant aux besoins des agents concernés qu'aux moyens dont dispose la compagnie consulaire. / Au plus tard dans le mois qui suit la réunion de cette commission et au plus tôt après huit jours francs, les agents dont l'emploi est menacé sont convoqués à un entretien individuel avec le Président ou son délégataire. Dans le délai d'un mois et au plus tôt dans le délai de huit jours francs qui suit le ou les entretiens individuels, la commission paritaire locale est convoquée de nouveau pour émettre un avis, d'une part, sur les démarches, propositions et actions entreprises pour éviter les licenciements et, d'autre part, sur les mesures individuelles de licenciement envisagées. / Les licenciements sont notifiés aux agents concernés au plus tôt cinq jours francs après l'avis de la commission paritaire locale. La première présentation de cette notification par lettre recommandée avec accusé de réception fait courir le délai de préavis fixé à quatre mois. Pendant la durée du préavis, l'intéressé a droit à deux demi-journées d'absence par semaine pour recherche d'emploi./ La compagnie consulaire ne peut effectuer de recrutement sur poste permanent correspondant à un ou plusieurs emplois supprimés pendant un délai de dix-huit mois à compter de la (les) notification (s) de licenciement pour suppression d'emploi. Les autres emplois mis en recrutement pendant cette période doivent être proposés en priorité aux agents licenciés " ;

9. Considérant que la CCI de Montpellier fait valoir que la suppression de l'emploi de professeur d'informatique occupé par M. B... était rendue nécessaire, d'une part, par la diminution importante du nombre d'heures en face à face pédagogique, s'agissant notamment de l'enseignement de la bureautique, et, d'autre part, par la nécessité, pour obtenir des accréditations nationales et internationales, de privilégier le recrutement d'enseignants titulaires d'un doctorat ou de chercheurs ;

10. Considérant, toutefois, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du syllabus du cours dispensé par M. D... F...après le licenciement de M. B... que si le nombre d'heures d'enseignement en bureautique a baissé, cette matière demeure toutefois enseignée ; que, par ailleurs, la bureautique ne constituait pas le seul enseignement dispensé par M. B... ; qu'il ressort en effet également des pièces du dossier que celui-ci dispensait aussi, entre autres, des cours de droit et sécurité informatique, cours qui ont été repris par la suite par M. H...sous l'intitulé " TIC et éthique ", de gestion des systèmes d'information, d'e-business, d'internet ; que, par ailleurs, si la CCI requérante fait valoir que le nombre d'heures de face à face pédagogique a diminué du fait de l'achat d'un logiciel d'enseignement à distance, il est prévu, dans le contrat de travail de M. B..., que le face à face pédagogique comprend non seulement les heures d'enseignement traditionnel mais également l'enseignement à distance qui englobe la création et l'actualisation de cours commercialisés par les moyens des nouvelles technologies ; qu'il résulte de ce qui précède que la CCI n'établit pas que l'enseignement dispensé par M. B... aurait été supprimé ; qu'il apparaît au contraire, que le nombre d'enseignants au sein du service dont faisait partie M. B... a été, entre 2004 et 2009, multiplié par deux ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que certains des enseignants recrutés par la CCI requérante ne sont ni titulaires d'un doctorat ni chercheurs ; qu'ainsi, par exemple, M.H..., enseignant, ainsi qu'il a été dit précédemment, le cours

" TIC et éthique ", n'est pas titulaire d'un doctorat ;

12. Considérant, en troisième lieu, que la CCI de Montpellier fait également valoir qu'elle a cherché à reclasser son agent, ce qui démontrerait qu'elle n'a nullement eu l'intention de l'évincer une nouvelle fois de ses fonctions ; que, toutefois, s'il est constant que ladite CCI a, d'une part, adressé plusieurs e-mails au réseau national des CCI, et envoyé à deux reprises à M. B... des listes de postes vacants tant au sein de ses services qu'au sein d'autres chambres de commerce et d'industrie, dont la plupart étaient, au demeurant, soit totalement inadaptés eu égard à ses domaines de compétences, soit sous-qualifiés, soit très éloignés géographiquement, il n'est néanmoins pas contesté que six postes de professeurs publiés par la fondation nationale pour l'enseignement et la gestion des entreprises, étaient vacants et que ces postes n'ont pas été proposés à M. B... ; que si la CCI de Montpellier fait valoir que M. B... ne pouvait y prétendre dès lors qu'il n'était ni doctorant ni chercheur, elle n'établit pas que ces postes auraient été, comme elle le soutient, réservés aux doctorants ou chercheurs ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CCI requérante n'établit ni qu'il était nécessaire, pour des raisons économiques, financières ou techniques de supprimer l'emploi de M. B..., ni qu'elle a procédé à une véritable recherche de reclassement ; qu'il ressort au contraire très nettement des pièces du dossier et, notamment du procès-verbal de l'assemblée générale du 26 mars 2009, que la volonté de la CCI était, à la suite de l'annulation par le tribunal administratif de Montpellier de la révocation de M. B..., de sanctionner à nouveau

celui-ci par une mesure d'éviction du service ; que, d'ailleurs, il est constant que dès sa "réintégration" le 26 janvier 2009, la CCI de Montpellier a demandé à M. B... de rejoindre son domicile et a enclenché, immédiatement après, la procédure de licenciement pour suppression de son emploi ; qu'au vu de ces éléments, le tribunal administratif de Montpellier a, à juste titre, estimé que la décision attaquée, prise dans le seul et unique but d'évincer une fois encore M. B... du service, est entachée d'un détournement de pouvoir ; que si la CCI de Montpellier demande à la Cour de procéder à une substitution de motifs en retenant le motif tiré de l'intérêt du service, il résulte, en tout état de cause, de ce qui a été dit précédemment que l'intérêt du service n'est nullement établi ;

En ce qui concerne les mesures d'exécution qu'implique nécessairement l'annulation de la décision du 9 octobre 2009 :

14. Considérant que l'exécution de l'annulation de la décision du 9 octobre 2009 implique nécessairement que la CCI requérante réintègre juridiquement M. B... dans ses fonctions à compter du 10 février 2010, date de prise d'effet dudit licenciement ; que si la chambre de commerce et d'industrie de Montpellier fait valoir que dès lors que, par une ordonnance en date du 15 janvier 2010, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu l'exécution de la décision du 9 octobre 2009 celle-ci n'a produit aucun effet, elle n'établit pas, alors, au demeurant que M. B... n'a pu exercer de nouveau ses fonctions qu'en janvier 2012, avoir respecté ladite suspension ;

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

S'agissant de la fin-de non-recevoir soulevée par la CCI de Montpellier :

15. Considérant qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce, quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration ; que lorsque ce mémoire en défense conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de conclusions indemnitaires faute de décision préalable et, à titre subsidiaire seulement, à leur rejet au fond, ces conclusions font seulement obstacle à ce que le contentieux soit lié par ce mémoire lui - même ;

16. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si, à la date du 11 décembre 2009 à laquelle M. B... a saisi pour la première fois le tribunal administratif de Montpellier, ce dernier ne justifiait d'aucune décision expresse ou tacite lui refusant l'indemnité qu'il sollicitait, il a, le 25 octobre 2010, demandé à la CCI de Montpellier de lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'il estimait avoir subi du fait de son licenciement du

9 octobre 2009 ; qu'avant que le juge de première instance statue, un refus implicite a été opposé à cette demande ; qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut donc être opposée aux conclusions de la demande de première instance ;

S'agissant de l'évaluation du préjudice de M. B... :

17. Considérant que la CCI de Montpellier, en licenciant M. B... en commettant le détournement de pouvoir susmentionné, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ainsi que l'a, à juste titre, estimé le tribunal administratif de Montpellier ;

18. Considérant qu'en évaluant à la somme de 15 000 € le préjudice moral subi par M. B... au regard de l'acharnement dont a fait preuve la CCI à son égard pour l'évincer du service, le tribunal administratif de Montpellier a fait une juste évaluation du préjudice subi à ce titre par celui-ci ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que tant les conclusions de l'appel principal de la CCI de Montpellier que celles de l'appel incident de M. B... doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

21. Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante à titre principal, le paiement des frais exposés par la CCI de Montpellier et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CCI de Montpellier le paiement de la somme de 2 000 € qui sera versée à M. B... sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la chambre de commerce et d'industrie de Montpellier est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de M. B... est rejeté.

Article 3 : La chambre de commerce et d'industrie de Montpellier versera à M. B... la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...B...et à la chambre de commerce et d'industrie de Montpellier.

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N° 12MA002155


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00215
Date de la décision : 23/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : PIERCHON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-23;12ma00215 ?
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