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22/12/2014 | FRANCE | N°12MA02984

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2014, 12MA02984


Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2012, présentée pour la SAS Camidi (Camion du Midi), dont le siège social est situé avenue Adolphe Turrel, les Salines, à Port-la-Nouvelle (11210), par Me A...B... ;

La SAS Camidi - Camion du Midi demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101375 du 21 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à titre principal à la condamnation de l'Etat au versement des intérêts moratoires correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée déductible ayant grevé les dépenses de péages

autoroutiers qu'elle a acquittées au cours de la période du 1er janvier 1996 au...

Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2012, présentée pour la SAS Camidi (Camion du Midi), dont le siège social est situé avenue Adolphe Turrel, les Salines, à Port-la-Nouvelle (11210), par Me A...B... ;

La SAS Camidi - Camion du Midi demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101375 du 21 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à titre principal à la condamnation de l'Etat au versement des intérêts moratoires correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée déductible ayant grevé les dépenses de péages autoroutiers qu'elle a acquittées au cours de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2000, et à titre subsidiaire, au versement d'indemnités en réparation du préjudice financier subi en raison de la restitution tardive de cette taxe ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 24 726,59 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014 :

- le rapport de M. Pourny, président,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public ;

1. Considérant que par un arrêt du 12 septembre 2000 (aff. C-276/97, Commission c/ France), la Cour de justice des Communautés européennes a jugé contraires aux articles 2 et 4 de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats-membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, les dispositions du code général des impôts desquelles il résultait que n'étaient pas imposables à la taxe sur la valeur ajoutée les péages perçus en contrepartie de l'utilisation d'ouvrages de circulation routière, dans la mesure où ce service n'était pas fourni par un organisme de droit public agissant en qualité d'autorité publique ; qu'à la suite de cet arrêt, l'article 2 de la loi de finances rectificative pour 2000 du 30 décembre 2000 a modifié le code général des impôts pour soumettre ces péages à la taxe sur la valeur ajoutée, à l'exception de ceux qui sont perçus par des personnes morales de droit public agissant en qualité d'autorités publiques, et ouvrir, en conséquence, dans les conditions de droit commun, le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les éléments du prix d'une opération imposable ; qu'au lieu de demander avant le 31 décembre 2002, sur le fondement de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée, qui aurait pu donner lieu au paiement par l'État d'intérêts moratoires en vertu de l'article L. 208 du même livre, la SAS Camidi, qui exerce une activité de transporteur routier, a imputé sur ses déclarations de chiffre d'affaires des mois d'octobre et novembre 2005 la somme de 153 881 euros, correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle estimait déductible au titre des années 1996 à 2000, puis réclamé, par lettre du 28 décembre 2010, le versement d'intérêts moratoires ainsi que le versement d'une somme de 37 090 euros en réparation du préjudice correspondant au retard mis par l'Etat français à restituer cette taxe sur la valeur ajoutée acquittée au cours des années 1996 à 2000 ; que, par une décision du 2 février 2011, l'administration a rejeté cette demande au motif que la société, ayant procédé à l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée sur les déclarations de chiffre d'affaires, n'avait pas fait l'objet d'un dégrèvement susceptible d'ouvrir droit au versement d'intérêts moratoires ; que la SAS Camidi a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Montpellier en demandant le versement d'intérêts moratoires ou d'indemnités, pour un montant de 37 090 euros, en réparation du préjudice subi du fait de la restitution tardive de la taxe sur la valeur ajoutée correspondant aux péages de la période 1996-2000 ; que la SAS Camidi relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 juin 2012 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une indemnité de 37 090 euros, dont elle ramène le montant à 24 726,59 euros, en réparation du préjudice subi par elle ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. / Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes les actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice du droit à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure. / Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue " ; qu'en vertu de l'article R. 196-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) c) de la réalisation de l'évènement qui motive la réclamation (...) " ; que selon les termes du premier alinéa de l'article L. 208 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " Quand l'État est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés " ; qu'il résulte de ces dispositions que les remboursements de taxe sur la valeur ajoutée obtenus par une société après le rejet par l'administration d'une réclamation ont le caractère d'un dégrèvement contentieux de la même nature que celui prononcé par un tribunal au sens de l'article L. 208 de ce livre ; que ces remboursements doivent, dès lors, donner lieu au paiement d'intérêts moratoires qui courent, s'agissant de la procédure de remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée pour laquelle il n'y a pas de paiement antérieur de la part du redevable, à compter de la date de la réclamation qui fait apparaître le crédit remboursable ;

3. Considérant que si la SAS Camidi soutient que le préjudice dont elle réclame réparation résulte d'une faute de l'Etat et non d'une erreur dans l'assiette ou le calcul de l'imposition et qu'il pourrait ne pas être exclusivement financier mais également " commercial, matériel, moral ... ", elle ne justifie pas de l'existence d'un préjudice commercial ou moral et évalue exclusivement son préjudice matériel, correspondant à l'impossibilité de placer les sommes dont elle aurait pu obtenir le remboursement, sur les mêmes bases que les intérêts moratoires, qu'elle réclamait par ailleurs, à partir du taux d'intérêt légal avec application d'un abattement forfaitaire, à hauteur d'un tiers du résultat de ses calculs, pour tenir compte de l'incidence de l'impôt sur les sociétés ; qu'en se bornant ainsi à faire état de considérations générales et de calculs théoriques, sans apporter de précisions ni de justifications suffisantes relatives à sa situation particulière, la société requérante n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct de celui qui est susceptible d'être réparé par l'octroi d'intérêts moratoires, non plus que celle d'un lien de causalité direct et certain entre le préjudice qu'elle invoque et les conditions dans lesquelles l'Etat a appliqué la sixième directive aux péages versés aux concessionnaires d'autoroutes ; qu'ainsi cette demande de condamnation de l'Etat pour faute a, en réalité, le même objet que celui tendant à l'octroi de dommages intérêts sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, le ministre chargé du budget est fondé à soutenir que la demande est irrecevable ; qu'en raison de cette irrecevabilité, la SAS Camidi n'est pas davantage fondée à se prévaloir des articles 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Camidi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Camidi est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Camidi et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction générale des finances publiques.

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N° 12MA02984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA02984
Date de la décision : 22/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Responsabilité pour manquement au droit de l'Union européenne.

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Paiement de l'impôt - Questions diverses.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services économiques - Services fiscaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Francois POURNY
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SAILLARD LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-22;12ma02984 ?
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